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Des journalistes tunisiens manifestent à l'occasion de la Journée mondiale pour la liberté de la presse, le 3 mai 2024. Des journalistes tunisiens manifestent à l'occasion de la Journée mondiale pour la liberté de la presse, le 3 mai 2024.   (ANSA)

Du Sahel à l'Argentine, la liberté de la presse de plus en plus menacée

À l’occasion de la Journée mondiale pour la liberté de la presse ce vendredi 3 mai, l’ONG Reporters sans frontières (RSF) a publié son classement annuel sur la liberté de la presse dans le monde. Parmi les évolutions notables, une forte dégradation au Sahel et en Argentine, en raison de pressions politiques.

Vianney Groussin – Cité du Vatican

En cette Journée mondiale de la liberté de la presse, le Souverain pontife a apporté son soutien aux journalistes en publiant un message sur son compte X: «La liberté de la presse est essentielle pour développer un profond sens critique et apprendre à distinguer la vérité du mensonge et à œuvrer de manière non idéologique pour la justice, la paix et le respect de la Création»

Chaque année, l’ONG Reporters sans frontières (RSF) fait le point sur l’état de la liberté de la presse dans le monde, en attribuant une note à chaque pays en fonction du niveau de liberté des médias. Le rapport 2024 s’appuie sur cinq indicateurs: politique, légal, sécuritaire, social et économique. Le Danemark arrive en tête du classement, suivi par la Norvège et la Suède, alors que l’Érythrée pointe en dernière position. Cette année, «l'indicateur politique se dégrade le plus», note Anne Bocandé, directrice éditoriale de RSF.

Le Sahel central, «trou noir de l’information»

Dans la région du Sahel central, la situation politique n’est particulièrement pas favorable à l’exercice du métier de journaliste, surtout depuis cette année. Au Niger (80e, moins 19 places), au Burkina Faso (86e, moins 28 places) et au Mali (114e, moins 1 place), «les juntes qui ont pris le pouvoir […] ne cessent de resserrer leur emprise sur les médias et d’entraver le travail des journalistes», regrette Reporters sans frontières dans son communiqué. Les récents coups d’État militaires dans ces trois pays africains ont conduit à une forte dégradation des conditions de travail des journalistes, par exemple au Burkina Faso, où «plusieurs médias ont été suspendus ou interdits jusqu'à nouvel ordre, ce qui porte à un peu plus de dix le nombre de médias interdits désormais au Burkina Faso», observe Anne Bocandé. D’autres sources d’instabilités existent aussi dans la région, notamment avec la présence de nombreux groupes terroristes: «Dans quelques jours, cela fera six mois que deux journalistes de radios communautaires au Mali ont été pris en otage, ont disparu […] et ce même jour où ils ont été enlevés, un de leurs collègues a été retrouvé mort aussi», déplore Anne Bocandé, qui y voit l’action de groupes armés.

L’Argentine dégringole dans le classement

L’Argentine (66e, moins 26 places) est un des pays qui enregistre la plus grande chute dans le classement de la liberté de la presse, là aussi pour des raisons politiques, explique la représentante de RSF: «L'arrivée au pouvoir de Javier Milei a dégradé le contexte d'exercice du journalisme». Le président argentin multiplie les invectives envers les journalistes et les médias depuis son arrivée au pouvoir en décembre 2023. Dans son analyse, Reporters sans frontières parle même de «prédateurs revendiqués de la liberté de la presse», pour désigner ceux qui comme Javier Milei, s’attaquent explicitement aux médias en Amérique du Sud. «On voit qu'il s'en est pris régulièrement dans des vindictes verbales aux journalistes dans le but de les décrédibiliser», remarque Anne Bocandé, alors que «les journalistes font le travail de transmettre des informations fiables, indépendantes, plurielles», essentiel pour la démocratie. Récemment, le président argentin a fait fermer la première agence de presse du pays, Télam, l’accusant de faire de la propagande, et provoquant de vives réactions.

Interview d'Anne Bocandé, responsable éditoriale de Reporters sans frontières

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03 mai 2024, 15:46