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Le père Philippe Demeestere, (à gauche), aumônier local du Secours catholique et un couple de Calais sont en grève de la faim. Le père Philippe Demeestere, (à gauche), aumônier local du Secours catholique et un couple de Calais sont en grève de la faim. 

À Calais, le Secours Catholique dénonce la violence contre les migrants

Trois personnes dont l'aumônier du Secours Catholique sont en grève de la faim depuis le 11 octobre pour interpeller les pouvoirs publics sur la dégradation des conditions de vie des demandeurs d'asile. Ils demandent notamment la fin des démantèlements de campements durant la trêve hivernale.

Olivier Bonnel - Cité du Vatican

À Calais, dans le Nord de la France, la situation des migrants est de plus en plus préoccupante. La dégradation constante de leurs conditions de vie devient une préoccupation grandissante pour les acteurs sur le terrains, associations en tête. Le Secours Catholique Caritas France, au sein d’un collectif intitulé «Faim aux frontières» a lancé une pétition en ligne pour interpeller les pouvoirs publics, demandant la suspension des expulsions quotidiennes et des démantèlements de campements durant la trêve hivernale mais aussi l’arrêt de la confiscation des tentes et des effets personnels des demandeurs d’asile.

«Depuis plusieurs années, souligne le collectif des associatifs, des militants et des personnes exilées alertent sur la situation inhumaine qui s’inscrit dans le Calaisis» peut-on lire dans le texte de cette pétition qui dénonce formes quotidiennes de «violences psychologiques et physiques à l’encontre des personnes exilées». Celles-ci prennent des formes multiples, expliquent les associations d’aide aux migrants: expulsions toutes les 48h voire quotidiennes; confiscation et destruction des effets personnels; multiplication des arrêtés anti-distribution de nourriture et d’eau; humiliations; coups et blessures de la part des forces de l’ordre, etc.

Un dialogue de sourds avec les autorités

Le Secours Catholique dénonce un dialogue impossible avec les autorités à tel point que trois personnes ont entamé une grève de la faim dans l’église Saint-Pierre de Calais pour se faire entendre. Parmi eux le père Philippe Demeestere, l’aumônier du Secours catholique de Calais. Le 14 juillet par exemple, le prêtre raconte qu'une demande de non-expulsion avait été formulée auprès de la sous-préfecture, demande restée sans réponse. Et les expulsions de demandeurs d'asile ont néanmoins eu lieu. 

Le père Demeestere se désole de faire face à une «mécanique devenue inhumaine» d'un État qui doit répondre à des considérations dictées par un agenda politique. Selon lui en effet, le climat de campagne électoral en France explique en partie cette réponse uniquement sécuritaire à un drame humanitaire. 

Entretien avec le père Philippe Demeestere

On s'est habitué à beaucoup de choses à Calais, à une maltraitance ordinaire des exilés, et il est important de dire de la part de citoyens que ça suffit! Les consciences sont commes anesthésiées par l'habitude, endormies par des prudences qui sont largement partagées, jusque dans nos églises, pour ne pas créer du désordre, et il est important de manifester à travers ce moyen d'expression. On ne veut pas que cela perdure. Nos revendications sont très simples: elles portent uniquement sur la période hivernale. Il s'agit simplement de faire droit à la plus simple humanité et de permettre ici aux exilés de ne pas être expulsés durant l'hiver, de ne pas se voir confisquer leurs tentes ou leurs effets personnels. Le gouvernement fait le minimum et le fait mal parce qu'il n'y a pas de véritable volonté d'accueil derrière. Il s'agit ici de dégoûter les gens, en leur pourissant la vie, de demeurer en France.

Vous dénoncez un dialogue de sourds avec les pouvoirs publics?

Si les Français ont accepté de mettre la frontière de la Grande-Bretagne en France, ce n'est pas simplement moyennant l'apport financier britannique pour bâtir des murs et des grillages sur la ville de Calais, mais c'est aussi que les exilés sont devenus prétexte à marchandage. Rien n'est mis sur la table et c'est cela qui fausse toutes les rencontres avec les autorités. En face de nous nous n'avons pas des gens qui sont libres. Les mots aussi sont détournés de leur sens. Le gouvernement prétend qu'il pratique une politique d'accueil et de fermeté, mais d'accueil il n'y a rien! Tout ce qui est pris en charge effectivement par le gouvernement ce sont des actions minimales telles qu'elles ont été ordonnées par les autorités judiciaires. C'est toujours avec le pied sur le frein et la marche-arrière enclenchée que le gouvernement fait le minimum et le fait mal, parce qu'il n'y a pas de vraie volonté d'accueil. Ce qui se passe ici n'a pas lieu dans un pays à 10 000 kilomètres, à propos duquel on pourrait dire "on ne peut rien faire". L'abbé Pierre parlait "d'insurrection des consciences", il y a bien quelque chose de cela qui doit se produire. 

 

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15 octobre 2021, 11:45