Le cardinal Tagle à la conférence de Lambeth: «rêvons ensemble»
S'exprimant à l'invitation de l'archevêque de Canterbury, Justin Welby, organisateur de la conférence, le cardinal Tagle a offert ses propres réflexions sur le thème de la rencontre, «L'Église de Dieu pour le monde de Dieu, marcher, écouter et témoigner ensemble», avec une intervention intitulée «la première lettre de Pierre et la décennie à venir».
La Conférence de Lambeth a lieu tous les dix ans et marque un moment clé pour les discussions sur l'Église, les questions internationales et la mission globale de la Communion anglicane pour la décennie à venir. Les orateurs sont invités du monde entier. La réunion mondiale, depuis 1867, constitue l'un des quatre Instruments de l'Unité de la Communion anglicane. La réunion de cette année est la quinzième Conférence de Lambeth.
Un foyer spirituel commun
Le cardinal Tagle a commencé par imaginer que la première Lettre de Pierre s'adressait à nous, à l'Église et au monde contemporain. La Lettre encourage les chrétiens à rester fidèles dans leurs croyances et leur conduite, et à être d'un seul esprit, aimants, compatissants et humbles, malgré le risque de persécution et de souffrance.
Le cardinal Tagle affirme rêver de cette réalité, de cette maison pour l'Église d'aujourd'hui, unie en tant que famille humaine et avec la création, encourageant tout le monde à rêver ensemble pour permettre au Seigneur de créer cette maison pour l'Église.
Il observe que la première lettre de Pierre s'adresse aux chrétiens de la diaspora qui se sont sentis étrangers ou exilés.
Il demande si nous pouvons encore ressentir cette réalité aujourd'hui, alors que nous nous dirigeons vers une future patrie, d'autant plus que nous pouvons facilement rester figés dans nos façons d'être et de faire, alors que nous sommes appelés à être une Église qui va de l'avant et qui va vers les autres, une Église qui est une maison spirituelle avec des peuples d'origines et de cultures diverses à travers ses rencontres.
Accueillir les étrangers au milieu de nous
Cet appel nous rappelle les peuples déplacés d'aujourd'hui, a poursuivi le cardinal Tagle, les migrants forcés, les réfugiés, les victimes de la guerre, de la traite des êtres humains et du travail forcé.
Ils sont les nouveaux étrangers au milieu de nous, souvent marginalisés et désignés comme boucs émissaires, responsables de tous les problèmes d'aujourd'hui, a-t-il observé. La lettre de Pierre nous demande à tous, en particulier en tant que membres de l'Église, comment nous traitons ces millions de «sans-abri» et si nous faisons preuve de la compassion et de l'hospitalité qui font partie de la vocation chrétienne.
Le cardinal Tagle a déploré que, même au sein de l'Église, nous ayons laissé les divisions ethniques et culturelles ruiner notre foyer spirituel, rendant le rêve d'une famille humaine commune toujours plus insaisissable pour les générations futures en raison de notre négligence et de notre capacité de succomber à la violence et à la guerre.
Le populisme a également joué un rôle dans cette réalité, a-t-il admis, car il fait preuve de mépris pour les personnes en accentuant la polarisation dans des sociétés déjà divisées, en catégorisant des peuples, des groupes et des sociétés entières, notamment sur les réseaux sociaux. Nous ne devons pas laisser la culture ou la religion être utilisées pour des intérêts partisans qui sapent les efforts visant à favoriser des relations positives et à créer une famille humaine marquée par le respect et la fraternité, a déclaré le cardinal.
L'humilité pour marcher ensemble
L'invitation à marcher et à vivre ensemble requiert de l'humilité, et notre diversité provient de notre culture d'origine et pas seulement de la liberté et des choix individuels, a souligné le cardinal Tagle.
Par conséquent, le leadership pastoral de l'Église doit mieux développer sa propre «intelligence culturelle», en réfléchissant d'abord à ses propres origines, puis en se mettant à la place des autres qui expriment leur humanité en fonction de leurs propres origines culturelles.
Ce faisant, a-t-il expliqué, nous pouvons apprendre beaucoup les uns des autres en nous observant humblement et en apprenant à apprécier les autres expériences et cultures qui font de nous ce que nous sommes.
En lisant les Évangiles, nous avons de nombreux récits montrant combien Jésus a souffert pour son ouverture et sa compassion envers les étrangers et les pécheurs, a ajouté le cardinal Tagle, jusqu’à sa condamnation et à sa crucifixion.
Notre maison commune
En conclusion, le cardinal Tagle a raconté certaines de ses propres expériences que lui rappellent la Lettre de Pierre, avouant qu'elles ont donné vie à un rêve d'avenir ici, dans le présent.
Il a notamment évoqué sa visite d'un camp de réfugiés en Grèce, où il a rencontré de nombreuses personnes qui risquaient leur vie en fuyant la souffrance dans leur pays. Le camp rassemblait des personnes de toutes les cultures, religions, origines économiques et sociales imaginables, mais unies par leur voyage du désespoir vers la sécurité et la recherche d'un avenir meilleur pour leurs enfants.
Au cours de sa visite, le prélat s'est entretenu avec une représentante du gouvernement de la ville et a découvert qu'elle n'était pas là à titre officiel, mais qu'elle donnait plutôt de son temps au camp : «mes ancêtres étaient aussi des réfugiés. J'ai l'ADN d'un réfugié. Ces réfugiés sont mes frères et sœurs», lui avait-elle alors confié.
Cet épisode a profondément marqué le cardinal, qui a reçu le récit comme un enseignement sur la façon de penser et de marcher humblement avec les autres et de permettre à Dieu, à travers nous, de construire une maison commune, dans la compassion et la fraternité.
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