Hommage au père Shih, voix historique de Radio Vatican en chinois
Né en 1926 à Ningbo, en Chine, Joseph Shih était entré au noviciat des jésuites dans la province de Shanghai dès 1944, à l’âge de 18 ans. C’est aux Philippines qu’il fut ordonné prêtre en 1957, avant de rejoindre Rome, où il a enseigné à la Grégorienne durant 35 ans et a travaillé pour la section chinoise de Radio Vatican durant 30 ans. Il a également collaboré avec le Saint-Siège pour de nombreuses questions concernant son pays natal.
Resté très actif jusqu’à plus de 90 ans, il effectuait de nombreux allers-retours entre Rome et la Chine, mais depuis 2019, il n’était plus retourné dans son pays natal en raison des restrictions de voyage liées à la pandémie de Covid-19.
Traduction de l’homélie prononcée par le père Federico Lombardi lors de ses obsèques
«Et bien, bon et fidèle serviteur, partage la joie de ton maître!» Nous nous tenons humblement devant Dieu en priant pour notre cher frère le père Joseph Shih et demandons sa miséricorde, sa grâce et son salut. Nous le faisons avec confiance et sérénité, et il nous semble entendre en arrière-plan la voix du bon Père qui l'accueille au terme de son long voyage, comme un serviteur fidèle, qui a bien administré ses talents et qui maintenant, ayant accompli sa mission, est invité à partager la joie de son maître.
Je crois que le père Shih avait prévu de mourir en Chine, où il avait passé la plupart de ses dernières années, mais depuis son dernier retour à Rome, fin 2019, il avait été retenu par le Covid, qui a changé tant de nos plans et finalement les siens. Nous sommes donc ici pour l'accompagner devant Dieu, mais nous sentons que ses proches et tant de chrétiens, prêtres et religieuses de Shanghai, parmi lesquels il se sentait accueilli et aimé pas moins qu'ici parmi nous, sont présents.
95 ans de vie, 77 dans la Compagnie de Jésus. Le père Shih était un fils de la solide foi chrétienne enracinée dans l'Église chinoise, même si elle était minoritaire. Une Église qui, au cours du siècle dernier - celui de la vie du père Shih - a traversé de nombreuses épreuves, mais qui continue à regarder vers l'avant avec confiance, restant toujours dans le cœur et l'esprit du Pape, de l'Église universelle et de la Compagnie de Jésus depuis l'époque de François Xavier et de Matteo Ricci.
Nous savons que le père Shih a longtemps enseigné la catéchèse missionnaire, la religion et la philosophie chinoises à la Grégorienne, mais qu'il est ensuite venu à la Writers' House (aujourd'hui saint Pierre Canisius) pour diriger le programme chinois de Radio Vatican, où il a travaillé pendant trente ans, de fin 1978 à 2008. Pour beaucoup d'entre nous, il a été, pendant de nombreuses années, la présence quotidienne de la Chine parmi nous, par sa sagesse et sa courtoisie, par son sourire discret mais sincère, par sa discrétion et par son travail quotidien.
Je me souviens qu'il venait fidèlement chaque jour au Palazzo Pio, qu'il passait la majeure partie de la journée dans les bureaux de la section chinoise où, comme le savent bien nos anciens collègues, on ne disait pas grand-chose, on ne perdait pas de temps et on travaillait beaucoup à traduire, à éditer, à se préparer à prendre le micro. Je ne pense pas que beaucoup de gens se rendent compte de ce que signifiait la préparation quotidienne de textes pour une émission de quarante-deux minutes en chinois, textes qui étaient tous traduits ou écrits sur la base de sources dans d'autres langues très différentes. Chaque jour, pendant des décennies, sans sauter un seul jour.
Je pense que rendre hommage aujourd'hui au père Shih et à son travail pour l'Église en Chine, c'est en même temps rendre un hommage spirituel à ses fidèles serviteurs, sans lesquels il n'aurait pu mener son service. Serviteur fidèle, travaillant avec des serviteurs fidèles.
Dans sa discrétion, le père Shih était très conscient de l'évolution de la communication, et dans sa vieillesse, il passait beaucoup de temps devant l'ordinateur. Il a été l'un des premiers parmi nous à insister sur l'importance de rendre les textes écrits disponibles sur le site web, et en quelques années, le site de Radio Vatican a accumulé des milliers et des milliers de pages en chinois, non seulement pour l'information, mais aussi pour la formation religieuse, le service pastoral des prêtres, etc.
Il y a quelques semaines, nous avons dit au revoir au Père Vanhoye. Je me souviens avec quelle fierté le père Shih parlait de la traduction chinoise des ouvrages biblico-pastoraux du père Vanhoye, ou de la doctrine sociale du père Carrier, et ainsi de suite, mise à la disposition de tous par l'internet. Toujours au service de la foi et de l'Église.
Comme le disait saint Paul: «Comment peuvent-ils croire sans en avoir entendu parler? Et comment l'entendront-ils sans quelqu'un qui le proclame? [...] Or, je le dis, leur voix s'est répandue dans toute la terre, et leurs paroles jusqu'aux extrémités de la terre». Les circonstances de l'histoire ont conduit le père Shih à passer la majeure partie de sa vie en Europe et plus particulièrement à Rome, où je pense qu'il se sentait sereinement chez lui, car Rome, dans l'Église catholique, est la maison de tous.
Aujourd'hui, nous sommes habitués à parler de la Chine de différents points de vue - économique, culturel, politique, religieux - toujours de manière un peu dramatique. De grands chiffres, de grandes craintes, de grands développements, de grandes tensions. Le père Shih était une personne qui dégageait une sagesse tranquille et un grand équilibre. Il semblait au-dessus des partis, plus attentif à l'expérience et à la réalité qu'aux grands mots des idéologies. Il ne s'est jamais présenté comme "celui qui a tout compris", il ne s'est jamais mis en avant, mais ses points de vue et ses considérations valaient la peine d'être écoutés par ceux qui s'occupent des questions d'Église en Chine, et ils ont certainement contribué à faire progresser le dialogue. Il était vraiment, dans sa personne, son esprit et son cœur, un pont de dialogue.
Je voudrais dire que le père Shih était à la fois pleinement chinois et pleinement romain, vivant naturellement la profonde dévotion au Saint-Père enracinée dans la grande tradition catholique chinoise. Mais au final, j'ai sincèrement admiré sa volonté de retourner à Shanghai à la fin de son service à Radio Vatican, alors qu'il avait déjà plus de 80 ans. C'était son peuple, c'était sa partie de l'Église. Là, il pourrait être plus utile avec son ministère sacerdotal et sa présence amicale et solidaire, avec ses conseils faisant autorité sur le plan spirituel. Il retournait régulièrement à Rome, pour entretenir et cultiver des relations utiles, mais sa mission continuait à regarder là-bas, afin que, même dans le parcours tumultueux du peuple le plus nombreux de la terre, l'annonce continue à résonner: «Si tu confesses de ta bouche que Jésus est Seigneur, et si tu crois de ton cœur que Dieu l'a ressuscité des morts, tu seras sauvé».
Le père Shih a confessé de sa bouche et a cru de son cœur, ainsi, nous dit saint Paul, «il ne sera pas déçu» Nous l'accompagnons avec confiance, reconnaissants d'avoir pu profiter de son amitié alors que nous marchons vers le Seigneur, et nous continuerons à prier avec lui pour le peuple et l'Église de Chine.
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