Quelles sont les chances de réussite du nouveau gouvernement libanais?
Entretien réalisé par Marine Henriot – Cité du Vatican
Depuis la double explosion dévastatrice dans le port de Beyrouth le 4 août 2020, qui avait fait plus de 200 morts, le pays du Cèdre survivait sans gouvernement. La crise économique inédite que traverse le pays depuis l'été 2019 n'a eu de cesse de s'aggraver, la Banque mondiale la qualifiant d'une des pires au monde depuis 1850.
Avec une inflation galopante et des licenciements massifs, 78% de la population libanaise vit aujourd'hui sous le seuil de pauvreté, selon l'ONU. C’est d’ailleurs là la principale urgence du nouveau gouvernement, pallier la crise sociale et humanitaire. La mise en place d’une équipe gouvernementale était la condition préalable à l’obtention de l’aide humanitaire.
Un gouvernement format classique
Un nouvel exécutif est désormais en ordre de marche. Reste à savoir si cette équipe pourra réussir là où de nombreux ont échoué, pour mettre en place les réformes structurelles dont le Liban a cruellement besoin. «Le problème vient du fait qu’il ne s’agit pas véritablement d’un gouvernement de technocrates», précise Karim Emile Bitar, chercheur associé à l’IRIS (Institut de Relations Internationales et Stratégiques). À quelques exceptions près en effet, comme les figures indépendantes nommées à la santé, à l’éducation ou à l’environnement, «c’est un gouvernement de partage des postes entre les différents partis communautaires», détaille le spécialiste du Moyen-Orient.
A priori, ce nouveau gouvernement est condamné à une durée de vie assez courte, avec l’arrivée des élections législatives en mai 2022, éclaire Karim Emile Bitar, qui ne cache pas ses faibles espoirs, «Il ne faut pas attendre de véritables réformes qui remettraient le pays sur pied économiquement.»
Quid des pays voisins ?
Lors de sa prise de pouvoir, Najib Mikati s’est engagé à solliciter l’aide des pays arabes, tandis que les relations avec les riches monarchies du Golfe demeurent tendues, sur fond de bras de fer régional entre l'Iran et l'Arabie Saoudite. Mais le nouveau Premier ministre est un homme de compromis, qui réussit à maintenir des relations cordiales avec le Hezbollah et les pays du Golfe. Ces quatre dernières années, l’Arabie Saoudite refusait de verser le moindre centime au Liban, Riyad considérant trop grande l’influence du Hezbollah chiite dans le pays du Cèdre; «reste à savoir si l’Arabie Saoudite va lâcher un peu de lest et va revenir à sa position des années 90 où elle aidait le Liban… Je ne pense pas que cela soit le cas», commente le chercheur de l'IRIS.
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