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Photo d'illustration des jeunes kenyans au cours des manifestations à Nairobi, au Kenya. Photo d'illustration des jeunes kenyans au cours des manifestations à Nairobi, au Kenya.  (AFP or licensors)

Au Kenya, l’Église appelle à privilégier la paix

Ces dernières semaines, le Kenya a été secoué par une vague de manifestations déclenchées par une loi fiscale controversée proposant des augmentations d'impôts significatives. La situation a dégénéré en violence, avec des affrontements entre la police et les manifestants dans plusieurs villes. Au milieu de ce chaos, un message de paix et de réconciliation émane de l'Église.

Camille Mukoso, SJ - Nairobi

Le cœur de l'agitation se trouve à Nairobi, où les manifestants descendent régulièrement dans les rues – généralement le mardi et le jeudi – pour exprimer leur mécontentement. La réponse de la police est sévère, avec des rapports faisant état d'au moins cinq personnes tuées par balle et des dizaines de blessés. Cependant, selon la Commission nationale des droits de l'homme du Kenya, 22 personnes ont été tuées, dont 19 à Nairobi, et plus de 300 ont été blessées. Malgré ces chiffres alarmants, les manifestants ont tenté, le 25 juin dernier, de prendre d'assaut le parlement, entraînant des confrontations violentes. Selon certaines sources, ces heurts ont été réprimés par la police à balles réelles.

Face à ce qui ressemblait au début à de simples manifestations, et qui s’est transformé en une demande croissante de démission du président William Ruto, l’évêque auxiliaire de Nairobi, Mgr Wallace Ng’ang’a, a appelé les jeunes, lundi 8 juillet, à rejeter la violence et à maintenir la paix pendant leurs manifestations, tout en exhortant le gouvernement à prêter attention à leurs griefs.

La Génération Z: l’arbre qui cache la forêt

Les marches au Kenya sont principalement organisées par la Génération Z, ces jeunes nés après 1996. Ce mouvement de jeunes adultes s'est mobilisé contre la loi fiscale de 2024 et, plus largement, contre la gouvernance actuelle du président William Ruto. Le mécontentement a commencé sur le réseau TikTok, où ils ont exprimé leur désaccord avec le projet de loi fiscale, qui proposait des augmentations d'impôts considérables.

Sans structure de leadership centralisée, les jeunes activistes ont su organiser un mouvement bien structuré. Utilisant leur maîtrise des outils numériques, ils ont créé un fonds communautaire, surnommé «kitty», pour financer les frais médicaux des camarades blessés et les coûts logistiques des manifestations. Ils publient sur les réseaux sociaux les numéros de téléphone des leaders politiques, demandant aux manifestants de les inonder de messages SMS et WhatsApp pour les forcer à agir.

Appel de l'Église à la paix

Au milieu de ce chaos, Mgr Ng'ang'a a lancé un appel à favoriser la paix. Reconnaissant la légitimité des revendications des manifestants, il a exhorté le gouvernement à écouter attentivement les voix des jeunes demandant des changements: «avec les arguments qu'ils présentent, les manifestants ont une raison légitime, et nous devons les écouter. J'exhorte le gouvernement à prêter attention aux griefs de ces jeunes. Ils envoient un message puissant au monde, que nous devons considérer attentivement, en réfléchissant à nos responsabilités et actions au sein du pays».

L’évêque auxiliaire de Nairobia a également invité cette jeunesse à rejeter la violence et à maintenir la paix pendant leurs manifestations: «alors que j'exhorte les jeunes à promouvoir la paix lors de ces manifestations, ils doivent savoir que leur message a été reçu. Il est très clair ce qu'ils veulent. Ils ont une raison légitime de tirer la sonnette d'alarme. Cependant, je leur demande d'éviter la violence et de ne pas se laisser manipuler par ceux qui ont des intérêts personnels».

Une réponse du gouvernement

Sous la pression des manifestants, la présidence a annoncé la suppression de certaines des dispositions les plus contestées du projet de loi, comme la taxe sur le pain. «Nous avons écouté les opinions des Kenyans», a déclaré Kuria Kimani, président de la Commission des finances du parlement, lors d'une conférence de presse avec le président Ruto.

Malgré le retrait de certaines parties du projet de loi, la réponse du président kenyan n'a guère apaisé la colère. Les impôts proposés qui visaient à alléger la lourde dette du pays, ont plutôt déclenché une dissidence généralisée. Les réseaux sociaux, tels que X (ex Twitter) et Instagram, montrent qu’une marche pacifique de grande envergure est prévue pour le mardi 16 juillet 2024.

Préoccupations internationales

La communauté internationale observe la situation avec une inquiétude croissante. Les ambassadeurs des États-Unis, du Royaume-Uni et de l'Allemagne ont appelé à la retenue de toutes les parties. L'Association Médicale du Kenya a également souligné la nécessité urgente de couloirs médicaux sûrs pour protéger les blessés lors des manifestations. En ces temps difficiles, la capacité de la nation à se rassembler et à trouver un terrain d'entente serait cruciale pour façonner un avenir stable et prospère.

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12 juillet 2024, 15:42