Mgr Ballot: «L’Europe a besoin de voir émerger de nouveaux Robert Schuman»
Delphine Allaire – Cité du Vatican
Terre stratégique comme toute frontière, historiquement marquée par les ravages des guerres, l’Église de Moselle propose à chacun de se recueillir en méditant les paroles de paix issues du magistère des Papes, de saint Paul VI à François, et leurs textes phares, Pacem in Terris (Jean XXIII), Caritas in veritate (Benoît XVI), Messages pour la paix de François.
«Nous connaissons les zones de conflits qui nous interpellent et nous questionnent: l’Ukraine, Israël, Gaza, le Haut-Karabakh et tant d’autres! La neuvaine à la paix dans le monde, par l’intercession du vénérable Robert Schuman, promoteur de la paix en Europe, nous encourage à devenir les sentinelles d’une fraternité possible», indique le diocèse mosellan en cette première semaine de Carême, mettant en avant le témoignage de Robert Schuman comme celui d’un «fidèle artisan de paix», ayant exercé ses activités profanes comme un apostolat. Lui dont on célébrait l’été dernier le soixantième anniversaire de la disparition, le 4 septembre 1963 à Scy-Chazelles (Lorraine), a manifesté par son action que la politique pouvait être un chemin de sainteté.
«Nous prions pour que surgissent à nouveau des Robert Schuman dans les théâtres de guerre aujourd’hui», explique Mgr Philippe Ballot, archevêque-évêque de Metz, rappelant les haines tenaces entre la France et l'Allemagne, suivies de leur réconciliation grâce à des personnes comme l’artisan du traité de Rome.
L'enjeu prophétique des frontières
Pour porter le courage de la paix dans cette Europe frappée par la guerre en son poumon oriental, Mgr Ballot exhorte à la fraternité et à se rejoindre sur ce qui nous unit. Né au Luxembourg, ayant étudié en Allemagne, travaillé en France, Robert Schuman est l’homme des frontières comme lieux de rencontres et non d’affrontements ou de rivalité. Il s’agit donc de commencer comme à la création de la CECA, la Communauté européenne du charbon et de l'acier, par des actions concrètes. «L'Europe ne se fera pas d'un coup, ni dans une construction d'ensemble: elle se fera par des réalisations concrètes créant d'abord une solidarité de fait», affirmait le père fondateur, alors ministre français des Affaires étrangères, dans sa déclaration du 9 mai 1950.
«Les frontières ne sont pas faites pour ériger des murs ou pour s'enterrer et se tirer les uns sur les autres, mais pour s'identifier et dialoguer», souligne l’archevêque-évêque de la cité carolingienne pensant à la Terre Sainte, à l’Ukraine et à la Russie, et déplorant la peur et la méfiance qui conduisent à considérer l’autre comme une menace. Et Mgr Ballot de rappeler l’attitude du vénérable Schuman à chaque insulte virulente à son encontre: «Il serrait fort un chapelet dans sa poche pour que sa réaction soit chrétienne, et non simplement vive et spontanée».
Pour éviter cela, Schuman a beaucoup médité Isaïe: «De leurs épées, ils forgeront des socs, et de leurs lances, des faucilles. Jamais nation contre nation ne lèvera l’épée; ils n’apprendront plus la guerre.»
Une lettre pastorale sur l’Europe le 8 avril
En ce sens, les évêques frontaliers dans cette région -le cardinal Jean-Claude Hollerich, archevêque de Luxembourg, l’évêque de Trèves en Allemagne, les évêques de Liège et de Namur en Belgique, ceux de Verdun, Metz et Nancy en France, avec Mgr Stenger, responsable et président de Pax Christi France-, travaillent à une lettre pastorale commune sur l’Europe qui sera signée le 8 avril prochain à Scy-Chazelles.
«Nous, évêques frontaliers, voulons montrer que l'Europe est faite pour le dialogue et pour que les sociétés et les États vivent les frontières comme des lieux d'échanges», explique Mgr Ballot, se réjouissant de voir poindre certaines lueurs d’espérance, comme ces 5 000 catéchumènes jeunes adultes en France qui demandent le baptême ou tous ces étudiants chrétiens en sciences politiques et géopolitique prompts à s’engager pour le bien commun, «indissociable de l’héritage chrétien européen». Autant de «signaux faibles en train d’apparaître». «Grâce à cette jeunesse, notre ''Europe grand-mère'' telle que la décrit souvent le Pape François, rajeunira».
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