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Des soldats de la Minusca à Bangui le 13 janvier. Des soldats de la Minusca à Bangui le 13 janvier.  

Centrafrique: les évêques appellent à un sursaut patriotique

Dans un message diffusé le 17 janvier, la conférence épiscopale centrafricaine revient sur la crise politique et sécuritaire qui secoue le pays, dénonçant avec vigueur la corruption et l'impunité et listant des solutions pour l'avenir. «La crise n'est pas une fatalité», affirment les évêques.

Marine Henriot et Olivier Bonnel - Cité du Vatican

Presqu'un mois après l'élection présidentielle et alors que le pays est menacé par les violences d’une coalition de groupes armés qui rejettent la réélection du président sortant Faustin Archange Touadéra, les évêques centrafricains ont décidé de monter au créneau. Réunis à la cathédrale Notre-Dame de l'Immaculée Conception de Bangui pour la messe de clôture de leur assemblée plénière, ils ont publié hier un long message «à l'Église, famille de Dieu et aux hommes et femmes de bonne volonté» en reprenant la phrase de Jésus dans Saint Luc: «Lève-toi et marche».

Lu par a été lu par l’abbé Cédric Kongbo Gbassinga, secrétaire de la Conférence épiscopale centrafricaine, ce message «se veut tout à la fois l’écho de ses cris de souffrances et une voix de réconfort et d’espérance» précise d'emblée la conférence épiscopale. Les évêques dressent d'abord un sombre panorama du pays et pointent «l'exaspération du peuple». Les prélats constatent en effet avec amertume la montée de l'insécurité dans le pays, les déplacements de population, la paralysie de l'économie. Ils s'inquiètent aussi de la dégradation de la situation alimentaire dans un pays qui a déjà connu les crises à de multiples reprises. 


«Manque de patriotisme»

Les évêques centrafricains regrettent aussi les divisons de la classe politique et «le manque de patriotisme», qui ont laissé le pays «à la merci des prédateurs et des mercenaires de tous bords». «La guerre qui nous est aujourd’hui imposée vise à anéantir les aspirations profondes du peuple centrafricain» dénoncent-ils. Le peuple centrafricain est aujourd'hui fatigué et déçu face aux divisions interminables des politiques et à leurs calculs, rappelent encore les prélats. «Nous souffrons avec notre peuple qui vit toujours dans les inquiétudes et l’incertitude d’un lendemain qui paralyse».

Les liens du péché qui plombent le pays

C'est justement l'image du paralytique porté devant Jésus que l'Église centrafricaine utilise comme métaphore du pays. Selon les évêques, plusieurs péchés rongent leur pays, comme la convoitise, la colère, l’envie, les mensonges, la manipulation les violences et les meutres... autant de péchés qui «nous empêchent de promouvoir les grandes valeurs de fraternité, de justice et de paix». Mais dans l'Évangile, le paralytique ne souhaite pas rester dans cet état, poursuivent les évêques. Face à lui, les paroles de Jésus «déclenchent une libération, une résurrection, une reconstruction humaine et une nouvelle vie».

Pour ce retour à la paix nécessaire dans le pays, les prélats centrafricains estiment qu'il il est plus que jamais temps de faire usage du génie centrafricain pour profiter des riches ressources naturelles dont jouit le pays. Économiquement et diplomatiquement, la Centrafrique doit se libérer des ses chaînes et choisir librement ses partenaires, soulignent-ils. La diplomatie doit être forte et cela passe par un assèchement des réseaux parallèles et mafieux de certains pays.


Les solutions pour l'avenir

«La crise actuelle n’est pas une fatalité» rappelle la conférence épiscopale. «La République Centrafricaine est un pays donné et béni par le Dieu qui a créé le ciel et la terre». Lors de son voyage apostolique dans le pays en novembre 2015, notent les évêques, le Pape François avait souligné l'importance de revenir à la devise nationale du pays: «Unité-Dignité-Travail», une devise qui est «un principe fondateur et humaniste» qui doit être «une étoile susceptible de guider nos autorités». 

Les évêques rappellent aussi l'importance de la justice qui doit être équitable pour tous, dans un pays où l’impunité est hélas encore la norme. La toute nouvelle Cour Pénale spéciale doit se hisser à la hauteur de sa mission, expliquent-ils.

«La solution à la crise centrafricaine actuelle ne peut être en dernier lieu qu’endogène» relèvent enfin les évêques centrafricains, qui appellent à un véritable sursaut patriotique. «Des alliances contre nature entre les ennemis d’hier au prix du sang des innocents ont semé le chaos et la désolation», dénoncent-ils. «Oui, il faut le reconnaître, nous sommes les premiers fossoyeurs de notre propre pays».

«La reconstruction est un travail de longue haleine qui nécessite la détermination, la patience et la participation de tous les filles et fils de notre pays, concluent les évêques en voulant regarder l'avenir avec confiance. Debout ! Changeons notre mentalité, notre esprit et notre cœur pour avancer».

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18 janvier 2021, 09:52