Liban: la crise économique met en sursis l’hôpital Saint-Joseph
Vatican News
Sur les hauteurs de la banlieue nord de Beyrouth, d’où l’on peut apercevoir ce qu’il reste du port après l’explosion, l’hôpital Saint-Joseph accueille 800 patients, tous atteints de différentes pathologies mentales. Chacun d’entre eux a besoin d’une assistance spécifique et presque permanente. L’hôpital est une importante structure avec plusieurs bâtiments et emploie plus de 300 personnes, médecins, infirmières, infirmiers, et personnel non-soignant.
L’institution a été fondée en 1952 par le bienheureux père Jacques Haddad (né en 1875 et décédé en 1954, le père capucin a été béatifié à Beyrouth le 22 juin 2008). Son projet est lié aux conséquences de la Première Guerre mondiale lorsque les handicapés et les malades mentaux, souvent des enfants, étaient abandonnés par leurs familles. Face à ces situations, le père Haddad a fondé l’hôpital de la Croix et, en 1930, la Congrégation des sœurs franciscaines de la Croix du Liban. Ce sont elles qui aujourd’hui marchent sur les pas de leur fondateur et gèrent 25 centres médicaux, sociaux ou pédagogiques, dans tout le Liban. Dès le départ, l’institution se consacre à soutenir les plus démunis.
Appel à l’aide internaitonale
Mi-novembre, les 65 franciscaines de l’hôpital, dont la directrice, sœur Jeanette, ont reçu la visite d’une délégation de la fondation pontificale Aide à l’Église en Détresse. Avec d’autres organisations, AED soutient et finance des projets qui permettent à la structure de continuer à s’occuper de ses malades. La crise économique a mis à dure épreuve la tenue de l’établissement qui actuellement vit sur ses réserves et n’aurait que quelques mois d’autonomie sans la solidarité internationale.
Chaque mois, il faut verser les salaires, nourrir les patients, acheter des médicaments déjà très chers avant la crise mais dont le prix a plus que triplé avec la dévaluation de la livre libanaise. En sus, l’électricité n’arrivant qu’environ une heure par jour, l’hôpital fait tourner à plein régime des générateurs qui nécessitent chaque semaine quinze tonnes de fuel qu’il faut payer comptant et en dollars, à plus de 700 dollars la tonne.
L’État contribuait à hauteur de deux dollars par patients, soit deux mille dollars par mois avant la pandémie et avant que la structure, à but non-lucratif, ne réduise sa capacité d’accueil de 1000 à 800 lits à cause de la Covid. Mais depuis l’été 2020, plus aucune contribution n’est versée. Même si celle-ci était minime et insuffisante, elle représentait une rentrée régulière. Dans ce contexte, il ne reste aucune autre solution à la congrégation que de lancer des appels incessants aux organisations internationales sans lesquelles ce serait la fermeture assurée, et une catastrophe pour les patients.
Abandonnés et sans famille
Sœur Jeanette détaille, lors de notre rencontre à Beyrouth, qu’en cas de fermeture de l’hôpital la plupart des malades se retrouveraient à la rue. «Beaucoup n’ont plus de famille», dit-elle. Ou plus dramatique encore, «on a de nombreux cas de falsification d’information. Les familles nous confient leurs enfants et il arrive plus souvent qu’on ne le croit que des faux noms, des fausses adresses et des faux numéros de téléphone nous soient fournis» ; une situation qui concerne malheureusement les cas les plus graves, explique la religieuse, qui assure qu’elle fera tout ce qu’elle peut pour éviter qu’ils ne se retrouvent à la rue au cas où les financements n’arrivent pas et où l’établissement serait contraint de fermer.
Le personnel soignant, qui n’est pas épargné par la crise, comme l’écrasante majorité des Libanais, souhaite évidemment pouvoir poursuivre l’activité. Les infirmiers et infirmières sont souvent le seul contact des malades avec l’extérieur. Foutine, une jeune infirmière, témoigne de la détresse de nombreux malades. Ce travail est pour elle une «vocation», et elle se refuse à l’idée que l’hôpital puisse fermer faute d’argent. Ni Foutine, ni ses collègues, qui constituent pour beaucoup une famille de substitution, n’imaginent à aucun moment devoir abandonner des enfants une deuxième fois.
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