Boris Johnson, une ascension vers le pouvoir semée de controverses
Entretien réalisé par Marie Duhamel – Cité du Vatican
Boris Johnson succède donc à Theresa May à la tête du Parti conservateur. Il l’a emporté, a-t-on appris hier, sur l’actuel ministre des Affaires étrangères Jeremy Hunt, avec 66% des suffrages exprimés par les 159 000 militants conservateurs lors d’un vote qui s’est clos lundi.
Avec cette large victoire, sur une échelle toutefois peu représentative de la population britannique, Boris Johnson devient le nouveau Premier ministre du Royaume-Uni. La reine Elizabeth II le recevra cet après-midi et devrait le charger de former un gouvernement; il devrait s’adresser ensuite au parlement.
Un point est déjà clair. Dès l’annonce de sa victoire hier, il a promis avec enthousiasme de «mettre en œuvre le Brexit le 31 octobre» prochain, nouvelle date butoir fixée de sortie de l’Union européenne, après deux reports. Il avait déjà assuré qu’il respecterait ce délai avec ou sans accord.
Une personnalité clivante
Ancien élève à Eton et Oxford, il fut journaliste à Bruxelles pour la presse populaire britannique, après s’être fait licencié du Times pour avoir inventé une citation et l’avoir nié. Membre du parti conservateur, il fait son entrée au parlement en 2001 avant d’être élu maire de Londres en 2008. Son ascension n’est en rien freiné par les controverses. Boris Johnson est connu pour ses provocations, ses gaffes et même ses mensonges notamment lors de la campagne pour le référendum sur le Brexit en 2016. Son engagement pour une sortie de l’UE lui valut d’être nommé par Theresa May chef de la diplomatie britannique de son gouvernement.
Agnès Alexandre Collier est professeur de civilisation britannique à l’Université de Bourgogne, actuellement détachée à la Maison française d’Oxford. Elle revient sur la personnalité du futur Premier ministre.
Populaire auprès des militants en raison de ses coups d’éclats et de ses excentricités, il suscite en revanche une profonde inimitié chez les adversaires du Brexit, nombre d’entre eux considèrant son ralliement à la sortie de l’UE comme un moyen d’assouvir ses ambitions personnelles.
Sa popularité n’est pas acquise au sein même du parti conservateur. Avant son élection, trois membres du gouvernement sortant ont démissionné: le secrétaire d’État aux Affaires européennes, le ministre de la Justice et le ministre des Finances. Philip Hammond a prévenu qu’il ferait tout pour empêcher une sortie de l’UE sans accord, ne semblant pas exclure de contribuer à faire tomber le gouvernement de Boris Johnson.
Mission (quasi) impossible
Ce dernier qui dispose d’une majorité précaire au parlement, préfèrerait néanmoins trouver un nouvel accord avec Bruxelles, d’ici le 31 octobre. Cela semble difficile.
D’abord parce que s’il a manifesté son intention d’être inflexible face aux institutions européennes, il ne s’est pas précisément exprimé sur les modifications qu’il souhaite apporter à l’accord conclu avec Bruxelles, après 17 mois de négociations conduite par le gouvernement de Theresa May.
Ensuite, si le président français et la chancelière allemande l’ont félicité ce mardi, et si le chef des négociateurs européens, Michel Barnier, a affirmé avoir «hâte de travailler de manière constructive avec Boris Johnson», les dirigeants européens refusent de renégocier l’accord de retrait trouvé. La future présidente de la Commission européenne évoque déjà «les défis à venir» de la relation entre Londres et Bruxelles.
Enfin, le calendrier est des plus serrés: les institutions européennes changent de direction et les parlementaires britanniques devraient bientôt prendre leurs vacances d’été.
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