Après les séismes, les Églises demandent la levée des sanctions contre la Syrie
Olivier Bonnel-Cité du Vatican
« Les sanctions doivent être levées pour toujours, pas seulement pour 180 jours. J'espère que le monde regardera notre réalité en face ». C’est un cri qui vient de Damas, la capitale syrienne, celui du père franciscain Firas Lutfi, quelques heures après le terrible tremblement de terre qui a ravagé le Nord-est de la Syrie. Il résume le sentiment général dans un pays qui vit encore en guerre depuis près de douze années. Membre de la Custodie de Terre Sainte, il est responsable de la province Saint-Paul qui engloble la Syrie mais aussi le Liban et la Jordanie.
Le 10 février, les États-Unis ont décidé un allègement des sanctions de six mois contre le régime syrien afin que puisse y circuler plus facilement l’aide humanitaire. «Un signe d’espoir» pour le religieux qui s’est rapidement rendu à Alep, l’une des villes les plus touchées par le séisme. «Nous vivons une tragédie, une grande tragédie, souligne-t-il: celle de douze ans de guerre. Il s'agit d'une accumulation de souffrances, de besoins et d'un besoin extrême de secours. J'espère que la communauté internationale a enfin entendu le cri des Syriens pauvres et souffrants, des gens qui meurent réellement sous les décombres aujourd'hui».
Un appel des patriarches
Le 7 février, quelques heures après les secousses qui ont détruit des milliers de bâtiments, les patriarches et chefs des Églises en Syrie ont lancé, dans un communiqué commun, un appel à l’ONU et à la communauté internationale. Ils dénoncent les sanctions qui pèsent contre Damas comme des mesures «iniques» et demandent de lancer des initiatives humanitaires exceptionnelles et opportunes pour aider les populations syriennes accablées par des catastrophes insoutenables. Le séisme «a détruit des lieux de culte, des centres de santé et des centres d'assistance sociale, alimentant une nouvelle augmentation du nombre de sans-abri et de personnes déplacées à l'intérieur du pays, au moment même où l'hiver est le plus rude», déplorent les religieux.
Selon l’ONU, près de 5,3 millions de personnes risquent d’être sans-abri en Syrie après la catastrophe. «Un chiffre colossal et qui s'applique à une population ayant déjà subi des déplacements en masse» a commenté un représentant du Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés lors d’une conférence de presse à Damas.
Après l’ouverture dans la semaine du poste-frontière de Bab al Hawa entre la Turquie et la Syrie, les premiers camions d’aide humanitaire ont pu transiter vers les zones syriennes tenues par les rebelles, utilisant le seul couloir garanti par l’ONU. Le 10 février, le gouvernement syrien a donné son autorisation pour que l’aide puisse accéder à toutes les zones du pays.
Une occasion de construire enfin la paix?
«Aujourd'hui, le tremblement de terre attire de nouveau l'attention mais le monde a oublié la Syrie», a déploré Michael Ryan, chargé de la gestion des situations d'urgence sanitaire à l'OMS. Selon lui, le peuple syrien est confronté à «un deuxième désastre», celui du manque criant de matériel médical.
Une fois passée l’urgence de l’accès aux populations, beaucoup espèrent que ce drame sera l’occasion de mettre enfin la politique de côté. Un souhait formulé aussi bien par les Églises syriennes que de l’autre côté de la frontière. «Les circonstances tragiques que nous vivons, si nous regardons correctement les choses telles qu'elles sont, devraient être l'occasion pour tous de reconnaître qu'il vaut la peine de faire tomber les murs et les barrières, les divisions politiques qui, en fin de compte, ne font aucun bien à la population» a en effet déclaré Mgr Paolo Bizzeti, vicaire apostolique d'Anatolie.
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