Accepter l’amour de Dieu
Jože Potrpin – Ljubljana
Voici l'histoire de Tone Planinšek, que nous vous proposons à l’occasion de la Journée Mondiale du Malade. Pour ce slovène, «la souffrance peut être à la fois une bénédiction et une malédiction». Cela dépend de la façon dont elle est acceptée. Dans les épreuves qui accompagnent toute vie humaine, la souffrance aide à la croissance spirituelle et la vie s’en retrouve spirituellement enrichie. Mais elle peut aussi être une nuisance quand on la considère comme un châtiment divin. La souffrance est un don de Dieu. Cependant, l’être humain en a peur. C'est peut-être aussi parce que c’est un don inestimable que nous en avons si peur. «Pour nous, cette souffrance est significative», dit Tone, «car nous connaissons le chemin sur lequel Marie nous aide à marcher, derrière Jésus, et à ne pas faire d'erreurs. À Lourdes, elle choisit une bergère simple, pauvre et toujours malade, Bernadette, qui a aussi beaucoup souffert à cause des interrogatoires et des humiliations».
Un esprit sain dans un corps de handicapé physique
Un esprit sain peut-il exister dans un corps malade et physiquement handicapé? Lorsque l’on pose la question à Tone, il raconte être né «en bonne santé, premier de sept enfants d'une famille de paysans». Il n’avait pas encore un an quand on a remarqué que son dos commençait à se courber à cause du rachitisme. Ainsi, jusqu'au début de l'école primaire, qui à cette époque en Slovénie, commençait à l'âge de 7 ans et durait 8 ans, il a effectué le tour des hôpitaux. «Après la primaire, je suis entré dans une école professionnelle à l'Institut de formation des jeunes handicapés, où j'ai étudié pour devenir tailleur». Au terme de sa formation, Tone a rencontré des difficultés pour trouver du travail : «Au début, j’ai eu des problèmes à cause de ma taille, je mesure 1m 30. Plus tard, j'ai travaillé sur des machines spéciales et manipulé différents outils. J’ai même été désigné innovateur de l'année. Mais au bout de vingt ans d’activité, j'ai dû anticiper mon départ en retraite en raison de fréquents problèmes de santé». Il n’est cependant pas resté inactif: «Je me suis engagé au sein de la Fraternité chrétienne intercontinentale des malades chroniques et des handicapés physiques (Frater). Je me suis aussi intéressé au journalisme. Pendant de nombreuses années, j'ai été membre du conseil pastoral de la paroisse et plusieurs fois animateur avec des enfants qui préparaient leur Confirmation».
Le petit soleil ou le rayon
Tone a été littéralement poussé par sa foi. «Une foi traditionnelle » dit-il, qui «petit à petit s’est mise à grandir, grâce notamment à quelques-unes de mes lectures spirituelles. J'ai suivi le catéchisme pour les jeunes, et au cours de mon apprentissage professionnel à l'Institut de formation, j'ai fait l'expérience du sens de la foi dans la vie. À cause d'un livre qui est arrivé par courrier à l'adresse de l'Institut, envoyé par la maison d’édition Družina, j'ai failli être expulsé de l'école pour avoir été cité dans une invitation». À cette époque, le régime communiste contrôlait les fidèles: «nous ne pouvions pas aller à la messe, sinon en secret. J'aurais pu renoncer à la foi, mais je l'ai embrassée plus fortement encore. Je commençais aussi à me demander pourquoi je souffrais». Pourquoi les gens souffrent-ils ? À travers la méditation et la lecture d’ouvrages spirituels, Tone prend conscience que c'est là sa mission. Jésus aussi a souffert. Par la souffrance, il a racheté le monde. C'est pourquoi il finit par penser que la souffrance est la plus haute façon d'aimer. «Sinon, Dieu aurait choisi une autre voie», dit-il. Maintenant que d’autres douleurs et problèmes se sont ajoutés au handicap, il offre tout à Jésus pour quelques intentions concrètes. «La souffrance en elle-même nous pousse déjà vers le ciel. Mais cela ne durera pas sans notre collaboration», lui a écrit un prêtre il y a quelques années; un homme qui a également beaucoup souffert, et qui lui a fait comprendre qu’il avait reçu l'amour de Dieu dans son cœur. On dit de lui parfois qu’il est un soleil, ou un rayon de soleil.
Le handicap peut aussi être un privilège
Ce que Tone supporte mal, c’est la maladresse, souvent, des personnes saines qui veulent faire à la place de la personne handicapée, ou malade, ce que cette dernière sait faire ou doit faire par elle-même. Un comportement qui se vérifie la plupart du temps dans leur propre famille. «Moi, par contre, précise-t-il, je n'ai jamais entendu à la maison: “Tu ne peux pas le faire de toute façon. Tu n'as pas à le faire, ou nous le ferons pour toi”. Mais il est également vrai que nous, les enfants, nous nous sommes entraidés. Chacun a le devoir de faire ce qu'il peut et de ne demander de l'aide que pour ce qui lui est impossible». Un handicapé n'est pas une personne moins capable ou une personne ayant des besoins particuliers. Tone préfère que l’on parle d’une personne ayant une mission spéciale: «Je pense à la mission que Dieu nous a donnée, et qu'il a donnée à chacun. Le handicap peut être un privilège si nous l'acceptons comme un don de Dieu, pour nous aider à trouver la voie de la sainteté. Pour beaucoup, le handicap est un petit soleil, lorsqu’il n’est pas perçu comme un fardeau. Des handicapés qui se considère comme des personnes ayant leurs propres talents, des petits soleils, j'en connais beaucoup».
Une mission spéciale
Parfois, il suffit d'encourager une personne à donner le meilleur d'elle-même. Les personnes handicapées et malades ne sont pas seulement des personnes qui reçoivent de l'aide et de la compassion, mais elles peuvent aussi donner, et être utile pour quelqu’un d’autre: une finalité qui rend Tone heureux. «Dans mon cas, dit-il, il faut que je vous raconte ce qu’il s’est passé en 1975, lors de la rencontre des malades et des handicapés au sanctuaire marial de Brezje. C’est là que j'ai pris contact avec la Fraternité chrétienne intercontinentale des malades chroniques et des handicapés physiques et que j'ai trouvé ma propre voie. À partir de cette rencontre, j'ai découvert le magazine Prijatelj (Ami). J'ai participé à de nombreuses réunions, des pèlerinages, des exercices spirituels, de nombreux week-ends de prière, des vacances, des célébrations du Nouvel An, des visites. J'ai parfois accepté d'organiser des expositions d'artisanat, accompagné des concerts ou de tables rondes sur différents sujets avec plusieurs invités. Plus d’une fois, j'ai représenté la Slovénie à des congrès européens ou internationaux de Frater. J'ai livré des témoignages lors de messes dans différentes paroisses ou dans différents groupes». En 2009, Tone a été élu à la tête de la Fraternité chrétienne des malades chroniques et des handicapés physiques en Slovénie et il occupe toujours ces fonctions aujourd'hui.
La photographie en dit plus que mille mots
Puisqu’il était question de talents, quelques lignes plus haut, venons-en au talent de Tone. Il est persuadé que chacun en possède plus encore qu’il ne peut le croire et que l’important c’est de découvrir son talent et de le cultiver. Tone, lui, a découvert la photographie: «C’est ma plus grande joie, pratiquement depuis l'école primaire», raconte-t-il. «J'ai joint l’utile à l’agréable et j'ai photographié la vie de la Fraternité chrétienne des malades chroniques et des handicapés physiques. J'ai publié mes photos dans le magazine Prijatelj (Ami), dans l'hebdomadaire Družina (Famille), dans le mensuel Ognjišče (Foyer) et également dans d'autres médias. J'ai pris deux photos très belles et également très expressives lorsque l'archevêque Alojzij Šuštar est resté seul dans le presbytère sur son fauteuil roulant, tandis que les autres photographes avaient quitté la cérémonie pour suivre les politiciens. J'ai également été le photographe officiel du magazine Prijatelj (Ami) lors des deux voyages apostoliques du saint Pape Jean-Paul II en Slovénie. Maintenant, à cause de ma maladie, mon matériel photographique est devenu trop lourd et je ne peux plus participer plus aux grands événements».
La devise de Frater: «Lève-toi et marche»
La photo n’est pas la seule passion de Tone. Il a fait sienne cette phrase que Jésus a prononcée en direction d’un infirme il y a deux mille ans. Des mots qui ont encore une force intacte pour les personnes handicapées. «J'ai dit à maintes reprises que parmi les bonnes choses que nous pouvons faire, nous, les personnes handicapées, il y a notre présence dans les médias, afin qu'ils ne nous représentent plus comme de pauvres créatures». Intéressé par le journalisme. Tone a commencé par couvrir différents événements, en particulier ceux auxquels participaient aussi des personnes handicapées et des malades. Aujourd’hui, il anime une émission sur les ondes de Radio Ognjišče. Depuis 25 ans, il est la voix de ‘Get up and walk’. «J'ai probablement autant d'auditeurs que dans une grande paroisse» dit-il en souriant.
Une émission qui encourage
Son émission s'adresse aux personnes avec lesquelles il se retrouve. Qui mieux qu’un handicapé peut aider ses semblables, qui peut s'identifier à eux, qui partage des expériences similaires? C’est dans ces questions que l’émission de Tone trouve son sens. «Je prépare ce programme avec mon cœur, explique-t-il, et non avec des connaissances de l'intérieur. L’émission n'est pas destinée à consoler, mais avec son contenu, elle cherche avant tout à encourager les malades, les handicapés et tous ceux qui souffrent à se tourner vers l'avenir et à se demander à quoi peut servir la maladie ou le handicap».
En conclusion
Tone tire la conclusion de son histoire. Il est convaincu que les malades et les handicapés ne doivent pas seulement être dépendants d'une aide extérieure. Au contraire, ils doivent montrer qu’ils sont membres actifs et à part entière d’une communauté, protagonistes d'un pèlerinage de foi et d'espérance, témoins des miracles de l'amour et de la joie de Pâques.
Merci d'avoir lu cet article. Si vous souhaitez rester informé, inscrivez-vous à la lettre d’information en cliquant ici