«L'heure est grave», écrivent les évêques d'Haïti
Dans leur message de Noël adressé aux prêtres, religieux, religieuses, fidèles laïcs, hommes et femmes de bonne volonté, les évêques énumèrent les problèmes connus de tous qui frappent leur pays: une «faillite des institutions étatiques, l’escalade de la violence -lors des manifestations du 18 novembre, 11 personnes ont été tuées-, les gangs armés à la solde de puissants sponsors, la débâcle économique croissante engendrant un appauvrissement intolérable, la corruption généralisée, l’impunité arrogante, la méfiance, le non-respect de la sacralité de la vie et l’atteinte effrontée à la dignité de la personne humaine». Les évêques expriment leur «vive sympathie» aux «familles éplorées». Face aux mutilations constatées ces derniers temps, ils exigent que les auteurs de ces crimes horribles soient appréhendés et traduits en justice.
Dans l'île, l’inflation annuelle est supérieure à 15% depuis 2015, la colère populaire ne faiblit pas et s'est accentuée ces derniers mois en raison d'une forte dévaluation de la monnaie nationale. Le pouvoir d'achat des ménages se réduit d'autant plus que le pays importe l'immense majorité des produits qu'elle consomme. «La nation est en train de creuser le gouffre de son anéantissement» avertissent les évêques. Ils appellent à un dialogue nécessitant un «climat de confiance et de vérité, une attitude d’écoute, de franchise et de dépassement de soi à la recherche du bien supérieur de la nation».
Stopper la dégradation du pays
Ainsi, l'épiscopat demande une suite concrète au scandale PetroCaribe, le nom d'un programme vénézuélien accordant du pétrole à des tarifs préférentiels à plusieurs pays d'Amérique latine et des Caraïbes. Plusieurs proches du pouvoir et de l’ancien président Michel Martelly sont impliqués. Le président actuel, Jovenel Moïse avait promis de lutter contre la corruption, mais n’a encore pris aucune mesure. Aussi le dossier a soulevé une vague de protestation à l’automne dernier.
Aux dirigeants haïtiens, les évêques demandent de tout faire pour arrêter la dégradation inquiétante du pays. Il faut agir avant qu’il ne soit trop tard, déclarent les évêques, «l’heure est grave. Nous vous interpellons avec vigueur. Sachez encore que la légitimité n’est pas simplement un acquis, c’est surtout une conquête permanente». lls s’adressent aussi à la justice haïtienne «très décriée», en appelle à son impartialité, son indépendance, son intégrité et son courage.
S’adressant aux fils et filles d'Haïti, les évêques leur demandent d'aimer «sincèrement ce pays». Ils appellent à un apaisement général : «tout ce que nous venons de dire sera lettre morte et parole vaine tant que le venin de la méfiance altère et dénature nos relations», concluent-ils.
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