Pour la COMECE, le pacte migratoire de l'UE ne protège pas les droits humains
Lisa Zengarini – Cité du Vatican
Les évêques européens ont exprimé leur vive inquiétude quant aux risques potentiels du nouveau pacte européen sur la migration et l'asile, qui, selon eux, est susceptible d'avoir des conséquences négatives sur les droits des migrants et des demandeurs d'asile.
La réforme a été approuvée le 20 décembre par le Parlement européen et le Conseil (la branche exécutive de l'UE représentant les gouvernements nationaux en Europe) après des années de discussion sur la manière de redéfinir les règles relatives au droit d'asile.
Elle prévoit notamment un contrôle plus rapide des arrivées irrégulières, la création de centres de rétention frontaliers, l'accélération de l'expulsion des demandeurs d'asile déboutés et la mise en place d'un mécanisme de solidarité destiné à soulager les pays confrontés à un afflux massif de migrants, comme l'Italie, la Grèce et l'Espagne.
Le pacte va accroître les souffrances des migrants et des demandeurs d'asile
Dans une déclaration publiée vendredi 22 décembre, la Commission des épiscopats de l'Union européenne (COMECE) a souligné les risques de ce nouveau pacte en matière de droits humains fondamentaux des migrants, ajoutant sa voix à celle des dizaines d'ONG, dont Caritas Europa, qui ont critiqué l'accord.
Les évêques ont donc une nouvelle fois appelé l'Union Européenne «à faire preuve de courage face à ce défi historique que représentent les personnes en mouvement qui cherchent une vie meilleure et plus sûre pour elles-mêmes et leurs proches», rappelant qu' «elle a déjà démontré sa capacité à le faire avec les Ukrainiens fuyant la guerre».
La vocation de l'Europe est d'œuvrer pour un monde plus juste et plus fraternel
L'accord conclu après des mois de négociations visait à apaiser les pressions de l'extrême droite dans un contexte de montée des sentiments anti-migrants en Europe à l'approche de l'élection du Parlement européen en 2024.
Les évêques européens ont noté, à cet égard, que «la peur de personnes venant d'horizons culturels ou religieux différents, qui pourraient remettre en question notre "mode de vie européen", ainsi que la peur du populisme et de perdre les élections, ne peuvent pas être les principes directeurs de nos politiques d'asile et d'immigration».
Au contraire, ils ont souligné que la solidarité et le respect de la dignité de chaque personne doivent être les valeurs directrices de ces politiques. «La vocation de l'Europe est d'œuvrer pour un monde plus juste et plus fraternel pour tous, et pas seulement pour les Européens», ont-ils déclaré.
Enfin, la COMECE a réitéré l'engagement permanent de l'Eglise à «être du côté des plus vulnérables, de ces personnes contraintes de se déplacer à la recherche d'une vie digne».
«Que la Nativité du Christ illumine nos esprits et pousse nos cœurs à prendre les bonnes décisions pour le bien de tous», conclut la déclaration.
Critiques généralisées de la part des ONG
L'accord conclu cette semaine par les 27 membres de l'UE a été salué par les dirigeants européens comme une avancée majeure vers un processus de migration et d'asile plus équitable, plus efficace et plus durable. Cependant, des dizaines d'ONG qui aident les migrants et les réfugiés - dont Oxfam, Caritas, Amnesty International et Save the Children - ont critiqué le texte, déclarant dans une lettre ouverte qu'il «normalisera l'utilisation arbitraire de la détention des immigrants, y compris pour les enfants et les familles, augmentera le profilage racial, utilisera des procédures de "crise" pour permettre les refoulements, et renverra les individus vers des soi-disant "pays tiers sûrs" où ils risquent la violence, la torture et l'emprisonnement arbitraire». «Nous devrions renforcer, et non affaiblir, nos systèmes d'accueil et d'asile et prévoir des mécanismes permettant de partager équitablement les responsabilités entre les États européens», ajoute la lettre.
Amnesty International a également noté que l'accord renforce la dépendance de l'UE à l'égard d'États situés au-delà de ses frontières pour gérer les migrations, en s'appuyant sur des accords récents avec l'Albanie, la Libye, la Tunisie et la Turquie. «Au lieu d'investir dans un accueil digne au sein de l'UE et de développer des voies d'accès sûres et régulières pour permettre aux personnes d'obtenir une protection en Europe sans avoir recours à des voyages dangereux, il s'agit d'une nouvelle étape vers l'externalisation du contrôle des frontières et la fuite des responsabilités de l'Europe en matière de protection des réfugiés», a déclaré l'organisation.
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