Les femmes de l’Est de la RDC se préparent à accueillir le Pape
Stanislas Kambashi,SJ – Cité du Vatican
Therese Mema Mapenzi est directrice du Centre Olame, une structure de l’archidiocèse de Bukavu, qui travaille pour la promotion intégrale des femmes et des jeunes filles. Elle travaille avec les femmes dans des maisons de conseil, qui accueillent les femmes marginalisées et victimes des conflits, des violences domestiques ; des femmes et des enfants accusés d’être des sorciers. Le Centre Olame accueille ces catégories et assure leur prise en charge psychologique et social pour leur donner l’opportunité de recommencer une nouvelle vie.
Le travail du Centre Olame
Le travail du Centre Olame s’articule en cinq domaines d’interventions. Il œuvre dans la pastorale des femmes : les femmes de centre contribuent à propager la foi en partageant notamment la bonne nouvelle d’espérance ; en organisant divers apostolats. A l’exemple de la Vierge Marie, ces femmes plaident, attirent l’attention et jouent également le « rôle des sentinelles de l’invisible », pour dénoncer ce qui ne va pas dans la société, de l’Église, etc., pour qu’il y ait réparation. Le Centre Olame travaille aussi dans la promotion socioéconomique des femmes. « Les femmes de l’Est de la RDC ont longtemps été marginalisées par la coutume et par la guerre. Dans les maisons de conseil, on essaie de reconstruire leur vie émotionnelle, psychologique et sociale ». Le centre dote ces femmes des revenus pour réorganiser leur vie économique et sociale. Elles bénéficient également des formations sur certaines activités génératrices des revenus. Elles sont formées à travailler en groupe, afin de partager l’expérience et d’apprendre les unes des autres.
Des plaidoyers en faveur des femmes
Un autre domaine dans lequel s’engage le Centre Olame est celui des plaidoyers au niveau national et international, en faveur des femmes. En 2006 par exemple, beaucoup de femmes de cette région de la RDC étaient marginalisées et indexées : leurs plaintes sur les violences étaient perçues comme des exagérations, parler de violences subies était un tabou, il était difficile de dénoncer, a expliqué Therese Mema. « Alors on a fait un plaidoyer pour que le gouvernement congolais fasse une loi exceptionnelle contre les violences faites aux femmes ».
Pour la directrice du Centre Olame, leurs réclamations sont souvent prises en compte. La loi sur les violences faites aux femmes avait été promulguée, mais le problème, regrette-t-elle, reste l’application. C’est aussi le cas pour toutes les mesures concernant la marginalisation ou la promotion de la femme.
Therese Mema regrette les cas d’impunité concernant les femmes accusées sorcières et marginalisées. La loi ne se prononce pas face à ce problème qui est une injustice. L’État et le monde gardent malheureusement silence.
Le Pape en RDC, un soulagement pour les femmes de l’Est
« La visite du Pape en RDC est pour nous comme un rêve, car c’est depuis longtemps que nous l’attendions. Cette nouvelle nous a rempli de joie. Le Pape nous donnera réconfort et courage ; il nous apportera paix et espérance, il va prier avec nous », a déclaré Thèrese Mema.
« Depuis plus de vingt ans, nous souffrons d’une guerre injuste qui nous a été imposée, à cause de nos ressources naturelles qui nous apportent le malheur plutôt que le bonheur ». Dans cette situation, les femmes de l’Est de la RDC attendent beaucoup du Pape, a confié la directrice du Centre Olame. « Le monde entier appelle le Sud-Kivu la capitale mondiale des violences sexuelles », dénomination peu digne. Ces femmes vivent pourtant des situations tout aussi condamnables que inacceptables : « certaines femmes ont été enterrées vivantes, d’autres ont perdu leurs maris, des enfants sont nés du viol, d’autres ont été forcés d’aller au front, etc., nous avons encore des cicatrices au cœur, plus douloureuses que les plaies. Les corps des femmes ont été utilisés comme arme de guerre, mais le monde est resté insensible ». La présence du Pape sera une consolation, les larmes pourront être séchées.
Les femmes attendent en outre que le Pape puisse toucher le cœur des autorités pour les emmener à la raison. Elles espèrent aussi voir une plus grande participation des femmes à des hautes instances dans l’église du Congo.
Appel aux autorités congolaises à mettre fin à l’impunité
Aux autorités congolaises, Thèrese Mema exhorte à sortir de l’égoïsme, à redevenir plus humains et à être sensibles aux souffrances de leurs compatriotes. Elle les invite par ailleurs à mette fin à l’impunité qui ne fait qu’encourager les bourreaux dans leurs besognes : « certains seigneurs de guerre, auteurs des exactions et des violences, sont parfois intégrés dans le gouvernement ; des anciens bourreaux jouent le rôle de policiers. C’est une manière de primer ceux qui nous ont agressés dans le passé. Nous demandons au gouvernement congolais de redonner aux femmes leur dignité et de sanctionner tous ces bourreaux », a lancé la directrice du Centre Olame.
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