Réunis à Rome, les jeunes réclament une Eglise inclusive, relationnelle et transparente
Manuella Affejee- Cité du Vatican
Le document, dont une copie sera remise au Pape ce dimanche au terme de la messe des Rameaux, sera pris en compte pour l’élaboration de l’Instrumentum laboris. Il n’a pas été conçu comme un «traité théologique», mais bien comme une «boussole», un «instrument de navigation» à l’intention des pères synodaux qui se réuniront à Rome, en octobre prochain.
Inquiétudes et fragilités
Toute la première partie de la synthèse est consacrée aux défis et aux opportunités qui se présentent aux jeunes d’aujourd’hui. Et ils sont nombreux, complexes. Les jeunes ont conscience de l’importance que revêt l’identité, l’appartenance à un groupe, à une communauté qui les soutienne. D’où le rôle nécessaire de l’Eglise, de la famille, des éducateurs. Les jeunes réclament des modèles «attrayants, cohérents et authentiques», avouant que la sainteté leur parait «inaccessible».
Il ressort de ce document, -et donc, des discussions de cette réunion pré-synodale-, une certaine inquiétude des jeunes quant à leur avenir. Ils pointent les guerres et leurs inévitables corollaires, les violences, les questions de justice sociale, les problèmes familiaux de toute nature qui obscurcissent parfois l’horizon. Ils rêvent avant tout de sécurité, de stabilité, d’opportunités. Mais souvent, devant les difficultés, notamment celles liées au travail, certains ont arrêté de rêver.
La question du sens à donner sa vie reste incontournable. Nombreux sont ceux qui ne le trouvent dans aucune religion ou institution, et s’en défient même. Les scandales présents au sein de l’Eglise ont corrodé la confiance des jeunes croyants et non-croyants. Un certain nombre ne se définit pas comme «religieux», mais plutôt comme «spirituel».
L’Eglise et les jeunes
Les jeunes posent un regard lucide, parfois sans concession, sur l’Eglise, perçue plus comme une structure qu’une communauté de croyants, parfois déconnectée des réalités, «excessivement moraliste». Beaucoup de jeunes ont quitté l’Eglise, observe le document, pour s’être sentis rejetés, ou jugés par elle. D’autres au contraire, comme en Afrique, en Amérique latine et en Asie, la sentent proche, partie intégrante de leur vie.
Les jeunes insistent sur la mission qui incombe à cette Eglise parfois en perte de vitesse : qu’elle soit accueillante et miséricordieuse, authentique, crédible, transparente, relationnelle, joyeuse. Qu’elle n’ait pas peur de se montrer vulnérable, d'admettre ses erreurs et en tire des leçons. Les jeunes ont besoin d’une Eglise qui soit témoin vivante de ce qu’elle annonce. D’une Eglise qui ne considère pas les jeunes comme trop petits, ou inaptes à prendre des décisions. D’une Eglise enfin, qui prenne le soin de clarifier le rôle qu’elle entend donner aux femmes en son sein. Ce thème revient à plusieurs reprises dans le document, avec notamment la constatation d’un manque de figures féminines de référence.
Besoin de se former, d’être accompagné
La synthèse fait en outre émerger le besoin et l’envie qu’ont les jeunes de se former, de mieux connaitre le Christ, les Ecritures, la foi qu’ils professent, les enseignements de l’Eglise, surtout sur les questions les plus matière à débats, qui cristallisent les oppositions et les incompréhensions (questions relatives à l’affectivité, à la sexualité, etc.). Le message de l’Evangile est parfois difficile à entendre ; des sujets, pourtant essentiels, comme la vocation, sont présentés de manière trop conceptuelle, trop éthérée, désincarnée. Les jeunes en réclament une meilleure explication.
Dans cette optique, l’accompagnement revêt une importance fondamentale. Il est impératif que les jeunes trouvent sur leur chemin des personnes de confiance, laïcs et consacrés, qui les aident, les conseillent, les guident, en respectant leur liberté. Ces accompagnateurs, qui ne doivent pas être mis sur un piédestal, doivent bénéficier, eux aussi, d’une formation permanente.
Le rôle des technologies
Une attention certaine est accordée aux nouvelles technologies et moyens de communication. Les jeunes ne font preuve d’aucune naïveté sur la question, vantant, d’un côté, leurs nombreux avantages et points positifs, conscients, de l’autre, des errements et vices qu’ils peuvent engendrer et favoriser: l’isolement, l’ennui, l’insensibilité ou l’aveuglement face aux souffrances d’autrui, ou encore la pornographie. La prudence reste donc le mot d’ordre. Il en va de même au sujet des progrès en matière de bioéthique, où la dignité humaine doit demeurer le pivot de toute action.
Il n’en demeure pas moins que la technologie, au sens large, s’avère être un terrain hautement propice à l’évangélisation. Le monde digital offre de nombreuses possibilités et il appartient à l’Eglise de saisir cette opportunité, tout en renforçant toujours plus sa présence dans le «réel», à la rencontre des personnes, dans les rues, les bars, les stades, les orphelinats, les hôpitaux, les périphéries, prisons, zones de guerre, etc.
Les jeunes veulent prendre des responsabilités
Enfin, les jeunes réclament qu’on leur fasse confiance. C’est un cri qui traverse l’intégralité de ce document. Ils se sentent prêts à assumer un rôle de leadership, demandent d’ailleurs à y être formés; ils veulent être impliqués dans les organes décisionnels, dans les paroisses, les diocèses, les commissions vaticanes. Ils souhaitent être une présence responsable, joyeuse et créative, sans laquelle les communautés peuvent sembler «mortes».
Reconnaissants à l’Eglise de leur offrir cette opportunité d’expression et de liberté de parole, ils saluent une culture d’ouverture salutaire, soulignant que «ce dialogue entre les jeunes et les plus âgés dans l’Eglise est vital, et que cela va porter du fruit. Ce serait dommage que ce dialogue ne puisse pas continuer et grandir !»
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