Kenya: les évêques plaident pour l’amélioration des conditions de vie des citoyens
Vatican News
«Le cri de l’opprimé», c’est en ces termes que les évêques kenyans ont intitulé leur déclaration adressée au peuple de Dieu, invitant les fidèles à «rendre une justice vraie, et à faire preuve de miséricorde et de compassion les uns envers les autres ».
Déplorant certaines mesures prises par le gouvernement, qui portent atteinte à la bonne marche de certaines institutions du pays, notamment les écoles et les hôpitaux gérés par l’Église catholique, les prélats ont évoqué quelques préoccupations qui visent, selon eux, «à diluer le rôle de l’Église au Kenya alors qu’elle représente un acteur majeur de l’éducation et gère des centaines d’hôpitaux et centres de soins du pays».
La foi en Dieu implique le respect de la dignité humaine
Rappelant que la société africaine a toujours été enracinée et ancrée dans un profond respect et une grande révérence envers Dieu, la KCCB souligne que «notre croyance en Lui doit nous conduire à respecter la vie et à défendre la dignité de chaque personne». Et c’est à l’Église que revient ce rôle de «sauvegarder et d’entretenir, dans la société, la morale et les valeurs qu’implique cette relation avec Dieu». Il s’agit d’une mission à laquelle «l’Église catholique n’a cessé de s’engager, depuis l’arrivée des premiers missionnaires au Kenya, principalement dans les domaines de l’éducation, de la santé et de l’amélioration de la dignité de la personne humaine, indépendamment de son statut social ou de sa tribu», ont écrit les prélats.
Cependant, constatant l'évolution des relations entre l’Église et le gouvernement, les évêques kenyans se disent «préoccupés par l'intention délibérée de réduire et d'affaiblir le rôle de l'Église catholique, et en fait de toutes les religions, en tant que garants de la moralité dans la société». Ils ont dénoncé particulièrement cette subversion dans les domaines de l'éducation et de la santé.
La mission de l’Église au Kenya en difficulté face aux restrictions imposées par l’État
La deuxième inquiétude partagée par la KCCB dans sa déclaration concerne le projet d’adoption de la loi sur l’éducation (Basic Education Bill 2024) qui, selon elle, «cherche une fois de plus à diluer et à réduire le rôle de l’Église dans les écoles et autres institutions éducatives». Il s'agit, en effet, «d'une violation de l'accord initial entre l'Église et l'État sur la manière dont les établissements d'enseignement fondés par l'Église devaient être gérés». Depuis l'indépendance, les évêques ont affirmé qu’il y a eu une tentative progressive de s'emparer de la gestion et du rôle des Églises dans les écoles; «et le nouveau projet de loi proposé menace encore davantage ce rôle crucial des Églises dans notre système éducatif», ont-ils regretté.
Ainsi, les évêques décrient et rejettent ce projet systématique visant à saper et à affaiblir le rôle de gestion de l’Église catholique en tant que fondatrice des écoles catholiques parrainées. Car, en tant qu'acteur majeur de l'éducation, «l'Église a le droit de s'engager activement dans la gestion et la supervision globales de toutes les écoles privées et catholiques, la plupart d'entre elles étant nées de l'initiative de l'Église catholique». «Bien que nous souhaitions suivre les normes établies par le Ministère de l'Éducation, nous souhaitons qu'il y ait toujours une consultation complète avec toutes les parties prenantes sur les questions qui affectent nos universités», a déclaré la Conférence épiscopale du Kenya.
Reconnaître la place de choix de l’Église au Kenya
Rendant hommage à tous les missionnaires qui ont servi le pays et qui, au prix de grands sacrifices, continuent d’offrir de grands services de charité et de travail social, les évêques du Kenya déplorent l’augmentation exorbitante des frais de permis de travail payés par les missionnaires, «qui sont passés de 15 000 Kshs à 150 000 Kshs, une mesure absolument contraire à l’éthique et témoignant d’un manque de gratitude à l’égard des personnes qui consacrent leur vie au bien de la société».
En tant que pays, «nous devrions en fait faire preuve de gratitude et d'appréciation en accordant des dérogations aux prêtres, aux religieux et religieuses et aux autres missionnaires sociaux bénévoles qui viennent compléter notre engagement social», écrivent les prélats en demandant que «leur permis de travail soit à taux zéro».
Le gouvernement appelé à soutenir les centres de santé privés
L'Église catholique possède et gère des centaines d'hôpitaux et de dispensaires au Kenya. «Nous le faisons en réponse au mandat que Dieu nous a donné de soutenir la dignité humaine quelles que soient les circonstances», expliquent-ils. En partenariat avec le gouvernement, poursuivent les pasteurs, «nous avons complété les efforts de ce dernier pour que les services de santé atteignent les plus démunis. À plusieurs reprises, nous avons attiré l'attention du gouvernement sur le fait très injuste que les hôpitaux confessionnels sont redevables d'énormes sommes à la NHIF, s’élevant actuellement à plus de 2 milliards de shillings kenyans». La conséquence est que la plupart de nos hôpitaux sont paralysés et ne sont pas en mesure de fonctionner de manière optimale, et donc d'offrir des services aux nécessiteux.
La KCCB invite donc le gouvernement à «apurer rapidement les dettes de la NHIF envers tous les établissements qui ont fourni des services médicaux dans le cadre de la NHIF avant la transition vers le nouveau Fonds social d'assurance maladie (SHIF)». Par ailleurs, face à la grève prolongée des médecins dans ce pays d’Afrique de l’Est, la Conférence épiscopale kenyane exhorte le gouvernement à «répondre rapidement aux préoccupations légitimes des médecins», et demande aux deux parties de «rechercher le dialogue et de régler la question une fois pour toutes», précisant qu'une position mutuelle peut être trouvée rapidement pour mettre fin à cette «hémorragie inutile».
L’Église continue de cheminer avec les fidèles
La réalité des Kényans ordinaires est «qu'ils ont des difficultés financières qui les ont souvent conduits à la détresse mentale», ont révélé les évêques dans leur déclaration, précisant que ces trois dernières années, le coût de la vie a fortement augmenté. Alors que les Kenyans font tout leur possible pour s'adapter au coût élevé de la vie, l'Église se tient aux côtés de ceux qui n'ont pas les moyens de mettre de la nourriture sur la table, d'emmener les enfants à l'école et de payer les factures médicales. Elle encourage surtout le gouvernement à «faire en sorte que le Kenyan ordinaire puisse au moins répondre à ses besoins de base».
En outre, la KCCB exhorte le gouvernement à améliorer la participation du public à l'évaluation de son régime fiscal. Il s'agit notamment «d'écouter la voix des Églises et des autres confessions religieuses qui ont clairement indiqué la voie la plus bénéfique à suivre à l'heure actuelle», explique-t-elle, tout en demandant que l'utilisation des impôts perçus soit claire et que le bénéfice pour le bien-être soit évident.
Les évêques encouragent les Kenyans pour leur résilience
En conclusion de leur déclaration, les prélats expriment leur fierté à l’endroit de leurs compatriotes Kenyans, au regard de leur capacité à résister aux adversités, qu'il s'agisse du coût de la vie, des conditions météorologiques ou de la maladie. «Cet espoir et cette attitude positive découlent en grande partie de notre foi en Dieu», font savoir les prélats, rassurant que «l'Église vous accompagnera toujours».
Par ailleurs, la Conférence épiscopale kenyane rappelle que le gouvernement a le devoir et la responsabilité, même s'il s'agit d'une chose pieuse et noble, «d'atténuer ces adversités et de faciliter l'amélioration du bien-être des citoyens. Il doit également tenir les promesses qu'il a faites au peuple». «Alors que nous célébrons le temps de Pâques, que le Christ ressuscité nous donne une nouvelle espérance et un nouvel élan pour vaincre le mal et apporter la lumière à ce monde, afin de construire une véritable civilisation de l'amour», conclut la KCCB, invitant et encourageant tous les Kenyans à prier intensément pour leur pays et ses dirigeants.
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