Le cardinal Peter Turkson donnant la leçon inaugurale à Hekima University College, à Nairobi (Kenya), samedi 17 août 2024 Le cardinal Peter Turkson donnant la leçon inaugurale à Hekima University College, à Nairobi (Kenya), samedi 17 août 2024 

Hekima College lance sa 41e année avec une leçon inaugurale du cardinal Turkson

Hekima University College, institution jésuite basée à Nairobi, a lancé sa nouvelle année académique samedi 17 août 2024. Le moment marquant a été la leçon inaugurale prononcée par le cardinal Peter Turkson, chancelier de l'Académie pontificale des sciences et de l'Académie pontificale des sciences sociales. Il a entretenu l’assistance sur la réinvention des dynamiques de pouvoir à la lumière du Concile Vatican II, de l’exhortation post-synodale Ecclesia in Africa et du Synode sur la synodalité.

Christian Kombe, SJ et Camille Mukoso, SJ - Nairobi

Pour sa 41e année, l’université jésuite Hekima College a eu l’honneur d’avoir dans ses murs la présence du cardinal Peter Kodwo Appiah Turkson, chancelier de l'Académie pontificale des sciences et de l'Académie pontificale des sciences sociales, et préfet émérite du dicastère pour le Développement humain intégral. L’événement a attiré une assistance considérable et diversifiée -étudiants, professeurs et collaborateurs, dignitaires de l’État et de l’Église locale-, venue entendre le prélat ghanéen sur le thème «Réimaginer les dynamiques de pouvoir dans les lieux ecclésiaux et socio-politiques: Leçons du Concile Vatican II, de l’Exhortation Ecclesia in Africa et du Synode sur la Synodalité».


Le Concile Vatican II: une vision de communion et de service

Pour le cardinal Turkson, le second Concile du Vatican, tenu entre 1962 et 1965 sous les papes Jean XXIII et Paul VI, représente un tournant majeur dans la réimagination des dynamiques de pouvoir au sein de l’Église. Tout en étant une réponse aux défis du XXe siècle, ce concile «a également cherché à réimaginer les relations de pouvoir dans l'Église en les fondant sur une compréhension renouvelée de la communion», a-t-il souligné. Selon le cardinal ghanéen, l’ecclésiologie du dernier concile, telle qu’elle ressort de la Constitution dogmatique Lumen Gentium, l’un de ses documents les plus significatifs, a profondément modifié la manière dont l'Église se voit elle-même et interagit avec le monde. L'Église, a-t-il fait remarquer, «est la communion des croyants, et non seulement une organisation hiérarchique centralisée. Le pouvoir doit être exercé dans un esprit de service, à l'image du Christ». Le cardinal Turkson a également indiqué que le Concile a introduit des réformes liturgiques et a contribué à une ouverture accrue de l’Église au dialogue œcuménique et interreligieux. Ces changements ont permis une participation plus active des laïcs et une meilleure réponse aux besoins contemporains, a-t-il confié.

Des participants à la messe du Saint Esprit, après la leçon inaugurale à Hekima University College, à Nairobi (Kenya), samedi 17 août 2024.
Des participants à la messe du Saint Esprit, après la leçon inaugurale à Hekima University College, à Nairobi (Kenya), samedi 17 août 2024.

Ecclesia in Africa: une réflexion contextuelle

Le premier synode africain et l’exhortation apostolique post-synodale Ecclesia in Africa (1995) du Pape Jean-Paul II s’inscrivent dans le processus de réception des intuitions du Concile au niveau de l’Église universelle et de leur approfondissement dans les différents contextes continentaux. Ce synode, a expliqué le cardinal Turkson, a souligné l'importance de l'inculturation et de l'engagement social de l’Église face aux défis spécifiques du continent. «Ecclesia in Africa appelle l'Église à une plus grande solidarité avec les populations locales, tout en affirmant que la foi chrétienne doit être vécue dans le respect et l'enrichissement des cultures africaines».

Une expression particulière de ce synode pour exprimer l’identité et la mission de l’Église en Afrique était celle de «famille de Dieu», a indiqué le prélat ghanéen. Selon lui, il est crucial que l’Église africaine continue de s’approprier et d’approfondir cette image au regard des défis énormes qui se posent au continent, comme l’a révélé le second synode africain, tenu sous le Pape Benoit XVI. Aussi, «l'Église en Afrique doit être témoin de la justice et de la paix, en s'opposant aux structures d'injustice et en promouvant le développement intégral de l'homme».

Des participants à la leçon inaugurale donnée par le cardinal Peter Turkson à Hekima University College, à Nairobi (Kenya), samedi 17 août 2024.
Des participants à la leçon inaugurale donnée par le cardinal Peter Turkson à Hekima University College, à Nairobi (Kenya), samedi 17 août 2024.

Le Synode sur la Synodalité: vers une Eglise d’avantage «famille de Dieu»

Le cardinal Turkson a insisté en outre sur le fait que «la synodalité et le dialogue sont au cœur du renouveau de l'Église», affirmant que la dynamique de pouvoir dans l'Église doit refléter une structure plus participative, laquelle ne s’oppose pas à la hiérarchie, comme l’enseigne Vatican II. Aux dimensions de communion et de service, le synode en cours ajoute, au cœur de l’identité et de la mission de l’Église, celle de la participation. Le synode sur la synodalité envisage une Église où le pouvoir est compris comme service et mission, et où il est exercé dans un esprit de communion et de collaboration, a-t-il expliqué. «Le pouvoir dans l'Église doit être vécu comme un service, suivant l'exemple du Christ qui est venu pour servir et non pour être servi».

Ainsi, pour le cardinal ghanéen, le parcours de Vatican II au synode en cours, est un appel constant à la transformation de l’Église et de ses structures pour qu’elle soit davantage orientée et centrée vers le service. Cette dynamique peut également enrichir la compréhension et l’exercice du pouvoir dans la société et la sphère politique. «La synodalité n'est pas simplement un concept théorique, mais un appel concret à réviser nos dynamiques de pouvoir pour qu’elles reflètent véritablement la communion et le service», a-t-il indiqué.

Le cardinal Turkson, Mgr Philippe Anyolo et Mgr Rodrigo Mejia, concélébrant la messe du Saint Esprit, après la leçon inaugurale à Hekima University College, à Nairobi (Kenya), samedi 17 août 2024.
Le cardinal Turkson, Mgr Philippe Anyolo et Mgr Rodrigo Mejia, concélébrant la messe du Saint Esprit, après la leçon inaugurale à Hekima University College, à Nairobi (Kenya), samedi 17 août 2024.

Grandir dans la familiarité avec le Christ

La journée s’est poursuivie avec la messe du Saint Esprit, présidée par le cardinal Peter Turkson, avec la présence des plusieurs concélébrants, dont l’archevêque métropolitain de Nairobi, Mgr Philippe Anyolo, et le vicaire apostolique émérite de Soddo, en Éthiopie, Mgr Rodrigo Mejia Saldarriaga, SJ. Ce moment de prière commune a marqué le début de l'année académique avec une forte dimension et ferveur spirituelle.

Le cardinal Turkson a centré son homélie sur l'appel à une conversion profonde des cœurs et des esprits pour mieux servir la mission de l'Église. «La véritable transformation commence par un changement intérieur, et c'est à travers cette transformation que nous pouvons vraiment impacter notre monde». Aussi, a-t-il encouragé les étudiants à entretenir et à développer leur familiarité avec le Christ, qui a allumé dans leur cœur la lampe de la foi. «Nous devons nous nourrir de la Parole de Dieu pour que cette lumière soit allumée en nous et commence à s'intensifier jusqu'à devenir comme le soleil de midi».

Quant à l’ordinaire de Nairobi, il est revenu dans son mot sur l’éducation intégrale inspirée par la tradition ignatienne, encourageant les jésuites et Hekima University College à continuer à former des hommes et des femmes pour les autres au service de l’Église et du monde.

Le père Marcel Uwineza, SJ, directeur de Hekima University College
Le père Marcel Uwineza, SJ, directeur de Hekima University College

Une vision audacieuse pour l’avenir

Pour le recteur de l’université, le père Marcel Uwineza, SJ, alors qu’elle entame sa 41e année, Hekima University College est déterminée à poursuivre sa croissance et son développement avec audace et espérance, comme l’indique le thème choisi pour orienter cette année académique: «En avant et vers le haut: une vision audacieuse remplie d’espérance». Aussi, a-t-il souligné, que l’institution reste convaincue de l’importance d’une théologie et d’une réflexion qui soit enracinée dans les réalités locales tout en ayant une portée globale. «Notre aspiration la plus profonde est que HUC continue de croître en tant qu’Institution d’excellence académique de la Compagnie de Jésus en Afrique et au-delà», a indiqué le père Uwineza, annonçant également que l’université comptait ajouter  trois programmes supplémentaires à ceux déjà existants, de théologie, d’études sur la paix et des relations internationales.

Merci d'avoir lu cet article. Si vous souhaitez rester informé, inscrivez-vous à la lettre d’information en cliquant ici

19 août 2024, 16:04