Après le départ des occidentaux, les défis qui attendent les talibans
Entretien réalisé par Olivier Bonnel - Cité du Vatican
Les coups de feu ont résonné longtemps dans la nuit de Kaboul. Lundi 30 août au soir, les talibans ont célébré joyeusement, à coup de tirs de kalachnikov le départ du dernier avion militaire américain du tarmac de l'aéroport Hamid Karazaï de Kaboul. Le retour aux États-Unis du dernier C 17 de l'armée américaine a fermé une page de vingt ans de présence occidentale dans le pays.
L’effondrement spectaculaire de l’armée afghane début août et la prise de Kaboul ont renforcé l’idée d’un État afghan en déroute, tenu à bout de bras par la communauté internationale. Le pays est aujourd’hui aux mains des talibans, qui contrôlent, à l’exception de la vallée du Panshir au nord-est, la totalité du pays.
Les islamistes ont tenu à immortaliser ce départ. Le porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid, a mené un groupe de responsables sur le tarmac de l'aéroport, et les forces spéciales talibanes, appelées "Badri 313" ont paradé, uniformes flambant neufs et armes américaines au point.
Trouver une légitimité internationale
Alors que les dernières évacuations d’occidentaux et d’Afghans sont achevées, après deux semaines de chaos, une page blanche s’ouvre désormais pour les islamistes, nouveaux maîtres de Kaboul. Les enjeux sont colossaux pour la guérilla talibane, à commencer par trouver une légitimité internationale et assurer la sécurité du pays face au terrorisme de l'Etat islamique au Khorasan. L'attentat-suicide meurtrier près de l'aéroport de Kaboul le 26 août dernier a montré le pouvoir de nuisance des terroristes.
Sur un plan politique, l'enjeu principal des talibans est de gagner une légitimité internationale, «ne serait-ce que pour accéder aux ressources de l'État afghan gelées à l'étranger», souligne le politologue Olivier Roy, spécialiste de l'Afghanistan. Le régime taliban a besoin d'argent pour payer ses fonctionnaires et faire fonctionner ses institutions. Si la composition du gouvernement, que les talibans ont promis «inclusif» laisse planer des doutes, il faudra par ailleurs affronter les défis d'un des pays les plus pauvres du monde et gérer la catastrophe humanitaire. Selon l'Unicef, 10 millions d'enfants afghans ont un besoin urgent d'aide. Les enfants, qui avec 550 morts et 1400 blessés rien que cette année, ont payé au prix fort les violences dans le pays.
Dans Kaboul, ville de 6 millions d'habitants, qui s'est beaucoup transformée en vingt ans, les talibans vont devoir assurer la sécurité face aux groupes terroristes. «Une bataille qu'ils devraient pouvoire remporter» selon Olivier Roy, même si de nombreuses inconnues demeurent.
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