1 an après l'attentat à la basilique de Nice: la lente réappropriation des fidèles
Vincent Loquès, 55 ans et père de 2 enfants, Simone Barreto-Silva, 44 ans et mère de 4 enfants, Nadine Devillers âgée de 60 ans : c’est pour leur rendre hommage que le glas a sonné à 8h45 ce vendredi matin. Suivent ensuite plusieurs événements de commémoration, avant la messe, célébrée à 19h par Mgr Marceau, l’évêque de la ville.
Un an après ce terrible drame, la plaie reste ouverte pour les familles des victimes, et le traumatisme, vif, pour les habitants du quartier de la basilique, notamment pour les paroissiens, qui ont dû se réapproprier, petit à petit, leur lieu de culte.
Le père Franklin Parmentier, curé de la basilique Notre-Dame de l’Assomption revient sur ce recouvrement progressif et collectif :
Comment les paroissiens ont-ils traversé l’année écoulée ?
Ils ont traversé ces épreuves différemment, en fonction de la façon dont ils vivent leur foi. Il y a plusieurs groupes de fidèles qui ont voulu revenir tout de suite dans la basilique pour dire qu’il fallait qu’elle redevienne ce lieu de prière. Ensuite, nous en avons d’autres qui sont revenus au fur et à mesure. Il ne faut pas oublier que cet attentat a coïncidé avec le confinement, puis le couvre-feu. Au travers de l’année, et grâce aux célébrations liturgiques qui ont vraiment pu aider à vivre cette question du mal et celle de la présence de Dieu, les fidèles ont pu se réapproprier ce lieu comme lieu de prière et de paix. Nous avons aussi des personnes qui sont malheureusement toujours atteintes par ce qu’il s’est passé, qui ont du mal à rentrer dans la basilique. Mais d’une certaine manière, je pense que cela nous a aidés à mesurer l’importance de mettre Dieu dans notre vie, cela a permis une expérience de foi, certes douloureuse, mais qui nous a fait grandir.
Comment, justement, se réapproprier cet espace souillé par la violence et la mort ? Comment parvenir à y prier et célébrer sereinement ?
Là aussi, je pense que le Seigneur nous fait des grâces. Le lendemain de la messe de réparation, qui a eu lieu le 1er novembre, nous avons eu la messe de la Toussaint, qui a été très symbolique. Plutôt que de voir de la division et de la haine, Dieu nous a invités à être en communion, témoins d’amour et de vie.
Nous avons cette grâce aussi pendant le confinement, puisque tous les jours, les prêtres, avec quelques fidèles, se sont relayés pour ouvrir l’église et la messe a été célébrée quotidiennement. Ce retour dans la basilique nous a permis d’accueillir les autres, personnes croyantes ou non-croyantes, qui sont venues. Certaines restaient sur le pas de l’église, d’autres entraient, pour mettre un cierge, un bouquet de fleurs, rendre un hommage, ou simplement prier.
Nous avons eu à cœur également de faire en sorte que la basilique soit toujours éclairée, lumineuse, belle. Car face à l’horreur, le beau permet à l’homme de retrouver sa place. Durant la période de Noël par exemple, les commerçants de Nice ont apporté dans la basilique de très belles décorations. Et donc petit à petit, nous nous sommes réappropriés ce lieu.
Cet attentat est survenu quelques jours seulement après votre nomination à la cathédrale. Cette confrontation directe et brutale avec le mal a-t-elle changé quelque chose en vous ? De quelle manière a-t-elle marqué votre foi, votre sacerdoce ?
On ne peut pas dire que cela ne change rien, c’est impossible. On fait l’expérience de quelque chose d’extrêmement violent, mais nous avons tant de prêtres et de fidèles dans le monde, qui vivent cette confrontation avec le mal – je pense notamment aux chrétiens persécutés- et sont amenés à y réfléchir.
Cela a changé ma manière de vivre mon sacerdoce et donné une certaine gravité aux célébrations que nous avons vécues, notamment à Noël et Pâques. Dieu qui se fait homme, qui vient parmi nous : ce n’était seulement une question de «faire mémoire de». Là, j’ai touché du doigt -et je n’ai pas été le seul- le mystère d’un Dieu présent dans la mort. Nous avons vécu la liturgie de cette année avec une force beaucoup plus grande. Les temps en communauté nous ont aussi aidés à nous débarrasser du superficiel. Beaucoup de petites querelles, comme il peut en avoir en paroisse, ont disparu parce qu’il y avait quelque chose de plus fort que nous étions appelés à vivre.
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