Pape François: 10 pays africains visités en 10 ans
Stanislas Kambashi, SJ et Christian Kombe, SJ – Cité du Vatican
Pour son premier voyage en Afrique, du 25 au 30 novembre 2015, le Pape François a visité trois pays: le Kenya, l’Ouganda et la République centrafricaine. C’est à Nairobi qu’a eu lieu la première étape de cette visite, marquée par plusieurs rencontres. François y a dénoncé un scandale, la coexistence de la richesse et de la misère, une honte pour toute l’humanité. Ayant visité le bureau des Nations unies pour l’environnement, qui a son siège dans la capitale kenyane, le Pape François a souligné la nécessité de «sauvegarder la création en réformant le modèle de développement afin qu’il soit équitable, inclusif et durable». Au cours de cette première étape, qui avait pour devise: «Soyez fermes dans la foi, n’ayez pas peur», le Saint-Père a encouragé à tirer profit de la grande richesse de ce pays et à la mettre au service de tous, «une richesse naturelle et spirituelle, constituée par les ressources de la terre, par les nouvelles générations et par les valeurs qui forment la sagesse du peuple».
L’Ouganda, une terre du témoignage
Ensuite, en Ouganda, où la devise du voyage était: «Vous serez mes témoins», la visite de François a eu lieu sous le signe des martyrs de ce pays, à 50 ans de leur canonisation historique. Dans ses rencontres, le Pape François a notamment remercié et encouragé les catéchistes pour leur engagement «auquel participent souvent aussi leurs familles». Dans la Maison de Nalukolongo, il a apprécié la charité des nombreuses communautés et associations engagées dans le service aux plus pauvres, aux porteurs de handicap, aux malades. Il a encouragé l’Église locale pour ses nombreux témoignages dans la société.
En Centrafrique, l’ouverture de la porte sainte du jubilé de la miséricorde
La troisième et dernière étape de cette première visite en Afrique a été la République centrafricaine, pays qui cherchait à sortir d’une période très difficile, marquée par de violents conflits qui ont causé une grande souffrance au sein de la population. À Bangui, la capitale, le Pape a ouvert, avec une semaine d’avance, la première porte sainte du jubilé de la miséricorde, pour affermir la foi et l’espérance de ce peuple, «et symboliquement pour toutes les populations africaines». Partant de la devise de ce voyage: «Passons sur l’autre rive», François a invité à «laisser derrière soi les guerres, les divisions, la misère, et à choisir la paix, la réconciliation, le développement».
«Le Pape de la paix dans une Egypte de paix»
Pour sa deuxième visite en Afrique, François s’est rendu en Egypte, les 28 et 29 avril 2017. Il s’y était rendu à la suite d’une quadruple invitation: de la part du président égyptien Abdel Fatah Al-Sissi, de Sa Sainteté le patriarche copte orthodoxe Tawadros II, du grand imam d’Al-Azhar le cheikh Ahmed Al-Tayyeb et du patriarche copte catholique Ibrahim Isaac Sidrak. Au moment où l’Egypte faisait face à des conflits et souffrait gravement du terrorisme, la devise choisie pour le voyage était: «le Pape de la paix dans une Egypte de paix». François a notamment visité l’université Al-Azhar, la plus antique université islamique et la plus haute institution académique de l’islam sunnite. Cette visite avait un double objectif: «celui du dialogue entre les chrétiens et les musulmans, et, dans le même temps, celui de la promotion de la paix dans le monde». Il s’y est également tenue la conférence internationale pour la paix, au cours de laquelle le Pape a proposé une réflexion «qui a mis en valeur l’histoire de l’Egypte comme terre de civilisation et terre d’alliances».
Au cours de la rencontre avec les autorités, le Saint-Père a aussi mis en lumière le rôle de l’Egypte dans recherche de la paix au Moyen-Orient, ce qui est possible par la force du droit. Dans la déclaration commune signée avec Tawadros II, les deux personnalités se sont engagées «à ne pas répéter le baptême administré dans les Églises respectives». La rencontre œcuménique au siège du patriarcat copte orthodoxe a également connu la participation du patriarche de Constantinople et patriarche œcuménique Bartholomée.
Au Maroc, le Pape François a encouragé l’espérance
Le 30 et 31 mars 2019, le 28è voyage apostolique du Pape François l’a conduit au Maroc, sur invitation du roi Mohamed VI. «Serviteur d’espérance» était la devise de ce voyage qui a conduit François à la rencontre des frères et sœurs musulmans. Le Pape a invité à ne pas avoir peur de la différence, mais à la saisir comme une opportunité à vivre la fraternité. Avec le roi Mohammed VI, il rappelé le rôle essentiel des religions dans la défense de la dignité humaine et la promotion de la paix, de la justice et de la sauvegarde de la création. Ils ont aussi signé un Appel pour Jérusalem, «afin que la Ville Sainte soit préservée comme patrimoine de l’humanité et lieu de rencontre pacifique, en particulier pour les fidèles des trois religions monothéistes». Le Pape a aussi consacré une attention particulière à la question migratoire.
Mozambique: semer l’espérance, la paix et la réconciliation
Le quatrième voyage apostolique du Pape François en terre africaine, le 31è de son pontificat, l’a mené au Mozambique, à Madagascar et à Maurice, du 4 au 10 septembre 2019. François a visité ses trois pays d’Afrique du Sud-Est et de l’océan Indien, en «pèlerin de paix et d’espérance».
Le pèlerinage de l’évêque de Rome a débuté au Mozambique, où il a passé une journée et demie. «Au Mozambique, j’ai répandu des semences d’espérance, de paix et de réconciliation dans une terre qui a tant souffert dans un passé récent à cause d’un long conflit armé», déclarait François lors de l’audience générale du 11 septembre, au retour de ce 31è voyage apostolique. François avait notamment apprécié les efforts de l’Église pour accompagner le processus de paix, en particulier l’engagement de la communauté Sant Egidio. Le Souverain pontife avait par ailleurs encouragé les autorités du pays, «en les exhortant à travailler ensemble pour le bien commun». Aux jeunes des diverses confessions religieuses réunis autour de lui au Stade Maxaquene de Maputo, le Saint-Père a demandé de construire «le pays, en surmontant la résignation et l’anxiété, en diffusant l’amitié sociale et en tirant profit des traditions des personnes âgées».
Le point culminant de la visite de François au Mozambique était la célébration eucharistique au stade de Zimpeto, où sous la pluie, avait retenti «l’appel du Seigneur Jésus: ‘‘Aimez vos ennemis’’», apportant «la semence de la vraie révolution, celle de l’amour, qui met un terme à la violence et engendre la fraternité».
Madagascar: construire un avenir de développement
Après Maputo, le Successeur de Pierre s’est rendu à Antananarivo, capitale de Madagascar. Il s’est arrêté deux jours sur la grande île. «J’ai formé le vœu que, animé par son traditionnel esprit de solidarité, le peuple malgache puisse surmonter l’adversité et construire un avenir de développement, en conjuguant le respect de l’environnement et la justice sociale», a confié François. L’un des moments remarquables de son séjour à Madagascar est la visite de la «Cité de l’amitié» à Akamasoa, fondée par le père lazariste Pedro Opeka qu’il a connu en Argentine. «Dans ce lieu, a-t-il témoigné, on cherche à unir le travail, la dignité, le soin des plus pauvres, l’instruction des enfants. Le tout animé par l’Evangile. À Akamasoa, dans la carrière de granit, j’ai élevé à Dieu la prière pour les travailleurs».
Dans ce pays d’Afrique, «riche de beautés et des ressources naturelles, mais marqué par beaucoup de pauvreté», le Pape a encouragé les évêques «à être des ‘‘semeurs de paix et d’espérance’’, en prenant soin du peuple de Dieu, en particulier des pauvres et de nos prêtres». À l’eucharistie dominicale célébrée toujours dans le grand champ diocésain, François avait exhorté tous les chrétiens du pays à faire de Madagascar «un lieu où l’Évangile se fait vie et où la vie soit pour la plus grande gloire de Dieu».
Maurice: harmoniser les différences dans un projet commun
De la grande île africaine, le voyage apostolique s’est poursuivi sur une autre île, la République de Maurice, «célèbre destination touristique, mais que j’ai choisie comme lieu d’intégration entre diverses ethnies et cultures», a déclaré le Souverain pontife. À Maurice, il a notamment été marqué par le «fort dialogue interreligieux, et l’amitié» qui règne entre les chefs des différentes confessions religieuses. François avait apprécié les efforts des Mauriciens pour «harmoniser les différences dans un projet commun», les encourageant «à poursuivre aujourd’hui encore la capacité d’accueil, ainsi que l’effort de conserver et de développer la vie démocratique».
Trente ans après le voyage de saint Jean-Paul II, le Pape François a célébré l’eucharistie au sanctuaire de Marie Reine de la Paix devant une «multitude de visages venus de Maurice et d’autres îles de cette région de l’océan Indien», notamment de Rodrigues, Agalega, Chagos, mais aussi de la Réunion, des Comores et des Seychelles.
Au cours de cette messe, «en mémoire du bienheureux Jacques-Désiré Laval, appelé ‘‘l’apôtre de l’unité mauricienne’’», le Saint-Père a présenté les Béatitudes comme la «carte d’identité des disciples du Christ, un antidote contre la tentation d’un bien-être égoïste et discriminatoire (…) le levain d’un vrai bonheur, imprégné de miséricorde, de justice et de paix».
5è voyage apostolique: RDC et Soudan du Sud
Le dernier voyage apostolique du Pape François en terre africaine, le 40e de son pontificat, a été effectué en République démocratique du Congo et au Soudan du Sud, du 31 janvier au 5 février 2023. Dressant le bilan de cette visite dans ces deux pays limitrophes, lors de l’audience générale du 8 février, François en a parlé comme l’accomplissement de deux rêves: «rendre visite aux Congolais, gardiens d'un pays immense», poumon vert de l'Afrique et du monde avec l'Amazonie, et «au peuple sud-soudanais, dans un pèlerinage de paix ensemble avec l'archevêque de Canterbury Justin Welby et le modérateur général de l'Église d'Écosse, Iain Greenshields».
RDC: "non" à la violence et à la résignation, "oui" à la réconciliation et à l'espérance.
Les trois premiers jours, le Successeur de Pierre était à Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo. Pour François, ce pays «est comme un diamant, de par sa nature, ses ressources, et surtout son peuple; mais ce diamant est devenu une source de discorde, de violence, et paradoxalement d'appauvrissement du peuple». Face à une telle dynamique présente également ailleurs dans le continent, l’évêque de Rome a adressé deux paroles. «La première est négative: "ça suffit!", arrêtez d'exploiter l'Afrique!», a-t-il exhorté. «La seconde est positive: ensemble, ensemble avec dignité, tous ensemble avec respect mutuel, ensemble au nom du Christ, notre espérance, aller de l'avant. Ne pas exploiter et aller de l'avant ensemble».
L'un des moments les plus touchants du séjour en RD Congo a été la rencontre du Pape avec les survivants des violences de l'Est du pays. «Avec eux, a-t-il déclaré, j'ai dit "non" à la violence, "non” à la résignation, "oui" à la réconciliation et à l'espérance. Ils ont déjà tellement souffert et continuent de souffrir».
La messe célébrée à l’aérodrome de Ndolo selon le missel romain pour les diocèses du Zaïre a montré la vitalité de la foi de l'Église de la RD Congo. François a également vécu un «moment enthousiasmant» avec les jeunes et les catéchistes au stade des martyrs. «Aux jeunes du Congo, j'ai dit: voici votre chemin : prière, vie communautaire, honnêteté, pardon et service. Que le Seigneur entende leur cri en faveur de la paix et de la justice».
Soudan du Sud: surmonter le conflit et construire la paix
À Juba, la capitale sud-soudanaise, le Souverain pontife a effectué un pèlerinage œcuménique de paix avec les chefs de la Communion anglicane et l’Église d’Écosse. Pour François, ce voyage était «l'aboutissement d'un parcours initié il y a quelques années» avec les responsables de deux Églises et les autorités politiques pour «surmonter le conflit et construire la paix» dans le plus jeune État du monde. «Continuez à dire "non" à la corruption et au trafic d'armes et "oui" à la rencontre et au dialogue», a exhorté François.
Le caractère œcuménique de la visite au Soudan du Sud s’est particulièrement manifesté pendant le moment de prière avec les chrétiens anglicans et ceux de l'Église d'Écosse. «Ensemble, a affirmé le Pape, nous avons écouté la Parole de Dieu, ensemble nous avons adressé des prières de louange, de supplication et d'intercession».
Le Pape a également tenu à rencontrer à Juba les personnes déplacées internes, «les écouter et leur faire sentir la proximité de l'Église». Il s’est tourné particulièrement vers les femmes, en les encourageant «à être les semences d'un nouveau Soudan du Sud, sans violence, réconcilié et pacifié».
L’ultime activité de ce cinquième voyage œcuménique du Pape en terre africaine était la célébration eucharistique au mausolée John Garang. «J'ai fait écho de l'Évangile en encourageant les chrétiens à être "sel et lumière" dans ce pays en proie à tant de tribulations».
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