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M. Regis Kevin Bakyono, Ambassadeur du Burkina Faso près le Saint-Siège M. Regis Kevin Bakyono, Ambassadeur du Burkina Faso près le Saint-Siège 

Juguler le terrorisme et restaurer l’intégrité du territoire burkinabè

La vitalité de la coopération entre le Burkina Faso et le Saint-Siège, la lutte contre le terrorisme avec pour objectif majeur la reconquête du territoire national, une certaine indifférence de la communauté internationale face au drame sécuritaire que vivent ce pays et ceux de la région du Sahel sont parmi les thèmes abordés par le nouvel ambassadeur du Burkina Faso près le Saint-Siège, Régis Kévin Bakyono, dans un entretien accordé à Vatican News.

Stanislas Kambashi, SJ et Françoise Niamien – Cité du Vatican

M. Bakyono, qui a présenté au Pape François ses lettres de créance le 25 mars dernier, a tout d’abord commencé par évaluer l’état des relations entre son pays le Burkina Faso et le Saint-Siège, qu’il estime «excellent». L’année 2023 marque les 50 ans de l’établissement formel des relations entre les deux Etats depuis 1973, a indiqué le diplomate. Pour lui, ces rapports ont été davantage intenses durant les vingt dernières années, à travers notamment la matérialisation de certains actes comme la nomination en 2007 d’un nonce apostolique au Burkina Faso, avec résidence à Ouagadougou. En 2015 le Burkina Faso a ouvert une ambassade près le Saint-Siège, avec résidence à Rome. M. Bakyono a saisi l’opportunité pour remercier son prédécesseur, M. Robert Compaoré, qui a posé les bases de cette représentation diplomatique permanente. Un autre acte de cette coopération intense est la signature, en 2019, des Accords-Cadres entre les deux Etats. Pour le diplomate burkinabè, tout ceci est «le témoignage de la vitalité de la coopération entre le Burkina Faso et le Saint-Siège».

L’Eglise et l’Etat burkinabè, deux partenaires de longue date

Le nouvel ambassadeur du Burkina Faso près le Saint-Siège est par ailleurs remonté dans l’histoire et a mentionné les deux voyages du pape Jean Paul II, en 1980 et en 1990. A l’occasion de son premier voyage, le saint Pape avait lancé l’appel en faveur des pays du Sahel, ce qui a abouti à la création de la Fondation Jean Paul II pour le Sahel. Cette Fondation, qui a son siège dans la capitale burkinabè Ouagadougou, œuvre notamment pour la préservation et la protection de l’environnement, mais aussi dans l’optique d’un développement humain intégral. Parmi les secteurs où l’Eglise est très investi au Burkina Faso, le diplomate burkinabè  a mentionné la santé publique et l’éducation.

Terrorisme et transition politique, deux phénomènes liés au Burkina Faso

Concernant la situation de son pays, pris entre une transition politique et la lutte antiterroriste, l'ambassadeur a tenu à souligner que «le Burkina Faso est un pays historiquement attaché aux valeurs démocratiques»; où la cohésion sociale et le dialogue interreligieux sont des «réalités», des «faits établis». Il a mentionné pour preuve la transition démocratique de 2014. Pour lui, «terrorisme et transition politique au Burkina sont deux phénomènes liés», car la situation politique actuelle de son pays est dominée par la difficile situation sécuritaire. Cet état des choses est transitoire, pour régler durablement une «situation sécuritaire et humanitaire» et pour cela «nous avons besoin de toutes les composantes de la nation», a-t-il souligné.

La reconquête du territoire, un objectif majeur du pouvoir de transition

Depuis qu’il a pris la tête du pays, le capitaine Ibrahim Traoré «a fait de la reconquête du territoire un objectif majeur», a déclaré M. Bakyono. Le terrorisme a gagné du terrain au Burkina Faso et continue à causer des morts et des déplacements massifs des populations. Tout en reconnaissant qu’il y a encore beaucoup à faire pour mettre hors d’état de nuire les terroristes, il a souligné qu’il y a quelques résultats positifs dans cette lutte. 

Attaquer le mal à la racine

La solution durable et à la fois urgente face à ce problème du terrorisme reste la restauration de l’intégrité du territoire nationale, a insisté le diplomate. Une telle résolution passe aussi bien par des moyens militaires que par des actions de développement, afin de favoriser le retour des déplacés et internes et de «lutter contre le problème à la racine». Il faut aussi améliorer la gouvernance, en luttant contre les inégalités, les injustices, la corruption, l’exclusion, le chômage des jeunes, en promouvant des valeurs de probité, de travail et de patriotisme, a-t-il déclaré. Dans ces projets, le Burkina Faso compte sur l’accompagnement de tous ses amis et de la communauté internationale, a-t-il ajouté. De cette dernière en particulier, son pays attend «la compassion et l’empathie, au lieu de l’indifférence, l’accompagnement plutôt que des jugements et des menaces des sanctions, la solidarité pour soulager les populations meurtries et l’aide pour retrouver son intégrité territoriale». M. Bakyono a déploré la carence d’actions concrètes de la part de la communauté internationale, qui, selon lui, tend plutôt à abandonner le gouvernement de son pays et à manifester «une indifférence qui frise la complicité».

Le Pape François, proche du peuple burkinabè

L’ambassadeur du Burkina Faso près le Saint-Siège a rappelé les nombreuses fois où le Pape François s’est montré proche du peuple burkinabè, appelant notamment à mettre fin au terrorisme dans ses adresses et priant pour cette nation ouest-africaine. Pour lui, la voix du pape aide à interpeller les partenaires afin de porter secours au Burkina Faso dans son combat contre ce fléau. Il a aussi reconnu que l’Eglise locale continue à apporter sa contribution à la résolution de la crise que traverse le pays. L’Eglise, a-t-il souligné, a toujours joué un rôle important dans les moments saillants de l’histoire de cette nation. M. Bakyono appelle ses compatriotes à rester uni dans cette lutte contre le terrorisme. Pour lui, le peuple burkinabè veut la paix, la sécurité et vivre en harmonie, afin de poursuivre les efforts de développement.

Au Sahel, un drame humanitaire oublié

Pour le diplomate burkinabè, la crise que vit la région du Sahel est multidimensionnelle, avec des conséquences tragiques sur les populations civiles. Outre des nombreuses pertes en vies humaines, certaines personnes sont mutilées, d’autres souffrent des violences psychologiques, dont des femmes, des enfants et des personnes âgées. Des économies sont déstructurées, le tissus social des pays de cette région est déchirée et l’instabilité devient chronique. Ce drame humanitaire requiert le déploiement de plus de moyens et de solidarité pour résoudre durablement cette crise.

M. Bakyono invite tous les croyants du monde à se joindre au peuple burkinabè le 20 mai, déclaré journée de jeune et de prière pour la paix et la cohésion sociale au Burkina Faso.

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15 mai 2023, 11:46