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Un camp de déplacés dans la périphérie de Maiduguri, dans l'état de Borno, en août 2021. Un camp de déplacés dans la périphérie de Maiduguri, dans l'état de Borno, en août 2021.  

Au Nigeria, un programme pour la réinsertion des chefs jihadistes

Le gouvernement nigérian développe un programme pour convaincre les dirigeants du groupe Boko Haram, qui sème la terreur dans le pays depuis 2016, de déposer les armes et de réintégrer la société civile.

Avec agences

Du nom de «Sulhu», qui signifie «réconciliation» en arabe, ce programme secret du gouvernement nigérian entend convaincre les dirigeants du groupe jihadiste Boko Haram d’abandonner la lutte armée et de s’engager sur la voie de réintégration dans la société. Celui qui accepte est placé dans un programme de réinsertion qui, après un premier tri sur la sincérité du milicien, prévoit des cours de formation sur la légalité, une thérapie psycho-sociale et, enfin, un programme de réinsertion qui, bien que secret, suscite un grand débat dans la société nigériane, rapporte Fides.

Interrogé par l’agence des Œuvres Pontificales Missionnaires, le père Donatus Tizhe, prêtre administrateur du diocèse de Maiduguri, dans l'Etat de Borno, et curé de la paroisse de St Hilary Polo, commente : «Le Suhlu est un moyen d'amener les gens à la paix, à la réconciliation comme le dit le terme lui-même. Nous ne savons pas grand-chose à ce sujet car il s'agit d'un programme secret, mais nous avons la conviction qu'il fonctionnera après tant d'échecs. Ces dernières années, de nombreuses tentatives de dialogue ont échoué, les méthodes alternatives n'ont pas fonctionné et les gens continuent de souffrir pendant trop longtemps.»

Des centaines de redditions ces derniers mois

Le père Tizhe voit dans ce programme qui s’adresse directement aux chefs jihadistes une méthode efficace, souligne-t-il à l’agence Fides, «en contactant les responsables et en leur faisant comprendre les avantages de l'abandon de la lutte armée, puis en les plaçant dans des programmes de réhabilitation. Ce faisant, elle vise donc les dirigeants, qui ont un pouvoir de persuasion bien plus grand que les simples soldats.» Au cours des deux derniers mois, plus de 200 chefs de Boko Haram auraient ainsi quitté les forêts dans lesquelles ils établissent leur camps. Par ailleurs, selon l’agence AFP, depuis la mort du chef historique du groupe, Abubakar Shekau en mai dernier, des centaines de militants et leurs familles ont fait reddition.

Une fois que les responsables jihadistes se sont rendus, un processus progressif de réhabilitation commence, détaille le prêtre, «Ils sont emmenés dans un centre près du port de notre ville et y restent longtemps, dans un processus de dépistage de leurs intentions. Ils sont ensuite transférés dans les villages ou les villes où ils sont censés commencer une nouvelle vie. Je peux dire qu'au cours des derniers mois, nous avons constaté une diminution des attaques. Mais malheureusement, les factions de terroristes se battent entre elles, essayant de prendre la tête du mouvement. Cela pourrait en tout cas être un tournant et nous avons confiance en Dieu pour que nous réussissions à nous libérer».

Depuis le début de la rébellion du groupe islamiste radical Boko Haram en 2009 dans le nord-est du Nigeria, le conflit a fait près de 36 000 morts et deux millions de déplacés. A noter depuis la mort d'Abubakar Shekau, la progression de l’Iswap (l’organisation de l’Etat islamique en Afrique de l’Ouest), né en 2016 d'une scission avec Boko Haram, qui a désormais pris le dessus dans la région. Les deux groupes s'affrontent entre eux et début octobre, des jihadistes de l'Iswap ont attaqué un camp abritant des combattants de Boko Haram.  

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16 octobre 2021, 13:28