Les Haïtiens dans la rue pour dénoncer l'insécurité
Entretien réalisé par Anne-Quitterie Jozeau – Cité du Vatican
En Haïti, plusieurs marches citoyennes contre l'aggravation de l'insécurité ont eu lieu cette semaine. Ce vendredi, les habitants de Port-au-Prince étaient encore appelés à manifester dans la capitale. Leur colère ne s’apaise pas, malgré l’annonce le 12 février par le Premier ministre d’un durcissement des contrôles de police.
Les autorités «font semblant de réagir avec force mais les mesures prises n’ont jamais été effaces et pour cette raison la population se sent livrée à elle-même» estime Mgr Alphonse Quesnel, l'évêque de Fort-Liberté. Il rappelle également la défiance qui s’est installée entre la population et le gouvernement démissionnaire, ayant ainsi perdu sa légitimité.
Depuis le début de l’année, les enlèvement se multiplient. La police a recensé au moins 15 rapts, un chiffre à revoir à la hausse de l’aveu même des force de l’ordre.
Impossible de connaître l’identité des ravisseurs, «tous les secteurs sont concernés» souligne l'évêque de Fort-Liberté. Des étudiants viennent d’être enlevés à Port-au-Prince, une jeune fille à Cap haïtien. Un prêtre a été également pris en otage pendant deux jours avant d’être relâché dans le diocèse d'Anse-à-Veau et Miragoâne. Une rançon a-t-elle été versée? Mgr Quesnel ne sait pas. Il en parlera la semaine prochaine avec l’évêque du diocèse Mgr Pierre-André Dumas. Depuis ce rapt, plusieurs prêtres refusent de se rendre dans la capitale, explique-t-il.
Ces enlèvements contre rançon sont le fruit d’une profonde crise qui frappe le pays, explique encore Mgr Quesnel : «quand on voit le taux élevé de chômage, l’ensemble des frustrations, des promesses électorales non tenues, le gaspillage des fonds publics, surtout la dilapidation de Petrocaribe, de l’argent qui aurait pu servir à l’amélioration des conditions de vie de la population… Tout cela créé les conditions pour augmenter l’insécurité et un climat de peur».
Les enlèvements contre rançon connaissent une recrudescence, mais il ne s’agit pas d’un phénomène nouveau: déjà le pays a connu «un pic» en 2004 après le départ forcé du président Jean-Bertrand Aristide.
Les prises d’otage sont «une arme subtile» à laquelle on recourt pour «créer un climat de peur, d’insécurité, de déstabilisation du pouvoir politique et économique car les gens ont peur d’investir» affirme encore l'évêque de Fort-Liberté. Moins de personnes se risquent à venir en Haïti et les familles de la diaspora hésitent à envoyer des fonds qui alimenteraient le système.
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