Tensions entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan: «un risque d’escalade majeur»
Entretien réalisé par Adélaïde Patrignani – Cité du Vatican
Dimanche 19 juillet dernier, après la prière de l’Angélus, le Saint-Père a fait part de son inquiétude face au «regain de tensions armées dans la région du Caucase entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan ces derniers jours». François a souhaité qu’une «solution pacifique durable» soit trouvée, appelant pour cela à «l'engagement de la communauté internationale et grâce au dialogue et à la bonne volonté des parties».
Les craintes du Souverain Pontife à propos de cette nouvelle flambée violence sont justifiées: la semaine dernière, au moins 16 personnes ont été tuées dans les affrontements les plus graves entre les deux pays depuis 2016.
Un conflit aux causes anciennes et plus récentes
Les deux ex-républiques soviétiques sont en conflit depuis des décennies autour du Nagorny Karabakh, une région sécessionniste d'Azerbaïdjan soutenue par l'Arménie et théâtre d'une guerre au début des années 1990. Les derniers affrontements ont cependant eu lieu loin de ce territoire, à la frontière nord entre les deux pays. Cette escalade rare laisse craindre un conflit de plus grande ampleur dans l'instable Caucase. «La paix n’est pas pour demain. On ne voit pas comment il pourrait se dégager une dynamique de paix, vu les circonstances», confirme Gaïdz Minassian, journaliste au Monde et enseignant à Sciences-Po Paris, qui précise également les causes des tensions actuelles.
Redoutant l’embrasement, les États-Unis et l'Union européenne ont appelé à cesser les hostilités. La Russie, soutien de l’Arménie, a de son côté souligné «le besoin urgent de garantir un cessez-le-feu» et proposé sa médiation. Mais Moscou ne souhaite pas non plus un affrontement direct avec la Turquie, allié inconditionnel de Bakou.
Menaçantes ambitions turques
Le conflit en cours entre les deux voisins du Caucase intervient en effet dans un contexte de concurrence exacerbée entre Turcs et Russes au Proche-Orient et en Méditerranée, en Libye et en Syrie, où leurs intérêts divergent.
«La Russie est face à un dilemme, relève Gaïdz Minassian: faut-il satisfaire la Turquie en brisant le groupe de Minsk [groupe chargé par l’OSCE de conduire une médiation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan afin de mettre un terme au conflit du Haut-Karabagh, représenté par une co-présidence composée de la France, des États-Unis et de la Russie NDLR], en “dés-occidentalisant” la négociation mais en même temps en favorisant et en légitimant la présence de la Turquie dans son ancien pré-carré caucasien, ou faut-il maintenir le groupe de Minsk en l’état en tenant à l’écart la Turquie de toute médiation dans la région ?»
«Il y a un risque d’escalade majeur, conclut Gaïdz Minassian, qui est contenu pour l’instant (…) mais inévitablement il y aura de nouvelles tensions».
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