Pour Mgr Désiré Nongo, «2024 a été une année de grâce»
Fabrice Bagendekere – Cité du Vatican
Malgré les multiples défis qui se posent, 2024 a été une année pleine de grâces pour l’Église centrafricaine, qui se place dans la perspective des événements célébrés cette année par l’Église universelle, notamment les deux sessions du synode sur la synodalité, dont les fruits devaient être décisifs pour l’avenir de l’Église dans «sa façon d’être Église». À cela s'ajoute le 130ème anniversaire de l’évangélisation de la République centrafricaine. Dans un échange avec Vatican News, Mgr Désiré Nongo Aziagbia, évêque de Bossangoa et président de la Conférence épiscopale de la République Centrafricaine, revient sur ces grands marqueurs de l'année 2024.
Monseigneur, nous sommes dans un moment, «des commencements et des fins»: une année est en train de s’achever, une autre va commencer. Quelle relecture faites-vous de l’année qui touche à sa fin?
Je me place dans une attitude d'action de grâce si je regarde tout ce que nous avons vécu, en tant qu'Église diocésaine de Bossangoa, en tant qu'Église de Centrafrique, et pourquoi pas en tant qu'Église universelle. Les différentes étapes que nous avons traversées, les moments forts que nous avons vécus avec, notamment le Synode, l'année jubilaire qui vient de commencer et la clôture du 130e anniversaire de l'évangélisation de notre pays... Ce sont des moments de grâce pour lesquels nous devons être reconnaissants au Seigneur. Les défis ne manquent pas, mais dans la foi et l'espérance, nous sommes convaincus que le Seigneur ne nous abandonne pas.
Janvier, c’est aussi le «mois des choix, des clés et des portes». Quelles sont les horizons que vous voyez s’ouvrir au monde, votre pays et l’Église? Quels sont vos souhaits pour la nouvelle année?
Dans la perspective des grands événements, nous avons vécus dans l'Église, les deux phases du Synode, avec le document final qui trace des perspectives d'avenir, notamment celle de voir comment nous impliquer davantage, en tant que chrétien, dans l'édification du royaume de Dieu dans le monde d'aujourd'hui, tout en prenant en compte les différents défis, les différents enjeux. Ajoutons à ceci, l’année jubilaire qui a été ouverte le 24 décembre. Le Jubilé nous appelle à plus d'engagement et de solidarité, même message que nous reprenons au niveau de notre Église avec la célébration du centenaire. Considérant ces grands événements, pour moi, la perspective, c'est l’avènement d’un plus grand engagement chrétien dans les défis de notre monde d'aujourd'hui, mais aussi plus de responsabilité en ce qui concerne la prise en charge de notre Église de Centrafrique qui célèbre son anniversaire de 130 ans. Nous sommes arrivés à un âge où les chrétiens doivent comprendre que désormais la prise en charge de leur Église ne dépend pas d’une aide quelconque qu’on pourra recevoir d’ailleurs. Même si la générosité, la solidarité reste à encourager, les chrétiens doivent assumer désormais cette responsabilité d'être en première ligne pour la prise en charge de l'annonce de l'Évangile. Voilà donc la perspective vers laquelle je m'oriente, la perspective à laquelle j'encourage les fidèles de mon diocèse, celui de Bossangoa.
Le Jubilé de l’espérance a été ouvert par le Pape le 24 décembre. Le 29 décembre, le même acte été reproduit dans tous les cathédrales du monde, la vôtre notamment. Comment a-t-il été accueilli par les fidèles de votre diocèse? Quelles sont les grâces attendues de ce jubilé?
Le Jubilé de l’espérance a été accueilli par les fidèles du diocèse de Bossangoa dans la foi, dans la ferveur et dans la joie. En tenant compte de nos réalités locales (par exemple, les routes n'existent pratiquement pas), j'avais limité l'organisation aux quatre paroisses du doyenné du centre de la ville de Bossangoa. Très tôt le matin, les chrétiens se sont rassemblés à la paroisse Saint-Charles-Lwanga, à plus ou moins 3 kilomètres de la cathédrale. Nous avons fait une grande procession qui a rassemblé pratiquement mille fidèles jusqu’à la cathédrale. Nous avons vécu ce moment dans l'espérance, la foi, et dans la prière. Et, le défi que j'ai lancé à mes fidèles à cette occasion, c'est l'implication des différents mouvements, fraternités et associations dans la solidarité avec les pauvres, les prisonniers, les malades, en organisant et posant des actes concrets de charité pratique envers cette frange de notre communauté. Voilà comment nous sommes entrés dans cette célébration.
Quelles sont les grâces attendues de ce jubilé?
Je parlerai des fidèles du diocèse de Bossangoa et de manière élargie, des fidèles de la République centrafricaine, où les chrétiens vivent depuis près de dix ans maintenant, une crise qui s'éternise, avec des poches d'insécurité par-ci, par-là, les défis au niveau du développement, les défis au niveau de la santé, de l'éducation et autres. Voilà la réalité à laquelle le peuple centrafricain, les fidèles chrétiens catholiques centrafricains sont confrontés aujourd'hui.
Pour la période de Noël, j'étais aux confins de mon diocèse, à la frontière avec le Tchad, où trois villages ont été incendiés de manière violente et meurtrière par des groupes armés, laissant environ 850 personnes dans le besoin, certains en brousse, d’autres dans un abri de fortune, et sans aide appropriée. Voilà autant des défis auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui. Cependant, au-delà de cette précarité, le peuple centrafricain fait preuve de beaucoup de résilience, continue à se battre, ne perd pas de foi en eux, ni l'espérance en Dieu. Ils font beaucoup d’effort pour se reconstruire. Voilà pour moi la principale grâce que nous avons déjà reçue au début de ce Jubilé. J'espère que tout au long de ce Jubilé, ces grâces vont se renforcer et faire des fidèles du diocèse de Bossangoa et de troute la Centrafrique, des hommes et des femmes qui se lèvent, qui se battent pour la justice et pour la promotion de la dignité humaine.
En fin Mgr, quel appel aimeriez-vous à vos fidèles et au monde?
Commençant par le diocèse de Bossangoa, l'église de Dieu en République centrafricaine, je me dis que nous sommes assez grands. À 130 ans, on n'est plus un enfant. Donc, il est temps de nous lever et de vivre en Église et de nous approprier notre Église, notre évangélisation. Devenir des acteurs, non pas des consommateurs des grâces de Dieu, mais des acteurs qui font advenir le royaume de Dieu, par notre engagement à tous les niveaux.
M'adressant au monde de manière générale, nous sommes en train de vivre des grands défis, avec des crises multiformes, des guerres par-ci, par-là. Engageons-nous de manière résolue pour faire advenir la paix. Nous devons tous nous sentir concerné par la paix. Nous entrons dans une nouvelle année, avec des incertitudes peut-être. Quoi qu’il en soit, quelles que soient les dispositions que nous pouvons avoir, remettons-nous entre les mains du Seigneur qui ne cesse de nous accompagner, dont l'amour nos précède. Entrons dans cette nouvelle année dans la foi avec la Vierge Marie, la mère de notre Sauveur.
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