Les catholiques philippins se rassemblent à Manille autour du «Nazaréen noir»
Adélaïde Patrignani – Cité du Vatican
La statue du Nazaréen noir a encore attiré les foules cette année: plus de cinq millions de fidèles philippins étaient présents pour cette procession massive, au cours de laquelle la ferveur se manifeste sans réserve. Chacun veut approcher le char sans roues tiré par une corde, sur lequel est placée la statue miraculeuse. Il n’est donc pas rare de voir les fidèles se livrer à de périlleuses escalades pour parvenir à toucher ou effleurer le Nazaréen noir. Le parcours, long de six kilomètres, est hautement sécurisé: 7000 policiers déployés et des dizaines de postes de secours prêts à accueillir les victimes de malaises ou de blessures. Aucun incident grave n’a été déploré cette année.
Quatre siècles d’histoire
L’histoire de cette tradition religieuse remonte au 17e siècle. En 1607, la statue parvient aux Philippines depuis le Mexique, en même temps que les premiers missionnaires augustins. À son arrivée, elle est déjà considérée comme miraculeuse, étant sortie intacte de l’incendie du 31 mai 1606 qui s’était déclaré à bord du bateau des missionnaires. C’est au cours du sinistre que le bois de la statue, clair à l’origine, prend sa teinte sombre… d’où ce nom de «Nazaréen noir». Déplacée d’une église à l’autre de Manille, la statue connait une ultime translation le 9 janvier 1787, sur l’ordre de Mgr Basilio Sancho de Santas Justa. Elle est alors placée en l’église de Quiapo, actuellement Basilique du Nazaréen noir. Là aussi, la statue survit à bien des péripéties: incendies de l'église en 1791 et en 1929, grands séismes de 1645 et de 1863, bombardement de Manille en février 1945.
La dévotion envers le Nazaréen noir n’a jamais faibli au cours des quatre derniers siècles. Elle est favorisée par le Saint-Siège en 1650, lorsque le Pape Innocent X institue canoniquement la Confrérie de Jésus Nazaréen. Pie VII, au 19° siècle, accorde quant à lui l’indulgence plénière «à qui prie de manière pieuse» le Nazaréen noir. Outre le 9 janvier, la statue est exposée à la vénération des fidèles le jour du Nouvel an et chaque Vendredi saint.
L’amour, signe de reconnaissance du fidèle
Au cours de la messe de minuit célébrée ce mercredi, l’archevêque de Manille, le cardinal Luis Antonio Tagle, a rappelé aux fidèles que «l’essence de la dévotion est l’amour». Il a amené la foule a bien distinguer la dévotion du fanatisme. «Le fanatique, a-t-il expliqué, dès qu’il n’obtient pas ce qu’il veut, va s’arrêter». Au contraire, «un véritable fidèle aime». «Un amour débordant montre la loyauté et le sens du service envers les autres», a précisé le cardinal Tagle. «Et l’unité avec Dieu et avec ceux que l’on aime n’est pas une imitation mais une union», a-t-il continué.
L’archevêque de Manille a aussi pris la défense des croyants accusés de fanatisme. «Il semble que chaque année on conteste le fait que ce soit juste et important- être un fidèle». «Mais seuls les fidèles comprendront cela. Si l’on n’est pas un fidèle on ne va pas remettre cela en question», a conclu le prélat philippin.
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