Assassinat d'un scientifique iranien: «un signe d’Israël aux États-Unis»
Entretien réalisé par Hélène Destombes - Cité du Vatican
Mohsen Fakhrizadeh a été tué dans une attaque au véhicule piégé suivie d'une fusillade contre sa voiture, selon le ministère iranien de la Défense. Ce meurtre n'a pas été revendiqué, mais pour Téhéran il est clair qu’il s’agit d’une action du Mossad, les services secrets israéliens. Le président iranien, Hassan Rohani, a accusé Israël de semer le «chaos» et d'avoir agi comme «mercenaire» des États-Unis. Il a promis une riposte «en temps et en heure».
Cette opération a été qualifiée de «complexe avec un recours à du matériel électronique» par le secrétaire iranien du Conseil suprême de la Sécurité nationale qui estime que Mohsen Fakhrizadeh était dans le viseur d’Israël depuis vingt ans. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu l’avait présenté en 2018 comme le chef d'un programme nucléaire secret à vocation militaire dont Téhéran a toujours nié l'existence. Trois ans auparavant, il était apparu dans un document de l'Agence internationale de l'Énergie atomique (AIEA).
Un assassinat déjà projeté il y a dix ans
L’assassinat du scientifique iranien intervient dans un contexte particulier, alors que s’ouvre la campagne pour l’élection présidentielle iranienne du 18 juin et moins de deux mois avant l’arrivée à la Maison Blanche du démocrate Jo Biden. Le président-élu américain a dit souhaiter le retour des États-Unis dans l'accord international sur le nucléaire conclu en 2015 à Vienne, et abandonné par Donald Trump en 2018, avant de rétablir des sanctions économiques contre l'Iran.
Pour Benjamin Hautecouverture, maître de recherches à la Fondation pour la recherche stratégique «Israël fera absolument tout pour empêcher que l’Iran ne devienne une puissance nucléaire». «L’assassinat de Mohsen Fakhrizadeh pouvait être attendu depuis 2018, il avait déjà été projeté au début des années 2010 par Israël, puis abandonné». La volonté d’Israël, souligne t-il, est de «retarder la programmation nucléaire iranienne et les progrès réalisés par les scientifiques iraniens».
De probables représailles
Il y a également une lecture politique liée à l’alternance à Washington. Un signe a été envoyé aux États-Unis alors que «la volonté de retour de la future administration démocrate dans l’accord sur le nucléaire de 2015 est de nature à inquiéter Israël». Cet assassinat, selon Benjamin Hautecouverture, peut être interprété comme «un signe de fébrilité mais aussi de fermeté d’Israël avant que ne se mette en place le nouveau pouvoir à Washington».
L’Iran réagira certainement à cette attaque contre son programme nucléaire, comme elle l’a fait après la mort du général iranien Ghassem Soleimani, tué en janvier 2020 lors d’un raid américain à Bagdad, relève Benjamin Hautecouverture et «il faut s’attendre à de nouvelles réactions asymétriques. Par ailleurs, note t-il «l’autre risque est que le programme nucléaire iranien continue de s’enfoncer dans la clandestinité pour sécuriser sa progression»
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