Tunisie: début de campagne présidentielle délétère
Entretien réalisé par Hélène Destombes - Cité du Vatican
Nabil Karoui, dirigeant d'une chaîne de télévision privée dite «progressiste», fait l’objet d’une plainte pour «blanchiment d’argent» et «évasion fiscale» qui remonte à 2016. Son parti pointe du doigts le Premier ministre Youssef Chahed accusé d'avoir orchestré cette arrestation. Des accusations rejetées par le chef du gouvernement qui dément toute intervention dans la procédure judiciaire.
A deux semaines de ce scrutin présidentiel anticipé, les électeurs assistent à un face à face virulent entre les deux camps issus de la famille dite «moderniste», sortie victorieuse en 2014 de son duel avec les islamistes. Nabil Karoui est notamment soutenu par l’ex-parti présidentiel Nidaa Tounès, Youssef Chahed s’adosse lui à une nouvelle formation, Tahya Tounès, née d’une dissidence au sein de Nidaa Tounès.
Cette élection anticipée, suite au décès le 25 juillet dernier de Béji Caïd Essebsi, premier président démocratiquement élu au suffrage universel de l'histoire moderne de la Tunisie, se tiendra avant le scrutin législatif prévu, le 6 octobre. Elle représente en quelque sorte un premier indicateur de l’enracinement de la démocratie en Tunisie, unique rescapée de la vague des «printemps arabes» de 2011.
Un défi économique majeur
Principale force au Parlement, le parti Ennahdha a présenté vendredi son programme mettant l'accent sur le développement économique du pays, l'une des principales revendications de la révolution de 2011. Le dirigeant d'Ennahdha, Rached Ghannouchi dit vouloir aider les jeunes à financer leurs projets, et inciter les professionnels à investir dans les régions de l'intérieur du pays. Le parti, qui a annoncé en 2016 renoncer à l'islam politique, n'a pas évoqué dans son programme sa position sur les questions de société ou religieuses.
Malgré les avancées démocratiques après la chute de Zine el Abidine Ben Ali il y a huit ans, la Tunisie ne parvient pas à répondre aux attentes sociales, à faire baisser un chômage de plus de 15% et une inflation de près de 7%. La question sécuritaire reste elle aussi prioritaire dans le pays frappé ces dernières années par une vague d’attentats terroristes.
Dans ce contexte, quels sont les thèmes de campagne les plus attendus et comment définir les différentes forces en présence ? Analyse de Vincent Geisser, chercheur au CNRS à l’'Institut de Recherches et d'Études sur les Mondes Arabes et Musulmans. Il revient tout d’abord sur le climat délétère actuellement dans le pays, au lancement de cette campagne présidentielle.
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