Mgr Aupetit: «Les fidèles doivent nous aider dans la lutte contre le cléricalisme»
Entretien réalisé par Manuella Affejee - Cité du Vatican
La courte lettre, publiée vendredi 7 septembre, sera lue en chaire dans toutes les paroisses du diocèse français, à la demande de Mgr Aupetit, qui n’est pas le seul à s’adresser à ses fidèles. Mgr Luc Ravel, l’archevêque de Strasbourg, a également publié un long document pastoral où la douloureuse question des abus est affrontée sans ambages.
Ces prises de parole s’inscrivent directement dans la lignée de la lettre au peuple de Dieu écrite par le Pape François cet été, après les accablantes révélations autour d’abus sexuels au sein du clergé, notamment aux Etats-Unis, dans l’Etat de Pennsylvanie, où plus de 1 000 cas d’abus sexuels, de conscience ou d’autorité ont été recensés sur une période de 70 ans.
Les abus sexuels, reflets d'autres abus
Mgr Aupetit exhorte chaque fidèle, -laïc, diacre, prêtre, religieux et consacré-, à lire attentivement la lettre du Souverain Pontife, qui en appelle à la responsabilité de tout le peuple de Dieu qui forme l’Eglise. «Nous sommes parfaitement heureux lorsque quelqu’un comme Mère Teresa (…) montre le vrai visage de l’Eglise, mais quand nous sommes blessés, nous sommes en devoir de porter aussi cette blessure», affirme l’archevêque de Paris, pour qui chacun sans exception doit se sentir concerné par cette crise sans précédent.
«Les abus sexuels sont le reflet d’autres abus», analyse-t-il, le fruit d’un cléricalisme tenace et fortement enraciné, lequel a favorisé une confusion entre le pouvoir et l’autorité, et en quelque sorte, dévoyé le rôle du prêtre qui doit être un pasteur au service de son peuple, non un homme de pouvoir. Pour Mgr Aupetit, les fidèles ont peut-être trop attendu du prêtre, projetant sur lui «quelque chose qui n’appartient qu’à Dieu». Ce sont ces mêmes fidèles qui doivent aider leurs prêtres et évêques à lutter contre cette culture du cléricalisme, si éminemment contraire à l’Evangile, si incompatible avec ce que l’Eglise doit défendre et promouvoir.
Exemplarité et vérité
À rebours du réflexe de «protection de l’institution» qui a toujours prévalu, l’Eglise doit se libérer d’une autre culture, celle du secret dans son mode de fonctionnement. «Si nous avons honte, si nous avons quelque chose à cacher, ce n’est pas bon signe», observe encore l’archevêque français, qui ne parle pas là du secret de la confession, qui, lui, «protège les personnes », «c’est autre chose», prend-il soin de préciser. Dans le domaine des abus, il incombe à l’Eglise d’être exemplaire et de servir la vérité.
Dans sa lettre, Mgr Aupetit rappelle que son diocèse est pleinement engagé, cela depuis des années, dans la protection des mineurs et personnes vulnérables ; des structures d’accueil et d’écoute des victimes existent. Mais l’archevêque de Paris note que les cellules d’écoute, composées de professionnels, ne sont pas forcément privilégiées par les victimes pour un premier contact. Celles-ci veulent d’abord parler à une autorité ecclésiastique, «pour dire qu’elles ont souffert à cause de l’Eglise». «Il y a quelque chose de blessé non seulement dans leur psychologie, mais aussi dans la relation à Dieu». D’où la nécessité que les évêques et les vicaires généraux soient «en première ligne».
Aux fidèles bouleversés ou en colère, à ceux qui s’interrogent et qui doutent, Mgr Aupetit répond qu’il faut tout recentrer sur le Christ, unique sauveur. Le Christ, dit-il, n’a pas épousé une institution, mais l’Eglise, constituée de l’ensemble des croyants. S’il est humain de s’attacher aux personnes, le baptisé ne peut pas perdre de vue qu’il est là uniquement en raison du Christ.
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