Synode : Si nous enseignons les choses que nous ne vivons pas, les jeunes ne nous suivront pas, ils iront ailleurs, estime Mgr Bienvenu Manamika Bafouakouahou
Un entretien de Jean-Pierre Bodjoko, SJ – Cité du Vatican
Dans l’entretien qu’il a eu avec Vaticannews le 5 octobre 2018, Mgr Manamika Bafouakouahou a voulu donner son point de vue sur la place et le rôle des jeunes dans l’Eglise.
Le déroulement même du Synode, avec les thèmes qui y émergent, concerne-t-il les jeunes africains en général et les jeunes du Congo en particulier ?
Nous ne sommes pas tellement très surpris. Parce que le Synode fait attention aux jeunes en général, et en même temps nous sommes contents parce qu’effectivement il touche les problèmes des jeunes qui concernent l’Afrique, et donc aussi le Congo. C’est vraiment les thèmes d’actualité qui n’étonnent pas du tout, et nous sommes heureux qu’ils soient traités aussi au Synode. On ne passe pas outre, on ne ferme pas les yeux, mais on essaie de se crever les yeux sur la réalité. Nous ne faisons pas trop attention aux jeunes et aujourd’hui on nous demande d’écouter davantage les jeunes, au lieu que nous les enseignions tout le temps, il est temps que nous puissions ouvrir les yeux pour que les jeunes nous enseignent sur certaines réalités, parce que nous commençons à être dépassés facilement. Donc, le thème n’est pas hors sujet c’est vraiment en plein dans actualité.
Qu’attendent les jeunes de la république du Congo de ce synode ?
Je pense que les jeunes du Congo comme tous les jeunes, attendent une prise en compte de leurs réalités. Que les évêques, les prêtres, l’Eglise, tiennent compte de leur place. Non seulement de leur place mais aussi, de ce qu’ils vivent afin qu’ils puissent aller de l’avant. Parce qu’il y a comme une contradiction entre les jeunes et nous. Ils ne comprennent pas le langage de l’Église, ils ont besoin d’une certaine adaptation. Ils ont aussi l’impression que nous vivons dans les nuages et que nous ne comprenons pas leurs réalités. Il est temps que nous puisons prendre en compte ces réalités.
Les évêques, le clergé, les pasteurs de l’Eglise du Congo sont-ils prêts à s’adapter aux jeunes ou ce sont les jeunes qui doivent s’adapter à l’Église ?
Je pense que c’est un mouvement vice-versa. Il ne s’agit pas de troquer l’Evangile. L’Évangile restera toujours le même. Mais il s’agit de trouver le langage approprié pour aborder les jeunes. Les jeunes doivent faire un effort pour comprendre, pour s’adapter aussi à l’Évangile. Donc, il y a comme une dialectique, nous devons converger les uns envers les autres. Et je pense que c’est aussi un problème avec les prêtres. Il est temps que les prêtres ne soient pas seulement des enseignants, parce que les jeunes en ont marre de voir des pasteurs qui parlent, mais leur l’être contredit ce qu’ils disent. Les jeunes ont besoin des pasteurs modèles, ils ont besoin des pasteurs humbles, qui ne viennent pas seulement déverser le savoir mais qui soient humbles pour être vraiment des témoins. Les jeunes n’ont pas besoin des haut-parleurs, mais d’êtres qui parlent, qui soient fidèles à la vérité de l’Évangile. C’est ce dont les jeunes ont besoin. Nous devons avoir, nous pasteurs, cette humilité de pouvoir accepter d’être corrigés par l’Évangile. Ne soyons pas des diseurs mais des faiseurs de vérité et d’amour. Les jeunes ont besoin de boussole et je pense qu’avec ce témoignage de notre être, les jeunes se mettront au pas. Si nous enseignons les choses que nous ne vivons pas, les jeunes ne nous suivront pas, ils iront ailleurs.
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