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Photo d'illustration. Photo d'illustration.   (AFP or licensors)

Au sud du Tchad, des femmes disent «non» à l’excision

Plus de 200 millions de filles et de femmes ont subi des mutilations génitales, selon un rapport conjoint de plusieurs agences onusiennes (UNICEF-OMS-UNFPA-OHCHR-ONU Femmes) rendu public ce mardi 6 février, à l'occasion de la Journée internationale de la tolérance zéro contre les mutilations génitales féminines. L'abbé Nguetigal Bertin est prêtre du diocèse de Koumra au sud du Tchad. Il revient sur les conséquences de l'excision.

Jacques Ngol,SJ – Cité du Vatican


Chaque année, le 6 février, se tient la Journée internationale de la tolérance zéro contre les mutilations génitales féminines, instituée en 2012 lors de l'Assemblée générale des Nations unies. L'objectif de cette Journée est de sensibiliser et d'accroître les actions visant à éliminer ces pratiques désastreuses pour la santé des femmes. Parmi elles, l’excision, qui est encore une réalité au sud du Tchad. Dans un entretien accordé à Vatican News, l’abbé Nguétigal Bertin revient sur l’origine de cette pratique, ses conséquences et l’engagement des diocèses de Sarh et Koumra pour son éradication. Le curé de la paroisse Notre Dame de l’Immaculée Conception de Béjondo dans le diocèse de Koumra accompagne l’association des «Filles intègres» dans la lutte contre cette pratique de l’excision.

Les origines de l’excision pratiquée au sud du Tchad comme fait culturel

«L'excision est apparue au Tchad lorsqu’y passa Rabah (ndlr, un seigneur de guerre du Soudan et trafiquant d'esclaves qui devint sultan du Bornou en Afrique centrale) à la fin du XIXème siècle (1842-1900)», rapporte l’abbé Nguétigal qui explique pourquoi on recourait alors à cette pratique. «Les hommes partaient en guerre et, pour protéger les femmes, on les excisait pour qu'elle n'aient pas un attrait facile aux hommes». Malheureusement, regrette le prêtre, «on en a fait une pratique culturelle au niveau du sud du Tchad», non sans représenter un très grand danger pour celles qui la subissent. Cette mutilation rend en effet difficile le processus d’accouchement et peut même causer la mort, soit du bébé ou du bébé et de la maman. L'excision est également la cause principale de la stérilité chez les jeunes filles. Outre ces dangers, poursuit-il, il y a aussi le risque de la discrimination, car, maintenant, «les garçons se sont organisés pour dire "dans notre communauté, nous ne prenons pas les femmes excisées en mariage"».

L’Église à pied d’œuvre pour lutter contre l’excision

La lutte engagée par l’Église au Tchad, précisément dans les diocèses de Koumra et Sarh, représente d’abord un engagement pour la reconnaissance de la place des femmes dans la société et au sein de la communauté ecclésiale. C’est pourquoi, explique l’abbé Nguétigal, après l’Assemblée de l’ACERAC, (Association des conférences épiscopales d’Afrique centrale), sur le rôle des femmes dans l’Église, l’évêque de Sarh avait écrit une lettre pour appeler à l'engagement et la lutte contre l’exclusion des femmes dans l'Église et la société. C’est suite à ces appels qu’ont été «mis en place quelques comités de lutte contre l'excision dans les paroisses afin d’être proches des filles, les conseiller et les protéger pour qu'elles ne soient pas dénigrées par d’autres filles». De ces initiatives, les filles sont parvenues à une prise de consciences sur les dangers de l’excision et créent une association des «Filles intègres», un organe de lutte qui leur permet de manifester leur opposition à cette pratique.

Plus de 200 millions de filles et de femmes dans le monde, victimes des mutilations génitales féminines

«A l'occasion de la Journée internationale de tolérance zéro contre les mutilations génitales féminines, nous réaffirmons notre dévouement envers les filles et les femmes qui ont subi cette grave violation des droits de l'homme». C’est ce qui apparait dans une déclaration conjointe de Natalia Kanem, directrice exécutive de l'UNFPA, Catherine Russell, directrice générale de l'UNICEF, Volker Türk, haut-commissaire du HCDH, Sima Bahous, directrice exécutive d'ONU Femmes, et Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l'OMS, qui appellent à «l'action visant à mettre fin à cette pratique néfaste». La déclaration fait état de plus de 200 millions de filles et de femmes victimes de différentes mutilations génitales féminines. Cette année, «près de 4,4 millions de filles risquent de subir cette pratique néfaste», ont-ils alerté.

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06 février 2024, 18:02