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Journée de la mémoire: la difficile transmission

Ce 27 janvier, le monde célèbre la Journée de la mémoire de l’Holocauste et de la prévention des crimes contre l’humanité. L’école demeure le lieu privilégié pour enseigner ce que fut la Shoah et son unicité. Mais ce n’est pas sans difficultés, alors que les derniers témoins disparaissent.

Entretien réalisé par Xavier Sartre – Cité du Vatican

Le 27 janvier 1945, les soldats de l’Armée Rouge délivrait le camp de concentration et d’extermination nazi d’Auschwitz-Birkenau. Depuis, le monde célèbre à cette date une journée dédiée à la Shoah, le génocide des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, à tous les génocides et à la prévention des crimes contre l’humanité.

76 ans après la fin de la guerre, alors que les derniers témoins de la Shoah disparaissent, le lien physique avec cette période et la transmission de sa mémoire se désincarne. Dans un contexte où l’antisémitisme n’a jamais faibli et varie ses origines et ses expressions, où le négationnisme ou le complotisme se trouvent renforcés grâce aux réseaux sociaux, enseigner la Shoah n’est pas facile.

Aider les enseignants

En France, «on se rend compte qu’il y a encore beaucoup d’éléments de compréhension à apporter», constate ainsi Marie-Anne Matard-Bonucci, professeure d’histoire contemporaine à Paris VIII, spécialiste de l’antisémitisme et des fascismes. Présidente d’Alarmer, l’association de lutte contre l’antisémitisme et les racismes par la mobilisation de l’enseignement et de la recherche, elle contribue à former et à aider des professeurs qui enseignent la Shoah.

Elle relève deux difficultés principales dans cet enseignement. Tout d’abord, «on ne comprend pas la Shoah si on ne comprend pas toute l’histoire de l’antisémitisme en amont ; or cette dimension n’est pas enseignée. Il faudrait pourtant par exemple parler de l’antijudaïsme à matrice chrétienne sur lequel l’Église a fait la lumière depuis le Concile Vatican II.» Ensuite, «il faut donner du temps aux enseignants pour faire de l’histoire or les programmes sont de plus en plus légers,» poursuit-elle.

Commencer par l'étude du racisme

Mais, «pour enseigner les valeurs d’humanisme et républicaines, il ne faut pas partir de la Shoah» estime la présidente d’Alarmer. Au contraire, «il faut partir des hostilités identitaires, des préjugés, du racisme de manière plus générale».

Il ne faut pas non plus partir «du registre de l’émotion ou de la morale, qui sont à géométrie variable» ajoute-t-elle. «L’école est le lieu de l’intelligence, de la déconstruction des phénomènes». L’approche doit donc être avant tout scientifique, intellectuelle, pour «expliquer comment on en est arrivé là».

La difficulté d'incarner la mémoire

Jusqu’à présent, les élèves et les étudiants pouvaient rencontrer des survivants de la Shoah et écouter leur voix, leur récit. Avec le temps, ces rencontres sont de moins en moins nombreuses et appelées à disparaître. Si des heures et des heures d’archives sonores et visuelles sont disponibles, une autre approche est possible pour transmettre la mémoire.

«La posture active des élèves ou des étudiants» permet cela, explique Marie-Anne Matard-Bonucci. Plusieurs associations ou projets ont investi ce créneau comme Convoi 77, du nom du dernier convoi de déportés parti du camp de Drancy en France, vers celui d’Auschwitz. «Chaque étudiant conduit une recherche pour reconstituer la biographie des déportés qui sont partis avec ce convoi. Il est amené à faire l’histoire de la Shoah, d’une manière incarnée» précise la professeure d’histoire. 

Entretien ave Marie-Anne Matard-Bonucci, présidente d'Alarmer

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27 janvier 2021, 08:45