En Irak, l’impossible retour des chrétiens à Mossoul
Jean-Benoît Harel – Cité du Vatican
L’image avait fait le tour de la planète. Il y a dix ans, le 10 juin 2024, le drapeau noir de l’État islamique flottait sur Mossoul, deuxième ville d’Irak, dans la plaine de Ninive. L’organisation terroriste en guerre contre l’armée irakienne soutenue par une coalition internationale s’emparait de la ville après quatre jours de combat et en faisait sa capitale.
Les 10 000 chrétiens encore présents dans la ville ont d’abord vu leurs maisons marquées de la lettre du noun, la lettre de l'alphabet arabe ن, signifiant Nazaréens. Puis leur est donné un ultimatum: se convertir à l’islam, payer l’impôt pour les non-musulmans ou fuir. Des milliers de chrétiens décident alors de partir, abandonnant leurs biens.
Entre 30 et 40 familles
Dix ans après cet exode forcé, moins de 50 familles sont revenues. «Il s'agit d'environ 30 à 40 familles, souvent incomplètes. Beaucoup sont des personnes âgées. Plusieurs familles viennent d'autres endroits, elles ne représentent pas une présence stable que l'on peut remarquer», explique à l'agence Fides Mgr Paul Thabit Mekko, évêque chaldéen d'Alqosh.
Pourtant, une restauration des églises de Mossoul a été lancée pour permettre aux chrétiens de célébrer les liturgies. En avril dernier, l’église chaldéenne catholique d’Oum al-Maouna accueillait une messe, dix ans après la destruction par les jihadistes. Mais, ce n’est pas l’état des églises qui dissuade les chrétiens de revenir à Mossoul.
De 100 000 à quelques centaines
«Plus de 90 % des chrétiens qui ont fui Mossoul n'envisagent pas de revenir» assure Mgr Paul Thabit Mekko. La violence de leur départ a profondément choqué les habitants chrétiens de Mossoul. «Certains ont été chassés, d'autres se sont sentis trahis. Nous ne savons pas si la situation va changer. Ils ne pensent pas revenir dans une ville qui a beaucoup changé par rapport à ce qu'elle était lorsqu'ils y vivaient. Ils ne la reconnaîtraient pas» poursuit l’évêque.
Aujourd'hui, beaucoup de ces chrétiens vivent à Ankawa, le quartier chrétien d'Erbil à l’est de Mossoul, dans le Kurdistan irakien. Ils craignent pour leur sécurité et le manque de travail.
Au début des années 2000, les chrétiens étaient plus de 100 000 à Mossoul et coexistait avec d’autres communautés religieuses. Après la guerre américaine en Irak, puis le passage de l’État islamique, ils ne sont plus que quelques centaines, à tenter de conserver allumée la flamme de l’espérance.
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