Inculpation de Mgr Rolando Alvarez au Nicaragua
Marie Duhamel – Cité du Vatican
Début août, les autorités l’avaient d’abord empêché de sortir de l’évêché. Mgr Alvarez avait émis des critiques contre la fermeture de cinq radios de son diocèse, accusées de ne pas avoir les autorisations nécessaires pour émettre. L’évêque de Managua depuis avril 2011, avait pourtant, en personne, déposé les documents requis en 2016, sans jamais obtenir de réponse. Mise devant le fait accompli, le diocèse de Matagalpa assure qu’il continuera à informer et «à dénoncer toute situation qui, comme celle-ci, continue à violer la liberté d’expression et de religion au Nicaragua», rappelle l’agence Fides. La télévision de la conférence épiscopale avait déjà été fermée.
Les jours passent, Mgr Alvarez célèbre la messe en direct sur les réseaux sociaux, y remercie les fidèles pour leur soutien, jusqu’au raid du 20 août. En pleine nuit, les forces anti-émeutes entrent dans l’évêché. Le prélat et 8 autres personnes –des prêtres et des laïcs- sont emmenés manu militari. Dès le lendemain, le Pape se disait préoccupé et appelait au dialogue à l’issue de la prière mariale de l’angélus place Saint-Pierre.
L’évêque est emmené dans la capitale, maintenu en détention. À 56 ans, Mgr Alvarez est en bonne santé et vit un isolement partiel, puisqu’il a peu recevoir la visite du cardinal Leopoldo Brenes qui le premier expérimenta –avec d’autres- la répression des autorités.
4 ans d'hostilité contre l'Église catholique
En juillet 2018, l’archevêque de Managua est président de la conférence épiscopale nationale. Avec le nonce apostolique, Mgr Stanislaw Waldemar Sommertag, et plusieurs évêques, ils se rendent à 40 kilomètres au sud de la capitale pour aller à la rencontre d’un petit groupe de détracteurs du pouvoir qui s’est réfugié dans la basilique San Sebastian de Diriamba pour fuir des affrontements meurtriers avec les forces de l’ordre, lors d’une manifestation. Les évêques sont accueillis par les insultes des partisans du président Ortega, puis malmenés par les 200 paramilitaires qui font irruption dans la basilique. Les blessés sont nombreux, même au sein du clergé.
Dès lors, l’Église est perçue comme un adversaire politique par les sandinistes au pouvoir; elle conduisait pourtant la table de dialogue.
Considérée comme non alignée au pouvoir, le gouvernement ne cache plus son hostilité. Il retire son agrément au nonce apostolique contraint de quitter le pays, des prêtres sont assignés à résidence, d’autres arrêtés sans explications ou pour des allégations de violence à caractère sexuel. Plus de 3 200 ONG ont été fermées depuis 2018, soit 43% d’entre elles, officiellement parce qu’elles ne respectaient pas ou négligeaient leurs obligations. Parmi elles, l’associations des Missionnaires de la Charité de mère Teresa. Les religieuses sont chassées du pays.
Plusieurs procédures judiciaires
Aujourd’hui, on connait finalement les accusations qui pèsent contre Mgr Alvarez. Il est inculpé pour divulgation de fausses informations et pour conspiration visant à porter atteinte à l’intégrité nationale. La première comparution est prévue en janvier.
Sur le volet judiciaire, un mandat a par ailleurs été émis contre le père Uriel Vallejos. L’ancien directeur de Caritas Nicaragua et curé de l’église de la Divine Miséricorde de Sébaco, dans le diocèse de Matagalpa, aurait quitté le pays, selon l’agence américaine Associated Press.
Professer encore et toujours l'espérance
En octobre dernier, lors d’une visite au Vatican pour présenter le document du Synode du Celam, le cardinal Brenes réaffirmait à Radio Vatican-Vatican News que «l’Église n’est d’aucun parti ou idéologie». «Nous continuons à faire notre travail qui est un travail pastoral, en accompagnant notre peuple, en professant l’espérance», soutenait-il.
Le 19 novembre dernier, dans leur message pour l’Avent, les évêques du Nicaragua écrivaient que «même au milieu des incertitudes et des tristesses, le Royaume de Dieu se rend présent dans notre histoire». À l’approche de Noël, ils évoquent leur joie et leur espérance parce que «le Christ vient parmi nous». «La force de sa vie nouvelle et celle de notre Mère, la Vierge Marie ne nous abandonnent pas», surenchérissent les évêques qui formulent deux vœux: faire du Nicaragua un pays de frères et entamer une conversion pour que l’Église soit à la hauteur de la mission que le Seigneur lui a confiée.
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