«Le peuple kenyan ne veut pas d’une guerre civile»: la mise en garde des leaders religieux
Christian Kombe, SJ – Cité du Vatican
«Une nuit noire de douleur, d’anxiété, d’inquiétude et de perte», c’est ainsi que les leaders religieux du Kenya décrivent la nuit du 27 au 28 mars, qui a suivi la deuxième journée de manifestation de la coalition de l’opposition Azimio One Kenya. Les chefs religieux se disent accablés par les actes de violence qui accompagnent ces manifestations, «et qui ont culminé en une nuit d’incendies criminels, de larmes, de colère et de pertes pour les familles» aussi bien musulmanes que chrétiennes.
L’unité, la force des Kényans
C’est de Kibra que les membres du Conseil interreligieux du Kenya se sont adressé à la presse. En effet, cette circonscription du sud-ouest de la capitale Nairobi a été le principal théâtre de la nuit de chaos, qui a suivi les manifestations du 27 mars. Les chefs religieux condamnent en particulier l’incendie par des inconnus de deux édifices religieux de Kibra, l’église pentecôtiste d’Afrique de l’Est et la mosquée islamique Nasjid A-Aqsa.
«Notre unité a toujours été la force qui nous a permis de faire face aux défis et au tribulations au cours de longues années de coexistence fraternelle», rappellent les chefs religieux contre les tentatives de dresser les Kényans les uns contre les autres, en fonction de différences politiques et religieuses.
«Nous vivons dans les mêmes quartiers, nos enfants jouent ensemble, certains fréquentent les mêmes écoles, nous allons dans les mêmes hôpitaux et nous respirons le même air donné gratuitement par Dieu tout-puissant», peut-on lire dans leur communiqué de presse. Le Conseil interreligieux déplore notamment le fait que ces évènements se produisent au début de deux moments forts de la vie de deux confessions religieuses, la semaine sainte des chrétiens et le mois du Ramadan islamique.
Non à la violence, oui au dialogue
«Le peuple kenyan ne veut pas d’une guerre civile», déclarent les leaders religieux, pour qui les récents évènements rappellent les tristes et honteux souvenirs des affrontements post-électoraux de 2007-2008, «qui se sont métamorphosés en jours sombres de violence, de meurtres, de destruction de biens et de déplacements de milliers de personnes». Aussi exhortent-ils la classe politique à prendre de la hauteur pour faire passer le pays en premier devant tous les intérêts partisans, à s’abstenir de toute incitation à la violence aussi bien dans leurs réunions que sur les médias sociaux.
Le conseil interreligieux kenyan invite le président William Ruto et son principal opposant Raïla Odinga au dialogue afin d’apaiser les tensions dans le pays. S’adressant au chef de l’État, il lui demande d’adopter un mode gouvernance inclusif et créatif pour faire du Kenya «le foyer de tous les peuples». Quant au numéro un de l’opposition, les responsables religieux l’appellent à «assouplir sa position politique militante contre le gouvernement et d'appeler ses partisans à être pacifiques». Ils exhortent la coalition Azimio One Kenya d’annuler ses manifestations et d’utiliser des solutions alternatives.
Les chefs religieux, qui se disent prêts à accompagner les politiques dans cette voie de résolution pacifique des conflits, demandent aux organisations de la société civile et aux médias de jouer convenablement leur rôle, sans se laisser entraîner dans la polarisation partisane.
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