François en Afrique: l'être humain, inviolable image de Dieu
Jean Charles Putzolu - Cité du Vatican
Deux pays étaient au programme du 40e voyage apostolique du Pape François, le cinquième en Afrique: tout d'abord le Soudan du Sud, plus jeune État indépendant de la planète, aux prises avec une guerre civile qui a provoqué des déplacements énormes de population. On estime que le tiers des Sud-Soudanais vit aujourd’hui dans des camps de réfugiés, dans et en dehors du pays. François a multiplié les appels à la paix et à la réconciliation. Ces deux mots ont été également au cœur de la visite du Saint Père en République démocratique du Congo. Cette première étape africaine du Pape a été vécue comme «une grande grâce», presque 38 ans après la visite de saint Jean-Paul II, estime Mgr Carlos Ndaka. L’évêque auxiliaire et vicaire général de l'archidiocèse de Kinshasa est resté frappé par l’enthousiasme des Congolais, et pas seulement des catholiques. Le visite de François va, selon lui, renforcer la fraternité, et peut permettre une réelle avancée vers la paix.
Enthousiame et effervescence
L’effervescence est telle, et les témoignages si nombreux, que Mgr Ndaka est presque convaincu que la visite de l’évêque de Rome va «réanimer notre foi catholique et même la foi de certains frères qui pour telle ou telle autre raison se sont éloignés de l'Église».
Il y a également de fortes chances que les relations œcuméniques en ressortent renforcées. Au Soudan du Sud, l’œcuménisme était l’un des enjeux de la visite. François était accompagné de Justin Welby, primat de l’Église d’Angleterre, et de Iian Greenshields, Modérateur de l’Église d’Écosse. Mais en République démocratique du Congo, François était venu seul, en pèlerin de paix. Pourtant, constate Mgr Carlos Ndaka, «j'ai vu les témoignages très éloquents de nos frères protestants qui ont mobilisé aussi leurs fidèles pour accueillir dignement le Pape»; constat qui fait dire à l’évêque congolais que cette visite va contribuer à renforcer les liens de fraternité avec les fidèles «qui ne sont pas de l'Église catholique».
Vers un renouveau de la foi
Les conséquences de la venue du Saint-Père pourrait même aller au-delà, et inciter des Congolais à mieux connaitre le Christ. Si aujourd'hui un peu moins de la moitié des 100 millions de Congolais est catholique, «il y a possibilité que nous puissions dépasser la moitié de la population, vu l'effervescence et l’enthousiasme», pronostique Mgr Ndaka.
Paix et réconciliation, maitres mots de la visite
François, comme le Christ qui passait de village en village pour annoncer la Bonne Nouvelle, s’est adressé à tous les Congolais grâce à la radio et la télévision qui a fait entrer la parole du Pape dans presque tous les foyers d’un pays de plus de deux millions de kilomètres carrés, soit quatre fois la France. «Il a touché les points concrets de notre vivre ensemble», poursuit l’évêque auxiliaire de Kinshasa, expliquant les déchirures passées et présentes qui font couler le sang des innocents.
Entre les deux visites de Jean-Paul II en 1985 et de François cette année, «plusieurs événements se sont succédé les uns après les autres, malheureux et douloureux même». Mgr Carlos Ndaka évoque «deux pillages», qui ont causé beaucoup de tort, mis en souffrance le tissu économique du pays, et «déchiré en fait la communion nationale».
«Nous traversons depuis 20 ans, des guerres, des invasions, des pillages de nos biens, et de nos ressources naturelles», dénonce-t-il. Aujourd’hui, poursuit l’évêque, «il y a vraiment cette nécessité de pouvoir marcher ensemble».
Il explique que François a bien perçu le besoin de réconciliation, de paix et d’unité, mais il faut lutter encore contre la corruption «qui gangrène le développement du pays».
Une semence sur une bonne terre
Les paroles du Pape sont autant de graines dispersées sur une terre fertile. C’est la métaphore que retient Mgr Ndaka. Le cœur des Congolais sont un peu comme la bonne terre de l’Évangile, soutient-il, «alors après le départ du Pape François, nous pouvons espérer des jours meilleurs pour notre pays et un Congo prospère, plus beau qu'avant».
J’ai pleuré et j’ai vu le Pape souffrir
La rencontre du Pape François avec les victimes des violences et de la guerre dans l’Est de la RDC restera certainement le moment marquant de ce voyage. «Quand le Saint-Père s'adresse aux victimes, détaille Mgr Ndaka, il s'adresse au monde entier et s'adresse aux victimes et aux bourreaux». Lui qui était présent lors de cette rencontre mercredi 1er février, assure: «j'ai pleuré comme pas possible. J'ai versé les larmes quand j'entendais les témoignages. À un moment donné, j'avais la tentation de pouvoir me lever, de sortir, de ne plus suivre, parce que c'était émouvant et fort».
En parlant de François, il continue: «lui aussi, je le voyais souffrir en regardant ces pauvres gens, ces innocents qui sont torturés, malmenés, qui n'ont rien fait, qui ont vu leurs parents déchirés, déchiquetés».
De l’avis de nombreux évêques, le monde ne peut maintenant plus dire qu’il ne savait pas. Les témoignages déchirants qui ont été entendus, les personnes mutilées qui sont venues témoigner ont fait enfin le tour du monde grâce à la présence du Saint-Père. Ce dernier n’a d’ailleurs pas manqué de s’adresser à la fois aux bourreaux et à la communauté internationale. «Nous espérons vraiment que la peine ressentie et exprimée par le Saint-Père et par nous tous qui avons suivi cette rencontre puisse toucher le cœur des hommes, surtout les cœurs des bourreaux et de ceux qui les soutiennent matériellement, financièrement. Il faut arrêter avec ces choses horribles!», s’exclame Carlos Ndaka.
Le religieux conclut: «nous sommes un monde créé par Dieu et nous sommes en face d’être créés à l'image de Dieu. Nul ne peut mettre la main sur ce que Dieu a créé à son image et à sa ressemblance».
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