Caritas appelle à lever les sanctions qui appauvrissent la Syrie
Entretien réalisé par Hélène Destombes - Cité du Vatican
Caritas Internationalis, à l’occasion du lancement de son rapport annuel 2019, a souhaité faire entendre «la voix des sans-voix», dans un contexte mondial marqué par la pandémie de coronavirus. Lors d’une conférence de presse en ligne, jeudi 16 juillet 2020, Aloysius John a dénoncé le drame vécu par la population syrienne de plus en plus pauvre. Elle «meurt à petit feu» s’est-il alarmé dans un entretien à Vatican News. Les sanctions économiques, a observé le secrétaire général de Caritas Internationalis, créent «un terrain fertile pour le terrorisme» et pénalisent également lourdement le Liban voisin.
Aloysius John a par ailleurs déploré que «les populations les plus pauvres paient avec leur sang la dette internationale». Il a ainsi réclamé son annulation afin de pouvoir investir au plan local dans le développement des personnes vulnérables. Une invitation à combattre la pauvreté, «cette maladie qui déshumanise», et à construire un monde plus solidaire et respectueux de chacun.
Les conséquences des sanctions économiques sur la Syrie sont multiples. L’aide humanitaire est de plus en plus difficile à envoyer et l’Église est aujourd’hui la seule à œuvrer sur l’ensemble du territoire. La population n’a plus les moyens d’acheter de la nourriture, elle s’achemine vers une situation de pauvreté chronique. Ces sanctions sont en train d’opprimer les plus pauvres. On est en train de tuer la population à petit feu et de créer un terrain fertile pour le terrorisme.
Dans votre rapport, vous alertez aussi sur la profonde crise qui ébranle actuellement le Liban. Les sanctions économiques ont de lourdes conséquences sur le pays du Cèdre ?
Tout le monde sait qu’il y a des relations commerciales et économiques entre la Syrie et le Liban. L’économie au Liban s’épuise progressivement. Ces six derniers mois, la population ayant besoin d’assistance a augmenté de 75%. Les habitants vendent leurs chaussures et leurs vêtements pour pouvoir acheter de la nourriture. On est en train, là aussi, d’affamer la population. La livre libanaise a perdu 80 % de sa valeur témoignant de la dérive économique dans laquelle se trouve le pays. Les sanctions économiques sur la Syrie ont donc des conséquences sur le Liban mais aussi sur l’Irak.
Vous sensibilisez également à la question de la dette des pays pauvres, réclamant son annulation. C’est un appel qui a déjà été formulé à plusieurs reprises, en particulier par le Pape François. Caritas a fait de cette annulation de la dette une priorité ?
Les populations les plus pauvres paient avec leur sang la dette internationale. Il faut annuler cette dette pour que l’argent puisse être utilisé au plan local afin de promouvoir des actions de développement en faveur des plus vulnérables. Il faut bien-sûr préparer la population locale, il est important que la société civile joue son rôle pour devenir acteur de développement.
La présentation de ce rapport annuel intervenait dans un contexte historique de pandémie de Covid-19. Cette crise va-t-elle permettre de construire un monde plus solidaire ?
Si je me réfère aux propos du Saint-Père, cette crise induit un nouveau départ. Il faut que la solidarité soit plus globale. Nous avons besoin de tous et les pauvres ont leur place. Il s’agit de leur permettre de devenir des acteurs de développement afin que nous puissions agir contre la pauvreté, cette maladie qui rend l’homme indigne et déshumanise. Ce nouveau départ doit nous amener à être plus solidaires, plus respectueux et conscients de la dignité de chacun, en particulier des pauvres. Il faut agir pour cela.
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