Un an après le rapport Sauvé, où en est l'Église de France?
Entretien réalisé par Olivier Bonnel - Cité du Vatican
Il y a tout juste un an, le 5 octobre 2021, la commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église, la Ciase, présidée par Jean-Marc Sauvé remettait officiellement son rapport sur les abus sexuels sur mineurs à la Conférence des évêques de France et la Corref, la Conférence des Religieux et religieuses de France, ses commanditaires.
Fruit de plus de deux ans et demi d’enquête, ce rapport a fait l’effet d’une déflagration, mettant en lumière l’ampleur des violences sexuelles subies au sein de l’Église catholique depuis des décennies. Il faisait notamment état de 330 000 mineurs abusés dans des contextes ecclésiaux dont 216 000 victimes d’abus commis par une personne consacrée (prêtre, religieux, diacre ou religieuse), en France depuis 1950.
Le premier constat est l’établissement d’un mal «à caractère systémique», ce que les évêques reconnaîtront quelques semaines plus tard à Lourdes, lors de leur assemblée générale. Une assemblée qui sera marquée par la demande de pardon des évêques, à genoux. Au lendemain de la publication du rapport, le Pape François avait tenu à s'adresser aux victimes et aux responsables de l'Église de France, évoquant «le temps de la honte».
Des structures mises en place
Le rapport Sauvé dressait également une liste de 45 recommandations pour les responsables de l'Église catholique, notamment un renforcement des mécanismes de contrôle interne ou une plus grande place faite aux laïcs dans la vie de l'Église, afin de rompre avec une «culture cléricale» qui aurait pu favoriser l'abus.
En un an, plusieurs structures ont vu le jour, fruit de cette réflexion. En janvier dernier naissait par exemple l’Inirr, l'Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation, chargé de répondre aux demandes de réparations des victimes. À ce jour, plus de 1 000 demandes lui ont été adressées. Il est venu s'ajouter au Fonds de solidarité et de lutte contre les agressions sexuelles sur mineurs, le Selam, chargé de recueillir des fonds pour l'indemnisation des victimes.
Si certaines victimes déplorent le travail encore trop lent de la justice, et si certaines voix catholiques sont même allées jusqu'à délégitimer le travail scientifique de la Ciase, un nouveau processus irréversible semble s'être ouvert dans l'Église de France sur la nécessité d'enraciner «une culture de la vigilance» et de répondre le mieux possible à la douleur des victimes. Retour sur ce chemin entamé depuis un an avec Céline Béraud sociologue à l’EHESS, (École des hautes études en sciences sociales), auteur notamment de l’ouvrage Le catholicisme français à l’épreuve des scandales sexuels (Seuil, 2021).
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