En France, le corps d’une femme coûte moins cher que les armes
Marine Henriot - Cité du Vatican
Anne est française, elle a 16 ans, elle vit à Paris. Un soir, «son soit-disant petit ami» va la chercher à la sortie de l’école, il fait semblant d’aller rencontrer des amis à lui, tous les trois se rendent dans un van garé dans le fond d’une allée, où ils se servent à boire. Les trois personnes boivent, mais dans le verre d’Anne, une substance a été glissée à son insue. Après cela, plusieurs hommes ont abusé d’elle.
Ce drame, raconté par soeur Marie-Hélène Halligon, religieuse de Notre-Dame de Charité du Bon Pasteur (ndcbp), militante depuis plus de vingt ans contre la traite des personnes au sein du réseau international Talitha Kum et du Collectif contre la Traite de la Caritas, est le visage de la traite en France. On appelle cela le phénomène du «lover boy»: des hommes tissent une emprise sentimentale sur une femme pour vendre ou utiliser son corps. «La marchandise humaine est la matière qui coûte le moins cher, moins cher que de la drogue, moins cher que les armes», nous détaille soeur Halligon. «Acheter une femme, cela ne coûte pas grand chose, on peut la revendre plusieurs fois».
En France, la loi du déni
La traite est donc une réalité bien présente dans l’Hexagone, mais «nous ne sommes pas préparés dans notre tête et dans notre cœur à un tel phénomène», et chacun pourrait penser que cela a été éradiqué dans notre société moderne. Soeur Marie-Hélène Halligon parle même d’une certaine forme de déni en France, un pays où le parcours juridique dure parfois des années, avant que l’exploitation ne soit reconnue comme telle, les personnes coupables condamnées, et les victimes indemnisées selon le droit relatif à la traite des personnes. Pour mettre fin à ce fléau, il s’agit déjà d’ouvrir nos propres yeux, invite soeur Halligon, précisant que les cas d’esclavage et de traite sont plus nombreux dans notre monde contemporain qu’à l’époque du commerce triangulaire.
Selon les chiffres de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) en 2016 , 40,3 millions de personnes étaient victimes de l’esclavage moderne, dont 24,9 du travail forcé et 15,4 millions du mariage forcé. Cela signifie qu’il y a 5,4 victimes d’esclavage moderne sur mille personnes dans le monde. Une victime sur quatre d’esclavage moderne est un enfant. Les plus touchées sont les femmes et les filles: elles représentent 99% des victimes dans l’industrie du sexe, et près de 60% dans les autres secteurs.
Marathon de prière
Cette année, pour la 7ème Journée mondiale de prière et de réflexion contre la traite, un marathon de prière est organisé. La prière en ligne peut se faire dans le monde entier, l’initiative sera à retrouver en direct en streaming sur internet et sera traduite en cinq langues.
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