La présidence allemande de l’UE à l’ombre de la pandémie
Entretien réalisé par Xavier Sartre – Cité du Vatican
«Une présidence coronavirus» : ce sont les termes choisis par le ministre allemand des Affaires étrangères, Heiko Maas. Jamais les Européens n’avaient connu, il est vrai, une telle crise aussi globale. La pandémie de covid-19 qui s’est abattue sur le continent, certes de manière inégale, a provoqué, outre une crise sanitaire, une crise économique et sociale de grande ampleur. Toutes les économies sont touchées et dans des proportions rarement vues depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale : -11 % de croissance pour la France et l’Italie, -6,6 % pour l’Allemagne selon les prévisions de l’OCDE pour l’année 2020. La plupart des pays industrialisés ont mis en place des plans de relance et de soutien de l’économie, déboursant parfois des sommes là aussi rarement vues : le gouvernement allemand a mis sur la table en tout 1130 milliards d’euros pour venir en aide à sa population et à ses entreprises.
C’est dans ce contexte que l’Allemagne prend ce mercredi la présidence semestrielle de l’Union européenne, ce qui n’était pas arrivé depuis 2007. À l’époque, c’était déjà Angela Merkel qui était aux commandes à la chancellerie. Mais les perspectives étaient plus encourageantes même si elle devait gérer les conséquences des non français et néerlandais au traité constitutionnel européen. Aujourd’hui, la chancelière démocrate-chrétienne se retrouve en première ligne pour aider l’UE à surmonter le choc provoqué par la covid-19.
Les Européens divisés
Le principal problème qu’elle doit affronter est «l’absence de consensus» autour d’un plan de relance au niveau européen, remarque Claire Demesmay, directrice du programme franco-allemand de l’Institut allemand de politique étrangère (DGAP) à Berlin. Les quatre «frugaux», Pays-Bas, Danemark, Autriche et Suède, sont réticents à ce que l’Union s’endette en faveur des pays ayant le plus souffert de la pandémie et qui se trouvent être ceux ayant le moins de manœuvre financière et budgétaire, à savoir les pays du Sud, Espagne et Italie en tête. Cette césure au sein de l’Union ne date pas d’aujourd’hui et ne fait que confirmer une tendance déjà connue au moment de la crise des dettes souveraines en 2012-2013.
«L’Allemagne doit utiliser sa présidence comme force de modération, doit conduire les autres États membres à un consensus. C’est la priorité absolue de la présidence allemande, premièrement d’arriver à un accord sur le plan de relance et deuxièmement sur le budget européen» poursuit la directrice du DGAP. Berlin a bien conscience qu’à «crise exceptionnelle», il faut des «moyens exceptionnels» explique Claire Demesmay. Ces moyens, ils ont été exposés par la France et l’Allemagne dès le 18 mai dernier: «un fonds de 500 milliards d’euros, non pas avec des prêts, mais avec des subventions» précise-t-elle. Le gouvernement allemand veut aller vite sur ce dossier et espère parvenir à un accord d’ici le sommet européen du 17 juillet.
Merci d'avoir lu cet article. Si vous souhaitez rester informé, inscrivez-vous à la lettre d’information en cliquant ici