Le père Khairallah : «le Liban a besoin d’un renouveau spirituel»
Manuella Affejee- Cité du Vatican
«J’avais les larmes aux yeux» confie le prêtre jésuite, figure bien connue de Beyrouth, qui se dit profondément touché par les paroles du Pape et plus encore par cette initiative qui se tiendra ce 4 septembre, soit un mois après la double explosion dans le port de Beyrouth.
La capitale libanaise en garde de cruels stigmates ; plusieurs de ses quartiers sont complètement dévastés, douloureuse allégorie d’un pays en plein naufrage politique et économique. «Dire qu’on va bien aujourd’hui serait mensonger. Pour toutes les personnes de ma génération, ceux qui ont la cinquantaine, ce sont tous les traumatismes de la guerre qui remontent» reconnait le père Khairallah, dont la paroisse saint Joseph est située dans le quartier de la Quarantaine (ou Karantina), durement touché par l’explosion.
Le traumatisme des Beyrouthins
Très actif sur le terrain social, engagé personnellement dans le mouvement de contestation de l’automne dernier, le jésuite mène aujourd’hui un apostolat d’écoute auprès des habitants de son quartier, avec d’autres prêtres et religieuses. «Les récits sont très lourds. Certains ont perdu les leurs, d’autres sont blessés. Des vies entières ont basculé», témoigne-t-il. Au milieu de la détresse des Beyrouthins, le jésuite veut être une «présence fraternelle, priante et solidaire».
Dès le lendemain de la catastrophe – qui a causé la mort de 190 personnes, sans parler des milliers de blessés recensés-, les Libanais résidant dans la capitale se sont attelés au déblayage des rues, organisés en des réseaux d’aide et de solidarité. Les jésuites eux-mêmes financent les repas de volontaires qui s’occupent de reconstruire les maisons détruites, fournissent des médicaments, tout en restant présents sur leur terrain de prédilection : l’éducation.
La tentation toujours plus forte de l’émigration
Mais la résilience quasi proverbiale des Libanais semble s’être émoussée au gré des tribulations et la double explosion du 4 août a été le drame de trop. De plus en plus de jeunes, mais pas seulement, se tournent en désespoir de cause vers d’autres horizons, lassés de décennies de gabegie politique, de corruption et de dysfonctionnements structurels. L’émigration, qui est loin d’être un phénomène nouveau, apparait comme la voie de sortie la plus honorable, la seule à même d’offrir des perspectives d’avenir décentes.
Pour le père Khairallah, l’appel à jeûner du Pape tombe à point pour son pays blessé. «J’ose espérer que tout le monde adhérera à cette initiative» ; le moment est décisif, et le jésuite en est persuadé : le Liban a besoin d’un «renouveau spirituel, moral et éthique». «On ne pourra combattre la corruption que par ce renouveau spirituel», conclut-il.
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