L'appel de l'Église philippine contre la peine de mort
(VNS) «La peine de mort viole la dignité intrinsèque de toute personne qui n'est pas perdue malgré le fait qu'elle ait commis un crime»: voici ce qu'on peut lire dans une déclaration de la Commission pour la pastorale de l'Église catholique des Philippines (Ecppc). Dans ce texte, elle réitère sa forte opposition à la proposition politique de rétablir la peine capitale dans le pays. «En chaque être humain -peut-on lire dans le texte - il y a le souffle de vie, le don incomparable et précieux de Dieu lui-même" qui doit être préservé. En outre, les prélats rappellent qu'"il n'y a pas de preuve directe que la peine de mort décourage la criminalité et est dissuasive", de sorte que l'affirmation générale selon laquelle elle diminue le volume des crimes est «purement spéculative».
«La peine de mort est irrévocable - soulignent encore les prélats - une fois exécutée, il n'y a aucune possibilité de corriger un jugement erroné» Cette procédure fait de la justice "une simple punition", alors qu'en réalité, elle "est réparatrice, jamais simplement punitive, car elle offre à la personne une chance, même petite, de changer". La préoccupation de l'Ecppc va en particulier aux "secteurs les plus vulnérables de la société, les pauvres, les marginaux", car "l'expérience montre que la majorité des condamnés à mort" appartiennent à ces catégories sociales qui "n'ont pas les moyens de s'offrir les services d'avocats éminents pour se défendre". Et ce n'est pas tout : les Philippines se sont engagées, par le passé, "devant la communauté internationale à ne pas réintroduire la peine de mort à l'avenir". Si cela se produit, le pays sera donc "sous un mauvais jour" sur le plan international.
Il y a d'autres priorités
Au lieu de réintroduire la peine de mort, les évêques proposent donc au Congrès de "développer un programme mondial pour combattre les effets de la pandémie de Covid-19 et soulager la situation des pauvres, ceux qui sont les plus touchés par les conséquences du coronavirus". Dans le même temps, ils ont appelé à "l'application effective des lois existantes, y compris les nouvelles lois, pour moderniser le système judiciaire et pénitentiaire, de sorte qu'elles soient réparatrices et réadaptatives plutôt que punitives". Ainsi, une fois la peine purgée, les anciens détenus "seront prêts à réintégrer la société".
Un autre appel est lancé pour mettre fin à "la corruption au sein des différentes institutions qui gèrent les prisons, afin que les droits fondamentaux des prisonniers soient respectés". "Avec l'aide du Dieu miséricordieux - conclut la déclaration - nous, évêques philippins, sommes prêts à dialoguer avec les législateurs pour analyser ensemble les voies et moyens appropriés afin d'améliorer le système pénal et les conditions des personnes privées de liberté".
Aux Philippines, la peine de mort a été abolie en 1987, réintroduite en 1993 puis abolie à nouveau en 2006. En 2016, avec l'élection du président Rodrigo Duterte, la question est revenue sur le devant de la scène en raison des prétendues "exécutions extrajudiciaires" liées au trafic de drogue et préconisées par le chef de l'État, contre lesquelles l'Église catholique nationale s'est opposée à plusieurs reprises.
Fin juillet, dans son "discours à la nation", Rodrigo Duterte a insisté de nouveau sur la nécessité d'appliquer la peine de mort pour les trafiquants de drogue. Le 5 août, la Commission de la justice de la Chambre des représentants a entamé le débat sur ce sujet, suscitant la réaction immédiate des évêques. L'archidiocèse de Manille en particulier, s'est dit "alarmé" par la facilité avec laquelle les législateurs ont répondu à l'appel du chef de l'Etat, et a condamné "l'imprudence" de présenter des projets de loi sur la peine de mort "alors que la crise provoquée par Covid-19 est encore grave".
Vatican News Service - IP
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