Haïti: rester une Église en sortie «en ces heures sombres de l'histoire»
Marie Duhamel - Cité du Vatican
Après les religieux d’Haïti, les dix évêques du pays prennent la plume pour «faire retentir le cri de tout un peuple face à l’abandon». «Un peuple affecté jusqu’aux entrailles», écrivent-ils. Dans leur message, publié en fin de semaine dernière, les évêques expriment leur amertume et leur douleur face aux souffrances causées par «la violence aveugle des bandits lourdement armés, le cynisme et l’indifférence des dirigeants politique et les hésitations de la communauté internationale».
Perte de contrôle du territoire
Au terme de quatre ans de crise – sociopolitique et sécuritaire, le constat est sans appel: «l’Etat a perdu le contrôle du territoire national». Si la région de la capitale Port-au-Prince est presque entièrement sous le joug des bandits organisés en gangs, l’ensemble des départements, tous les diocèses, presque toutes les grandes villes sont maintenant concernés par «leurs actions terroristes». Les haïtiens sont attaqués, et avec eux les églises et lieux de culte des différentes religions «qui ne peuvent plus fonctionner».
Une population prise en otage
Une «guerre de basse intensité contre la population paisible et désarmée sévit çà et là». Elle qui ne demande qu’à vivre «dans la dignité et la paix» est de facto «prise en otage» par les gangs et leurs «alliés». Les évêques dénoncent l’inaction et le silence complice du gouvernement. Ils empruntent les mots du Pape François dans Fratelli tutti pour décrire «les ombres épaisses ‘de la violence au service d’intérêt mesquins de pouvoir, de cupidité et de clivage‘.»
Réagir
Depuis trois ans, «aucun cri aucune force morale n’a pu les arrêter», et ainsi que faire ? s’interrogent les évêques. Parce qu’ils savent que la solution «n’est pas dans la passivité», parce qu’ils savent que devenir un peuple demande un processus constant où chaque nouvelle génération se trouve engagée, ces derniers jugent possible, moyennant «beaucoup de courage», de «transformer ces conflits déshumanisants en maillon d’un nouveau processus». Pour eux, la charité sociale doit être «l’âme» de cette démarche en vue d’obtenir l’ordre social et politique.
Neuvaine de prière
À tout le peuple de Dieu qui est en en Haïti, les évêques demandent de demeurer «activement» une église qui sert et sort de chez elle pour «accompagner la vie, soutenir l’espérance, être signe d’unité (…) semer la réconciliation». Solidarité, proximité, exhortations citoyennes sont les mots d’ordre de leur agenda. La prière aussi. Le prêtres, religieux et laïcs sont invités à organiser une «véritable chaîne de prière», et plus spécialement une neuvaine de prière dans les dix diocèses du pays à l’occasion, le 29 septembre prochain de la fête de saint Michel Archange, pour «la délivrance» du pays.
Toutes initiatives visant à «arrêter les robinets de sang qui coulent à flot» ont déjà le soutien de l’Eglise. Les évêques enfin se tournent une fois de plus vers ceux qui ont les tenants du pouvoir en main, les invitant à poser des gestes «concrets et forts» de réconciliation en cessant leur soutien aux gangs et en jetant les bases d’un dialogue qui correspondent réellement aux besoins du peuple.
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