Caritas Europe: la Pologne a besoin de solidarité européenne
La tension ne faiblit pas entre la Pologne et le Bélarus, accusé de "terrorisme d'Etat" mercredi 10 novembre par Varsovie, qui a renvoyé des centaines de migrants, surtout des Kurdes irakiens, ayant franchi sa frontière orientale. Alors que les grandes capitales s'activent pour tenter de désamorcer la crise, sur le terrain, la situation reste précaire sur ce qui constitue la limite orientale de l'Union européenne.
Quelques milliers de migrants, parfois des familles, sont massés le long de la frontière polono-bélarusse dans des conditions climatiques parfois glaciales. La situation est "intolérable", a dénoncé la Haute-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Michelle Bachelet.
Le manque d’accès à la zone boisée est déploré par de nombreuses organisations, à l’image de Caritas Europe, dont la secrétaire générale, Maria Nyman, en appelle à la solidarité européenne. Elle nous explique quelle est la situation sur place.
Quel rôle peuvent jouer les Caritas locales pour apaiser la situation à la frontière entre le Belarus et la Pologne?
Maria Nyman: La Caritas fait ce qu’elle peut dans des circonstances très difficiles. Caritas Pologne soutient les Caritas locales mobilisées dans les diocèses proches de la frontière bélarusse. Qu’il s’agisse de points d’aide qui fournissent des sacs à dos, des barres énergétiques, de l’eau, etc. Elles ont organisé des transports humanitaires vers les centres de réfugiés et discutent avec les paroisses frontalières des méthodes d’intervention dans la région dans le cadre de l’état d’urgence en vigueur. Caritas Pologne n’a pas accès à la frontière en elle-même en raison de cet état d’urgence, cette loi empêche actuellement Caritas d’apporter son aide.
Estimez-vous que les pays baltes et la Pologne se retrouvent confrontés à une situation similaire à la Grèce, l’Italie, Malte et l’Espagne depuis des années?
Oui et non. Non, car le contexte géopolitique -de tensions entre l’UE et le Belarus- est différent. Ce qui est similaire est cette vulnérabilité des migrants à la frontière. Ils sont coincés dans des situations où leur dignité et droits sont violés. Ils passent la nuit dans des forêts où la nuit la température est glaciale et va continuer de chuter à l’approche de l’hiver. Ils sont sans accès à une aide médicale ou humanitaire et dans l’impossibilité de déposer une quelconque demande d’asile. En tout cela, ce sont des situations similaires aux pays méditerranéens.
Autre point commun, la Lituanie et la Pologne, tout comme la Grèce, l’Italie et l’Espagne, ont besoin de la solidarité européenne car c’est une question européenne.
En tant que secrétaire générale de Caritas Europe, quel appel lancez-vous à l’Union européenne sur cette situation frontalière précise?
Tout d’abord, soutenir l’accès à la frontière pour fournir une aide d’urgence, mais aussi permettre aux organisations internationales et aux agences européennes d’opérer à la frontière. La situation ne s’améliore pas, donc il est assez probable qu’il y ait davantage de blessés. Nous souhaitons aussi la fin des refoulements pour respecter le droit d’asile, à examiner dans le cadre d’une évaluation correcte et équitable.
Bien sûr, faire le nécessaire pour désamorcer le conflit avec le Belarus. Et rappeler à nos dirigeants que chaque être humain, quelle que soit son origine ou la raison de son voyage, doit voir son droit respecté et que les tensions géopolitiques ne doivent pas servir de prétexte. Nous joignons aussi notre voix à celle des dirigeants de l’Église comme l’appel du président de l’épiscopat polonais, Mgr Stanislaw Gadecki, et celui de l’archevêque de Vilnius, par ailleurs président des évêques européens, Mgr Gintaras Linas Grušas. Il a rappelé que les pays européens ont bien sur le droit de protéger leur frontière, mais «avec humanité».
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