Synode : Mgr Quesnel Alphonse déplore le grand mouvement de migration des jeunes haïtiens malgré les efforts faits en leur faveur
Jean-Pierre Bodjoko, SJ – Cité du Vatican
La caractéristique principale de la jeunesse haïtienne repose sur sa force prophétique. Les jeunes sont toujours à l’avant-garde, a fait savoir Mgr Alphonse, qui met un accent particulier sur cette valeur de la jeunesse de son pays. « Je me rappelle qu’en 1986, les jeunes étaient vraiment à l’avant garde dans la lutte pour la chute de la dictature de Duvalier. Depuis lors, ils n’ont jamais cessé de dire à l’Eglise, combien ils ont besoin de jouer un rôle prophétique. C’est ce que j’essaie de mettre en avant dans ce Synode, de parler de la force prophétique des jeunes haïtiens. De dire à quel point ils sont déterminés, à aller jusqu’aux bout », a expliqué l’évêque de Fort-Liberté. Ces jeunes demandent aussi que la lumière soit faite sur les fonds du Petrocaribe. Petrocaribe est le nom du programme lancé en 2006 par l’ancien président vénézuélien Hugo Chavez, qui permet à plusieurs pays d’Amérique Latine et des Caraïbes, d’acquérir des produits pétroliers à un cout avantageux et de payer leurs factures sur 25 ans, à un taux d’intérêt de 1%. En Haïti, ce fonds était censé financer des projets sociaux.
Comment ces jeunes, affrontent-ils la situation socio-économique, après le désastre causé par le tremblement de terre
« C’est notre plus grand défi. On peut des fois investir dans le domaine de la jeunesse, mais après ils ne restent pas. Il y a un grand mouvement migratoire vers les autres pays, entre autres : le Chili, le Venezuela, les Etats-Unis. Ainsi, le grand défi, consiste à aider les jeunes à rester dans leur pays, et à investir davantage pour eux. Nous essayons de relever ce défi à travers l’éducation, le style d’accompagnement », c’est ce qu’a fait savoir Mgr Quesnel Alphonse. « Nous avons également besoin de la solidarité internationale. Notre pays a été touché par un séisme, nous appelons à une solidarité internationale, pour aider les jeunes à rester dans le pays, pour que l’Eglise puisse vraiment compter sur eux », a-t-il poursuivi. Samedi 6 octobre 2018, un séisme de magnitude 5,9 sur l’échelle de Richter a secoué le Nord-Ouest d’Haïti. Le dernier bilan communiqué par les autorités fait état d’au moins 15 personnes tuées et 300 blessés. La catastrophe a suscité l’émotion chez les populations encore traumatisées par le séisme dévastateur de 2010.
Le rôle de l’Eglise dans le processus de développement d’Haïti
Pour Mgr Alphonse, la Conférence épiscopale haïtienne s’implique pour sortir le pays de l’impasse. Le fléau de la corruption se trouve au centre des préoccupations de la population, et l’Eglise n’en reste pas moins insensible.
« Pour le moment, il y a deux démarches que nous entreprenons. D’une part, il y a les messages que nous publions. Le dernier message porte sur la corruption. Un message qui a éveillé les consciences et qui a eu un bon impact. D’autre part, nous avons une commission mixte Eglise-Etat, que l’on voudrait rendre fonctionnel, afin qu’il ait un dialogue entre ces deux entités. La commission est constituée de trois évêques et de trois membres du gouvernement. Quand il y a une situation ponctuelle, ils se réunissent pour trouver des solutions en termes d’éléments de réponses. Je pense que nous somme sur la bonne voie. Il n’y a pas de tension directe entre l’Eglise et l’Etat, étant donné qu’il y a ce besoin d’aider. L’Eglise a donc un rôle à jouer dans la communauté. Nous essayons en tant que conférence épiscopale d’apporter notre contribution. Outre les dénonciations, nous faisons des propositions pour aider le pays à sortir de l’impasse économique. Une impasse qui empêche les jeunes de trouver toutes leurs dimensions », a signifié l’évêque de Fort-Liberté.
Le synode, un partage d’expériences
« Je suis en train de vivre la dimension catholique de l’Eglise. La diversité dans le partage, dans les expériences. Quand je vois par exemple ce que dit l’évêque d’un tel pays d’Afrique, ou du Liban, ou encore d’Irak de sa communauté des jeunes, cela me réconforte. Des fois, on peut s’enfermer dans sa misère, pensant d’être les seules victimes de la souffrance. Mais quand on écoute les autres, cela nous aide à avoir un regard plus large et optimiste sur la réalité. En ce qui nous concerne, nous nous rendons compte finalement que nous ne sommes pas les derniers, mais qu’on peut faire davantage », a indiqué Mgr Alphonse.
Haïti, un pays riche en vocation
L’évêque de Fort-Liberté ne cache pas sa satisfaction concernant les vocations dans son pays. « Nous sommes vraiment riche en vocation, au grand séminaire de port au prince, le seul pour les 10 diocèses du pays, nous avons quelques 300 séminaristes. C’est une richesse pour l’Eglise », s’est-il réjoui. Mais pour Mgr Alphonse, il reste tout de même beaucoup à faire au niveau de l’accompagnement vocationnelle, et de la formation des jeunes.
Merci d'avoir lu cet article. Si vous souhaitez rester informé, inscrivez-vous à la lettre d’information en cliquant ici