En Iran, les manifestations du désespoir
Entretien réalisé par Marine Henriot - Cité du Vatican
Des manifestations du désespoir, de «crève-la-faim», estime Bernard Hourcade, géographe, directeur de recherche émérite au CNRS. A partir du 15 novembre et la décision du gouvernement d’augmenter le prix de l’essence de 300 %, des flots d’Iraniens se sont déversés dans les rues de tout le pays, au sud, au nord, dans les petites, moyennes et grandes villes et également dans la capitale, Téhéran.
Dans un communiqué publié le 25 novembre, Amnesty International dénombre au moins 143 manifestants morts sous les balles lors de la répression, évoquant «une attaque épouvantable contre la vie humaine». De nombreuses personnes ont également été arrêtées. Les chiffres varient : les médias officiels iraniens parlent de 180 «meneurs d’émeutes arrêtés» tandis que l’opposition dénonce 4 000 arrestations. Les Gardiens de la Révolution, l’armée d'élite liée directement au Guide suprême, ont en tout cas promis de punir sévèrement les «mercenaires». «Notre réponse sera certainement proportionnelle à leur brutalité», a déclaré le contre-amiral Ali Fadavi, commandant en chef adjoint des Gardiens de la Révolution.
Ces derniers jours, «les émeutes sont arrêtées mais le calme n’est pas revenu en Iran, le mécontentement est toujours latent», explique Bernard Hourcade. Ce qui a conduit certaines personnes dans la rue ? Le désespoir, explique le géographe. «L’inflation est telle en Iran, le prix du pain a quintuplé». La hausse du prix de l’essence décidée par le gouvernement a donc agi comme «une étincelle qui a déclenché le désespoir des gens, mais celui des plus désespérés». En effet, selon le spécialiste, si certains citoyens de la classe moyenne prennent part aux manifestations, «ils voient que dans tous les cas, il n’y a rien à faire».
Un lien avec les sanctions américaines ?
Ce desespoir des Iraniens est directement lié à la mauvaise santé économique de la République Islamique. Selon le FMI, l’inflation en Iran pourrait atteindre les 40% en 2020, et l’économie iranienne devrait être en récession pour la deuxième année consécutive. Une économie notamment plombée par la mise en place de sanctions économiques américaines, dénonçant la politique nucléaire de l’Iran. Bernard Hourcade est catégorique, «les émeutes en Iran sont le produit de la politique de monsieur Trump. On ne fait plus rien en Iran, tout est arrêté, l’économie est à zéro.»
Aujourd’hui, l’Iran se retrouve face à des problèmes de pauvreté, de terrorisme, et «le gouvernement se retrouve dans une voie sans issue».
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