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Le chanteur Charles Aznavour, ici lors d'un concert en 2011. Le chanteur Charles Aznavour, ici lors d'un concert en 2011. 

Le dernier voyage de Charles Aznavour, géant de la chanson française et porte-voix de l’Arménie

Le chanteur est décédé ce lundi 1er octobre à l’âge de 94 ans.

Cyprien Viet – Cité du Vatican

Il était l’une des dernières légendes vivantes de la chanson française, et probablement l’un des artistes français les plus connus dans le monde. Charles Aznavour s’est éteint la nuit dernière à 94 ans, peu après avoir effectué une ultime tournée au Japon.

Né à Paris le 22 mai 1924 de parents arméniens, Charles Aznavour a vécu une carrière d’une richesse exceptionnelle, sur plus de sept décennies, se produisant dans plus de 80 pays, et chantant plus de 1400 chansons en six langues. Il avait aussi effectué une belle carrière au cinéma et au théâtre, débutant sur les planches dès les années 1930.

À partir de 1988, suite au séisme qui avait ravagé la ville de Gyumri, en Arménie qui faisait alors encore partie de l’URSS, Charles Aznavour s’était beaucoup investi pour la terre d’origine de sa famille, bien qu’il n’y ait jamais personnellement vécu. Charles Aznavour n’avait jamais souhaité jouer de rôle politique direct en Arménie, mais il était tout de même devenu une icône et un symbole de l’amitié franco-arménienne. Il voulait impliquer la puissante diaspora des Arméniens de France dans la reconstruction de ce pays. Son aura dépassait largement le seul univers artistique, et en 2008, après avoir obtenu la nationalité arménienne, il avait été nommé ambassadeur d’Arménie en Suisse et représentant auprès de l’Onu, débutant ainsi une nouvelle carrière diplomatique… à 84 ans.

À travers les réseaux sociaux, il avait suivi avec attention les évènements du printemps dernier qui ont mené à un changement de régime. Une exposition faisant le parallèle entre les évènements de Mai 68 en France et ceux de Mai 2018 en Arménie vient d’ailleurs d’être inaugurée dans le Centre qui porte son nom, au centre de la capitale arménienne. Le président français Emmanuel Macron l’avait invité à participer au sommet de la Francophonie qui se tient la semaine prochaine à Erevan, et représente le plus grand évènement international organisé dans ce pays depuis l’indépendance. Un hommage lui sera très probablement rendu dans le cadre de ce sommet, sous une forme qui reste à définir

Un artiste qui intercédait pour l’Arménie auprès des Papes

Charles Aznavour, de confession apostolique arménienne, abordait fréquemment des thèmes spirituels dans ses chansons.

Le 26 septembre 2001, il avait chanté devant le saint Pape Jean-Paul II à l’occasion de sa visite dans ce pays qui fêtait alors ses dix ans d’indépendance. Il avait interprété un Ave Maria, en présence du Pape polonais et du catholicos de l’Église apostolique arménienne Karékine Ier, lors d'une cérémonie au mémorial du génocide arménien, à Tzitzernakaberd, près d'Erevan.

La veille, Charles Aznavour avait été reçu par le Pape et le catholicos à Etchmiadzine, lors de la partie publique de la rencontre, et il avait également participé, dans la foule, à la célébration œcuménique en la nouvelle cathédrale Saint-Grégoire l´Illuminateur, à Erevan.

Quelques années plus tard, dans le contexte du centenaire du génocide arménien, Charles Aznavour avait salué les déclarations tenues par le Pape François lors de la célébration organisée à la basilique Saint-Pierre le 12 avril 2015, qui avait pour la première fois utilisé ouvertement dans un discours le terme de «génocide». «Je m’attendais à ce qu’il le fasse», avait alors déclaré le chanteur dans une interview au Parisien, exprimant son affection pour le Pape François en ces termes : «C’est un geste très fort. Mais le personnage est très fort ! Cela fait un moment qu’il est en train de tout bousculer. Il est en train de bousculer le Vatican… et la mafia ! C’est costaud ! J’apprécie les hommes forts quand ils travaillent dans le bon sens», avait-il alors déclaré.

Le chanteur, très connu aussi en Argentine et dont le Pape François aimait écouter les chansons, selon ce que rapportent certaines agences de presse, avait même nourri le projet d’organiser un concert pour l’Arménie au Vatican. Ce projet n’a pas pu être mené à son terme. Charles Aznavour s’est finalement éteint avant d’avoir accompli tous ses projets encore nombreux, et avant son propre centenaire, pour lequel il espérait encore être capable de monter sur scène.

L’hommage du cardinal Ravasi

Peu après l’annonce de son décès, le cardinal Gianfranco Ravasi, président du Conseil pontifical de la Culture, a délivré un tweet contenant ces paroles en français, tiré de la chanson Sur ma vie : «Près des orgues qui chantaient, face à Dieu qui priait, heureux je t’attendais… mais les orgues se sont tues.» Un signe que l'émotion mondiale suscitée par le décès de cet artiste a donc aussi touché le Vatican.

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01 octobre 2018, 19:55