Méditerranée: le vicaire d’Anatolie loue l’alliance entre Églises et villes
Antonella Palermo - Cité du Vatican
«Un double rendez-vous historique, jamais vu auparavant, qui tombe à un moment crucial pour le sort de la paix». C'est ainsi que le maire de Florence Dario Nardella a présenté samedi dernier dans la capitale toscane la double rencontre "Forum des maires" et "Méditerranée, frontière de la paix 2" qui verra se réunir les maires et les évêques de la Méditerranée et dont le point culminant sera la présence du Pape François, dimanche 27 février.
21 migrants tués à la frontière gréco-turque en 2022
L'un des principaux sujets abordés lors de la réunion sera la migration. Parmi les données enregistrées par l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), au moins 21 migrants sont morts à la frontière entre la Turquie et la Grèce en 2022, contre 10 décès signalés à la même période l'année dernière (janvier-février) et environ 55 vies perdues en 2021 le long de la même frontière.
Les signalements de refoulements et «un recours excessif à la force» à la frontière de l'UE entre la Grèce et la Turquie se poursuivent. «De telles actions ne sont pas conformes et sont contraires aux engagements et obligations des États en vertu du droit international et régional, comme la violation du principe de non-refoulement», ajoute un communiqué de l'OIM publié vendredi à Genève. L'OIM -dont le président Antonio Vitorino sera présent à la conférence de Florence- se dit «préoccupée» par les mauvais traitements que continuent de subir les migrants dans la région. En 2021, rappelle-t-il, près de 3 500 personnes sont mortes en tentant d'entrer dans l'UE par voie maritime et terrestre, faisant de l'année dernière la plus meurtrière pour les migrants dans la région depuis 2018.
Mgr Bizzeti: alliance entre les Églises et les États pour le bien commun
De la Turquie, Mgr Paolo Bizzeti sj, vicaire apostolique d'Anatolie, est arrivé à Florence -sa ville natale- pour prendre part aux propositions de l'assemblée.
Depuis la réunion de Bari où vous étiez, y a-t-il eu des avancées en termes de paix en Méditerranée?
Je dirais que la pandémie a mis encore plus en évidence la nécessité de trouver une unité d'intentions afin que les gens ne restent pas fermés, enfermés dans des situations qui deviennent ensuite insoutenables. Je crois qu'une alliance entre les Églises et les États méditerranéens est indispensable pour le bien commun, qui apparaît de plus en plus comme le seul bien possible.
Nous avons récemment célébré le troisième anniversaire du Document sur la fraternité humaine signé à Abu Dhabi. Comment interpelle-t-il les décisions des responsables politiques?
Les chefs religieux font de bons efforts pour rechercher le respect mutuel, un accord, une coexistence possible. Aujourd'hui, il me semble que la «patate chaude» est avant tout entre les mains des politiciens, qui semblent plutôt être un peu enfermés dans leur propre monde, dans leurs propres perspectives avec des politiques d'autodéfense qui, à long terme, seront en fait explosives.
La présence des maires aux côtés des évêques à Florence est donc une bonne nouvelle?
Absolument, nous devons redécouvrir une collaboration entre ceux qui sont en contact avec les personnes qui souhaitent exprimer leur foi et leur spiritualité et ceux qui sont impliqués dans l'administration des affaires publiques. Nous devons surmonter les dérives théocratiques d'une part, et un laïcisme qui ignore une dimension humaine fondamentale, la dimension religieuse, d'autre part.
Dans l'esprit du Synode... en Turquie, les agents pastoraux religieux ont encore plus besoin de la collaboration des laïcs, est-ce vrai?
Le défi, comme l'avait déjà dit saint Jean-Paul II, est celui d'un christianisme où les laïcs sont davantage protagonistes. Les évêques doivent consacrer le XXIe siècle à la formation des laïcs, non seulement en évitant les dérives cléricales -qu'il faut toujours éviter-, mais en formant les personnes pour que nous puissions avancer un peu plus comme Peuple de Dieu et un peu moins comme catégories individuelles.
Comment les chrétiens du Moyen-Orient vivent-ils la période actuelle?
La vie est difficile, il ne faut pas le nier. À l'heure actuelle, ils font partie des derniers, car ils constituent une très petite minorité et, en tant que tels, ils sont facilement ignorés, voire marginalisés. Il est nécessaire d'accroître la liberté de circulation entre les pays. Dresser des murs n'aide personne.
«Spes contra spem», la devise de Giorgio La Pira
Soixante-cinq villes de 15 pays sur trois continents différents seront représentées à Florence. Le maire de la capitale toscane, Dario Nardella, a une nouvelle fois lancé un appel à l'Europe, «souvent distraite», qui ne peut détourner le regard lorsqu'il s'agit de questions liées à la Mare nostrum. Les Églises des pays méditerranéens seront représentées par une soixantaine de délégués. Inspirés par le maire de Florence, Giorgio La Pira -qui, en pleine Guerre froide, en 1955, organisa la rencontre des maires des capitales du monde, pour un projet de paix globale face aux menaces d'une possible guerre atomique- les évêques et maires méditerranéens tenteront ainsi de faire sienne sa devise: spes contra spem, «espérer contre toute espérance».
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