Olivier, Camerounais réfugié à Athènes: «les paroles du Pape sont un soulagement»
Manuella Affejee - Athènes
Olivier est fin prêt ; vêtu d’une belle tenue traditionnelle de son pays, le Cameroun, une petite bouteille d’huile d’olive qu’il compte faire bénir dans son sac, il se rend au Megaron Concert Hall, palais musical d’Athènes, où le Pape s’apprête à célébrer la messe, entouré d’une toute partie de la communauté catholique locale. Car les billets distribués n’ont été que peu nombreux, en raison des normes sanitaires en vigueur. Olivier figure donc parmi les chanceux.
L'Église, son point de repère
Cela fait désormais 4 ans qu’il se trouve à Athènes, au terme d’une angoissante errance. Cet ingénieur en informatique a dû quitter son pays natal, ses parents et sa femme enceinte de 3 mois suite à de «gros problèmes», raconte-il sans plus entrer dans les détails. Il parvient jusqu’en Turquie ; c’est là qu’il comprend ce qu’implique une traversée de la mer Égée, sur un canot pneumatique exigu, où s’entassent une quarantaine de personnes. Il n’était pas préparé à cela, mais il n’a plus le choix : c’est au bout de la 6e tentative qu’il rejoint les rivages de l’île de Samos. Après y être resté un certain temps, il arrive à Athènes. Comme tant d’autres personnes dans son cas, Olivier doit, dans un premier temps, vivre dans la rue. Son seul abri et point de repère : l’église. « Quand j’arrive sur un territoire étranger, je me dirige immédiatement vers l’église catholique », explique ce croyant fervent, qui propose de servir la communauté par le chant et l’animation liturgique. Le père Pierre Salembier, supérieur des jésuites de Grèce, lui offre alors un travail à la bibliothèque du couvent de la Compagnie de Jésus et accompagne Olivier dans ses lourdes démarches administratives.
La prière du Pape, celle de toute l'Église
Sa paroisse, composée essentiellement d’Africains, est sa nouvelle famille, même si celle qu’il a laissée à Douala lui manque terriblement. Surtout sa petite fille de 3 ans, qu’il n’a jamais vue autrement que via les réseaux sociaux, à qui il s’adresse via un écran, qu’il n’a jamais embrassée ou serrée dans ses bras. Une relation père-fille pour le moins frustrante qu’Olivier s’est vu contraint d’accepter, non sans souffrance, au vu des circonstances qui sont les siennes.
Le cri lancé une fois encore par le Pape François depuis Lesbos, Olivier le fait sien. Les paroles de François lui procurent «un soulagement énorme» : «il était temps que quelqu’un d’important pense à nous autres, demandeurs d’asile et réfugiés !». Lui a connu le camp fermé de Samos et en garde un terrible souvenir : «là-bas, on a l’impression d’être un rien-du-tout, une sous-personne», raconte-il, évoquant des traitements humiliants et traumatisants. «En fait, on quitte une situation difficile chez nous pour en retrouver une autre pire ailleurs», déplore Olivier. L’engagement du Pape n’est pas un fait anodin, superficiel ou de peu d’importance, au contraire. Olivier en est convaincu : lorsque le Successeur de Pierre voyage et parle, c’est toute l’Église universelle, visible et invisible, qui voyage, parle, et prie avec lui. Pour ce catholique convaincu, cette communion orientée vers une seule et même intention est beaucoup plus efficace que des discours politiques sempiternellement ressassés et guère suivis d’effet.
Un rêve : voir enfin sa fille
Ses demandes d’asile ont été déboutées pour le moment, et Olivier est toujours dans l’attente d’un rendez-vous que les autorités grecques tardent à lui donner. Mais il ne perd pas espoir et continue de bâtir d’ambitieux projets. Ne manque pour cela qu’une chose : les retrouvailles avec sa femme et sa petite fille bien aimée. Son unique rêve aujourd’hui : «la voir enfin, comme je vous vois».
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